Sans grande surprise, et sans jugement de la part du punk, Skunk n'attrapa pas sa main tout de suite, tentant dans un premier temps de se débrouiller tout seul comme un grand. Ce n'était pas Apache qui allait se foutre de sa gueule la dessus. Même s'il était conscient que ce n'était pas une attitude très maligne, il était tellement lui même coutumier du fait que ce serait vraiment l’hôpital qui se foutrait de la charité.
Bref.
Il pouvait comprendre l'entêtement.
"... Chier..."
Mais comme de bien entendu, visiblement, ça ne suffirait pas. L'iroquois ne pu retenir une grimace en regardant le plus jeune se débattre et clairement souffrir le martyre, ne parvenant pas à se remettre debout, et finalement, la main pale du Dandy attrapa celle du métisse qui l'accueillit avec vigueur, forçant pour créer un appui et le tirant même vers le haut.
Le récolteur s'agrippa à l'épaule de l'Hérissé pour se redresser plus ou moins droit sur ses guiboles.
C'était du sérieux.
Il était vraiment dans un sale état.

"Je me suis... un peu bousillé le dos... je crois...
- Ouais." Clairement, ouais. "Faut qu'on fasse demi-tour. Qu'on trouve la sortie de cette putain de machine. Temps pi pour la mission."
Skunk n'était clairement pas en état d'assurer cette mission de merde. Ils n'avaient pas le choix.
Au Diable la hiérarchie et sa connerie monumentale.
Qu'ils aillent bien se faire foutre !
Ils comprendraient bien la situation, non ?
Pffff...
Même pas sûr.
Ils étaient capable se reprocher au chasseur de pas avoir laissé Skunk sur place, ces enflures de merde. Il y avait que leurs intérêts qui comptaient !

Tout en pestant intérieurement et en aidant le Dandy à se tenir debout, l'anarchiste avait commencé à chercher une sortie du regard, se tournant dans la direction opposée aux conduits, plutôt vers la gueule qui les avait gobé un peu plus tôt.
Est ce qu'il n'y avait pas moyen de lui faire ouvrir la mâchoire ou un truc comme ça ?
Un mécanisme ou quoi que ce soit de ce gout la ?

Skunk est un peu mortifié d’avoir à s’appuyer ouvertement sur Apache pour tenir debout, mais le punk ne semble pas lui en tenir rigueur. Au contraire même : l’Hérissé l’assiste, le soutient le temps que ses jambes flageolantes se stabilisent. Et non seulement il ne fait aucun commentaire moqueur, mais il garde cet air concerné, que le Dandy reconnait sans pour autant (oser) parvenir à l’interpréter.

Peut-être que l’Hérissé culpabilise? Il doit bien savoir au fond de lui que s’il n’avait pas fait le con, ils n’auraient sans doute pas fait une entrée si fracassante et le Récolteur ne serait pas dans cet état. Cela expliquerait d’ailleurs aussi pourquoi le punk a été si magnanime avec cette histoire d’insulte raciste.

Mais c’est peut-être plus simple que cela. Skunk n’y pense que timidement, sans vraiment s’y attarder, mais il commence à entrevoir la possibilité que Apache l’aide réellement par pure solidarité, comme il l’a déjà déclaré quand ils étaient à l’Arbre. Que son inquiétude soit juste... sincère.

Cela parait un peu absurde au jeune Récolteur : encore une fois, l’autre adolescent et lui ne se connaissent pas, et même si le Dandy n’était pas à la base un petit con insupportable dont personne ne se préoccupe, il n’a objectivement été qu’une source d’ennuis pour le Chasseur. Ce ne sont pas vraiment de bonnes conditions pour faire naître de la compassion, n’est-ce pas?

Et pourtant. Il y a cette expression sereine et évidente qu’a eue Apache en ramassant le sac, en lui tendant la main. Il y a cette pointe de colère qui contracte son visage, quand il constate les efforts que son cadet fait pour simplement se maintenir sur ses pieds. Et ce qu’il finit par lâcher, avec une conviction alarmante :

“Faut qu'on fasse demi-tour. Qu'on trouve la sortie de cette putain de machine. Tant pis pour la mission.”

“NON! Non!”

Pour regarder Apache en face, Skunk se redresse trop brusquement. Il grimace quand son dos le lui fait payer cash, mais la douleur n’efface pas totalement l’expression paniquée qui vient de passer sur son visage trop blanc : le punk n’a pas tort, mais lui ne peut pas renoncer à cette foutue mission de merde. Il n’a pas le choix. Même si c’est un peu trop lui demander de l’expliquer à son anarchiste de compagnon.

Skunk déglutit tant bien que mal, avant de pousser sur l’épaule d’Apache pour s’en distancer un peu:

“Ça va aller. Vraiment. Tant que je garde le dos bien droit et que j’y vais doucement, ça devrait le faire.”

Comme pour prouver ses dires au punk, le Dandy le lâche lentement. Il n’a pas l’air très assuré sur ses appuis, mais il parvient effectivement à tenir debout tout seul. Il fait même un petit pas en arrière, avant d’esquisser un pauvre fantôme de sourire, comme s’il n’était pas si pâle que dans cet éclairage blafard il en parait presque translucide.

“Tu vois? Je vais y arriver.”

Il tente d’afficher un air déterminé, qui s’assombrit alors qu’il ajoute :

“Et de toute façon... Même si on essayait de sortir de là, je ne crois pas que cet endroit nous laisserait faire.”

D’un geste plein de précautions, il lève le bras pour désigner les conduits, au fond de la gueule de la Machine.

“Regarde. Il y a des pancartes. Une ventilation, vu la fraicheur de l’air. Et toute cette lumière? Tu ne trouves pas ça un peu trop opportun?”

Sans prêter attention à son vocabulaire qui se refait un peu trop ampoulé, Skunk fixe Apache, en s’efforçant de paraitre résolu... alors qu’au fond, il est surtout résigné.

“Cette Machine a été conçue, ou au moins aménagée pour accueillir des humains. Ça ne peut pas être un hasard : quelqu’un, ou quelque chose, nous veut ici. Clumsy m’a vaguement parlé d’une histoire d’esprit, qui propulserait la bête et qui se nourrirait de... de la jeunesse des visiteurs. Je ne sais pas trop ce que cela signifie vraiment, mais je crains que sortir d’ici soit bien plus compliqué que d’y entrer.”

Un soupir, puis un nouveau regard aux conduits, cette fois avec une appréhension perceptible : Skunk est petit, mais l’est-il assez pour cheminer là-dedans sans avoir besoin de se pencher?...

“Le chemin le plus court vers la sortie, c’est peut-être de jouer le jeu. Au moins au début.”

"NON! Non!"

Apache fit une bouille surprise, ses yeux s'agrandissant, ne s'attendant clairement pas à un refus aussi vif de la part du blessé !
Il ouvrit ensuite la bouche, prêt à répliquer, la mine à l'incompréhension.

"Mais...
- Ça va aller." Avait fait le Dandy, prenant un peu de distance d'avec le punk sans pour autant le lâcher. Celui la fronça les sourcils, moyennement convaincu. "Vraiment. Tant que je garde le dos bien droit et que j’y vais doucement, ça devrait le faire."

Sous le regard circonspect de l'anarchiste, le Dandy avait mis en pratique ses dires, clairement en vu de prouver qu'il disait vrai, lâchant pour de bon son appui et se tenant en effet debout tout seul.

"Tu vois? Je vais y arriver."

L'Hérissé le fixait avec un air visiblement très peu convaincu. Plissant même les yeux et levant un sourcil pour mieux marquer ses doutes. On lisait en lui comme dans un livre ouvert.

"Mmm, t'es sûr ..?"

Le sourire forcé à fade du récolteur n'avait pas été des plus convainquant, il fallait dire. Avec cette lumière qui les surexposait, impossible de faire semblant. Ou alors il fallait être un excellent acteur, ce qu'apparemment Skunk n'était pas.
Peut être n'était-il pas le meilleur en comédie, mais par contre, lorsqu'il s'agissait de déclamer du blabla, il se posait la et il allait le prouver! Déjà, il semblait que le plus jeune s'était décidé à noyer le métisse sous un torrent d'informations et de contre-arguments à l'idée de simplement abandonner la mission.

"Et de toute façon..." Commença t-il. "Même si on essayait de sortir de là, je ne crois pas que cet endroit nous laisserait faire. Regarde." Il désigna les conduits, et Apache jeta un bref regard dans leurs direction, revenant illico au récolteur, sujet qui le préoccupait bien plus, en l'occurence. "Il y a des pancartes. Une ventilation, vu la fraicheur de l’air. Et toute cette lumière? Tu ne trouves pas ça un peu trop opportun?" Les sourcils du punk se relevèrent vaguement, l'air de dire "Et donc ?"
Skunk répondit à la question silencieuse, étalant son baratin qui sonnait... Ma foi logique, en fait. Mais qui l'arrangeait bien, surtout.
"Cette Machine a été conçue, ou au moins aménagée pour accueillir des humains. Ça ne peut pas être un hasard : quelqu’un, ou quelque chose, nous veut ici. Clumsy m’a vaguement parlé d’une histoire d’esprit, qui propulserait la bête et qui se nourrirait de... de la jeunesse des visiteurs. Je ne sais pas trop ce que cela signifie vraiment, mais je crains que sortir d’ici soit bien plus compliqué que d’y entrer.
- Mouais... Ouais." Pas si emballé par les explications qui sonnaient tarabiscotées aux oreilles du punk, mais il devait bien avouer que sa déduction ne semblait pas totalement dénuée de sens.
"Admettons.
- Le chemin le plus court vers la sortie, c’est peut-être de jouer le jeu. Au moins au début."

Apache fit une moue de travers un chouilla boudeuse et surtout circonspecte, jetant un autre regard vers les fameux conduits qui avaient l'air de les attendre. Puis, il tourna de nouveau la tête vers ce qui était sensé être la gueule fermée, alias l'entrée de la Machine.
Un temps de rien pendant lequel clairement, l'adolescent réfléchissait.
Au bout d'un moment, il lacha un soupire qui sonnait résigné.

"Oook... Ok T'as gagné." Qu'il fit. Pourquoi est ce que Skunk avait été jarté de chez les diplomates, déjà ? "Mais si ça va pas mieux et qu'on trouve le moyen de sortir de la avant de trouver ce putain de sucre dont j'ai rien à foutre, on se casse." Le ton était péremptoire, et le regard noir de l'Apache ne laissait pas vraiment de place à la discussion.
Ce n'était pas tant que le chasseur tenait immensément au Dandy. Il ne le connaissait qu'à peine et avait déjà manqué de lui mettre une mandale. C'était surtout qu'Apache haïssait la hiérarchie au dessus de tout, et qu'il avait toujours considéré qu'aucune vie ne valait un quelconque ravitaillement ou caprice du roi vert.
Qu'ils aillent le chercher eux même, leur sucre pourri ! Plutôt que d'envoyer des gosses tout seul se frapper tout les dangers.
Rien que la manière dont été organisées ces foutues missions prouvait à quel point ils en avaient rien à secouer de savoir si les gamins désignés allaient revenir, et dans quel état.
Quelle blague, putain...
Et après, ces cons de soigneurs rafistolaient, s'imaginaient être des héros alors qu'en fait ils réparaient juste les enfants pour qu'ils puissent mieux repartir se faire massacrer.

Dégueulasse.

Un soupire de plus.
"Bon bein... Allons y, alors." Le punk replaça correctement le sac sur son dos, se retournant vers les conduits pour cette fois se diriger vers eux.

Leurs pas cling-clonguaient dans l'endroit, le son métallique réverbérant sur les parois de la bestiole et très vite, ils arrivèrent face aux fameux embranchements.
Il y en avait de toute les tailles et de toute les formes, mais trois passages prédominaient sur les autres, bien plus grands et concentrés au centre, bien en vu. Au dessus de chaque entrées, un panneau indicateur.

"Le Canton Poupon, La Province Acidulée, le Garage Métallique." Avait lu Apache à haute de voix et sans difficulté. Il faisait parti des rares gosses qui avaient appris et se souvenaient de comment lire.

Le choix de leur destination aurait pu sembler évident. Pourtant, le révolté hésita, jetant des regards tout autour, les yeux analytiques et la réflexion lui peignant la bouille.
Il cherchait voir s'il n'y avait pas un autre conduit, plus discret, qui pourrait les rapprocher d'une porte de sortie. Genre... "Évacuation" ou une connerie du genre.

Quand Apache lui demande s’il est bien sûr de s’en sortir avec son dos flingué, Skunk regarde ailleurs. Non, évidemment qu’il n’est pas sûr. Le Dandy n’a pas menti, il y a bien une position que ses lombaires bloquées semblent accepter sans le torturer en représailles ; mais l’adolescent sent qu’il va payer cher le moindre faux mouvement, la plus petite secousse. Rien que l’effort qu’il vient de faire pour se lever l’a laissé livide et nauséeux, alors que peut-il raisonnablement attendre s’ils doivent sauter, ramper, ou même seulement courir?...

Cependant, comme Skunk l’explique bien trop longuement à son infortuné interlocuteur, ils n’ont pas l’air d’avoir beaucoup d’options : la gueule de la Machine s’est scellée derrière eux, et bien que le Dandy n’ait pas vraiment cherché de mécanisme susceptible de la rouvrir, il a l’intuition qu’ils n’en trouveront aucun. Mission ou non, il est convaincu que leur meilleur moyen de sortir doit se trouver quelque part dans le reste de la bête. Elle n’est pas si immense, en plus, elle ne devrait pas leur prendre trop longtemps à explorer, n’est-ce pas?

Heureusement, bien que très réticent, Apache semble arriver à la même conclusion, qu’il sanctionne d’un soupir :

“Oook... Ok. T'as gagné.”

Skunk esquisse un sourire amer : en temps normal c’est son petit plaisir de remporter une argumentation, mais sur ce coup-là, bizarrement, il n’est pas spécialement ravi d’avoir raison.

“Mais si ça va pas mieux et qu'on trouve le moyen de sortir de là avant de trouver ce putain de sucre dont j'ai rien à foutre, on se casse.”

Cela pourrait passer pour une manifestation supplémentaire de la mauvaise volonté du punk - ce n’est pas comme s’il s’était privé de râler en long, en large et en travers sur ces “saloperies de missions” - mais Apache a l’air assez en colère pour que même Skunk comprenne que cette fois il est sérieux. Mal à l’aise, le Récolteur hoche la tête, en baissant les yeux.

Il espère vraiment qu’ils vont trouver le sucre avant la sortie. Il n’a pas envie de penser au cas contraire.

Avec un autre soupir, l’Hérissé rajuste le sac à dos sur ses épaules et prend la direction du fond de la vaste zone. Skunk lui emboîte le pas avec précautions, satisfait de constater qu’il parvient à marcher, mais toujours inquiet de sentir ses muscles aussi atrocement raides, prêts à hurler à la moindre contrariété. Machinalement, le Dandy se rassure en rajustant sa coiffure et en remettant sa tenue en place de quelques gestes experts ; lorsqu’il rentre sa chemise dans son pantalon, il en profite pour passer discrètement la main sur le bas de son dos, tressaille et retient une nouvelle grimace de douleur et d’appréhension.

Oh, c’est mal barré. C’est très mal barré.

Mais Skunk s’efforce de faire bonne figure. Il ne tient pas à passer pour un fragile, et surtout pas alors que l’inquiétude d’Apache devient de plus en plus nettement de la contrariété. Certes, dans le fond, le punk ne peut s’en prendre qu’à lui-même : s’il n’avait pas fait l’andouille, il serait tranquillement dehors en train de faire la sieste. Mais le Récolteur sait très bien que certaines personnes ont vite fait de décharger leur frustration et leur colère sur les autres, même ceux qui n’y sont pour rien (qui a dit que ses parents ne lui ont rien appris?). Se plaindre risque juste de le transformer en paratonnerre ; il ne s’y risquera pas.

Les deux garçons progressent sans mal à travers les quelques débris qui reposent au fond de la bouche de la Machine, puis ils s’arrêtent devant le mur de conduits. Skunk lève les yeux pour déchiffrer les pancartes accrochées au-dessus des trois plus gros tuyaux et se fait la dérangeante réflexion qu’elles ont l’air écrites par des enfants, avec des lettres irrégulières et des R à l’envers. Un cadeau de la part de Perdus qui les auraient précédés? Ou une imitation destinée à endormir leur méfiance?...

Skunk est tellement préoccupé qu’il sursaute presque quand Apache se met à lire les panneaux à voix haute. Surpris, le Récolteur cligne des yeux, avant de laisser échapper un drôle de sourire, agréablement surpris : il ne s’attendait pas à ce que le punk sache lire. Jugement hâtif, dont la nature problématique échappe malheureusement au Dandy. Mais à la décharge de ce dernier, les livres ne sont vraiment pas à la mode dans le monde anti-scolaire de Peter Pan et nombreux sont les Perdus qui ont oublié comment lire, s’ils l’ont jamais su. Que Apache en soit capable fait vraiment, bêtement plaisir à Skunk.

Il est bruyant, illogique et casse-couille, ce punk, mais finalement, il n’est peut-être pas si con.

Hésitant, le Dandy s’avance vers le conduit du milieu. Il a l’air assez grand pour que les deux adolescents puissent s’y tenir debouts sans avoir à se pencher (gloria) et il est éclairé, mais un virage précoce empêche de voir où il mène.

“Bon. Eh bien, le chemin a l’air assez évident. Encore une fois.”

Il se mordille un peu la lèvre et jette un coup d’oeil à Apache : le Dandy n’est pas très serein d’entraîner le punk plus loin. Parce qu'il est imprévisible, oui, mais aussi parce que ce couillon ne voulait vraiment pas venir, à la base, et qu'apparemment il a accepté par pur altruisme. Maintenant, non seulement il est coincé, mais en plus voilà qu'il se retrouve à porter le sac de son idiot de coéquipier blessé. Gêné, Skunk tente :

“Je vais peut-être... Je vais jeter un oeil. Si c’est un piège, inutile qu’on s’y retrouve pris tous les deux.”

Il dit cela avec un calme étrange. Difficile de deviner si c’est juste l’inconscience d’un adolescent, ou une résignation beaucoup plus pernicieuse.

“Et comme ça, tu peux vérifier les autres, voir si tu repères une sortie?”

Les yeux noirs de l'Apache passaient d'une ouverture à une autre, d'un panneau indicateur à un autre, décryptant sans mal les inscriptions malgré l'écriture tordue gamine, les fautes d'orthographe abusives ça et la.
Il avait dessiné sur la mine une moue pensive, à la réflexion.

"Bon. Eh bien, le chemin a l’air assez évident. Encore une fois.
- Ouais." Il acquiesça sans trop y réfléchir, l'air ailleurs, toujours concentré sur les multiples propositions qu'ils avaient devant eux.
Malgré le nombre impressionnant de tunnels plus ou moins grands qui se présentaient, aucun d'entre eux ne développaient un sentiment de confiance chez l'anarchiste en dehors des trois principaux.
Beaucoup d'entre eux étaient tout simplement d'office trop étroits pour donner envie de s'y fourrer, même quand on était petit. Certains d'entre eux crachaient même plus ou moins régulièrement quelques nuages de fumée blanche ou colorée. Si c'était pour crever coincé étouffé dans un conduit, c'était pas la peine.

"Ouais ouais ouais..." Il répéta, agitant cette fois la tête à la positive, la bouche pincée. C'était comme si cette foutue mission les appelait.
Peut être que Skunk avait raison.
Que cet endroit était plus qu'une Machine débile. Peut être que quelque chose en son sein avait des projets bien particuliers.

"Je vais peut-être... Je vais jeter un œil. Si c’est un piège, inutile qu’on s’y retrouve pris tous les deux.
- Mmm...
- Et comme ça, tu peux vérifier les autres, voir si tu repères une sortie?"
Le chasseur prit une longue inspiration, comme pour clore sa réflexion intérieure, et puis, son attention revint enfin à Skunk. Il en avait terminé de chercher une solution autre que passer par le chemin tout désigné pour venir à bout de la mission qu'on leur avait assigné.
Être anti-autoritaire, fallait pas croire, c'était du taff ! Toute cette énergie physique et mentale à chercher comment faire pour ne rien foutre !
C'était loin d'être rien.

"Nan. Mauvaise idée." Il décréta finalement sur un ton docte.
Par ce que même s'il avait l'air complètement ailleurs, Apache avait bien entendu ce qu'avait dit le Dandy. "On se sépare pas." La base ça ! Ce récolteur n'avait donc jamais maté ou entendu une seule histoire d'horreur ?
Vu sa dégaine de premier de la classe, c'était possible.
Normal donc qu'il ai ce reflex de victime du monstre ou tueur présumé.
Le punk eut un reniflement tout en ressortant le couteau qu'il avait fauché chez les récolteurs avant de débarquer dans cette aventure.

"J'passe devant ! Tu couvre mes arrières !" Clairement, il prenait la place de celui qui disait quoi faire. Et avec l'impératif qui allait avec. Sans même attendre l'avis de Skunk, il s'était avancé dans le conduit qui était sensé mener vers La Province Acidulée juste après avoir craché par terre le surplus de sang qui lui peignait la langue et les dents.
Le plus jeune était blessé, alors ce n'était certainement pas lui qui allait se mettre en première ligne face au potentiel danger. Et sans arme avec ça !
Non mais et puis quoi encore.

Le conduit tout rond n'était pas bien grand, mais assez pour que les deux adolescents courts sur pattes puissent se tenir debout. De justesse, cependant, les crêtes de l'Apache caresseraient la ferraille juste au dessus de leurs têtes à mesure qu'ils avanceraient.

Comme Apache met un certain temps à réagir à la proposition de Skunk, ce dernier s’approche du tunnel du milieu, en essayant de ne pas laisser voir son appréhension. Si sa petite théorie sur le côté accueillant de la Machine est exacte, rien de bien dangereux ne devrait les guetter dans les tuyaux. Mais émettre des hypothèses, ce n’est pas la même chose que les tester grandeur nature, alors qu’il a le dos bloqué et que c’est potentiellement leur survie qui est en jeu.

Hésitant, Skunk s’arrête juste sous la pancarte qui proclame “LA PЯOVEINCE ASSIDULEÉ” (oui, il a grimacé de douleur rien qu’à la lecture). Il pose la main sur les plaques rivetées qui forment la paroi du tunnel. Cette dernière vibre doucement, comme tout le reste de la Machine, mais elle n’est pas particulièrement chaude et elle semble lisse et propre, sans traces de brûlures ou d’impact - et sans aucune tâche de sang visible. Skunk déglutit tant bien que mal et avance d'un pas dans le tuyau, quand la voix d’Apache le fait à nouveau tressaillir :

“Nan. Mauvaise idée.”

“Mais je peux...”

“On se sépare pas.”

L’expression fugitivement vexée du Dandy (comment cela son idée est mauvaise?) redevient vite une considération un peu embarrassée. Il pourrait insister, soutenir sa proposition par des arguments froids mais pragmatiques : il est blessé, donc le plus encombrant des deux, donc le plus dispensable. Il est aussi celui à cause de qui toute cette connerie de mission leur est tombée dessus et il rechigne à ce que Apache prenne des risques à sa place.

Mais d’un autre côté, il peut aussi entendre qu’ils ont sans doute plus de chances de se sortir de là ensemble que chacun de son côté, que le Chasseur est de toute évidence un meilleur combattant que lui et qu’il s’en sortira mieux face à un adversaire imprévu.

Et puis, au-delà de la réflexion logique, même si Skunk ne l’avouera pas sous la torture... Au fond, il n’a vraiment pas très envie d’aller là-dedans tout seul.

Alors oui, quand Apache sort son couteau et prend la tête d’un air décidé, le Dandy s’écarte et le laisse passer sans rien dire. C’est à peine s’il laisse échapper un rictus dégoûté quand le punk crache un mollard ensanglanté à l’entrée du tunnel, d’un air viril et absolument dégueulasse.

“J'passe devant ! Tu couvres mes arrières !”

Skunk écarte légèrement ses mains, très vides et inutiles, avant de lever les yeux au ciel et de marmonner :

“Avec quoi veux-tu que je te couvre, John McClane?...”

Mais sa protestation n’est pas très virulente. Après un dernier regard aux alentours (il ne repère hélas aucun débris susceptible de servir d’arme), il emboîte le pas à Apache.

Skunk avance doucement, un peu mal à l’aise de sentir le plafond si proche du sommet de son crâne - devant lui, les crêtes de l’Hérissé frôlent le métal. Et d’un coup, alors qu’il repense à la couleur de ce que le punk a craché, il réalise qu’il a encore raté un aspect pourtant indispensable de la conversation :

“Au fait, ce... Est-ce que ça va, tes dents? Est-ce que tu saignes encore?”

Son malaise est perceptible. C’est qu’il n’est pas très doué pour exprimer son inquiétude, le Dandy. Et qu’il a une conscience soudain très vive du fait que non seulement il n’a même pas pensé à poser la question plus tôt, mais qu'en plus Apache lui a tout de suite demandé comment il allait, lui. Décidément un peu minable.

"Avec quoi veux-tu que je te couvre, John McClane?..."
Justement, patate, t'es pas armé, et à priori, aucun danger ne viendra de derrière vu que derrière, il n'y avait que l'entrée de la Machine.
Apache aurait pu lui répondre ça, ouais, mais à la place, il se contenta de froncer les sourcils, soufflant un "C'est qui John McClane ?" avec une bouille pleine de questionnements.
Ce nom ne lui disait vraiment rien.
C'était que non seulement le punk s'était envolé pour NeverLand quelques années avant la sortie du film, mais en plus, sans doute qu'il ne serait jamais aller le voir.
A son époque et dans ses cercles, on était pas du genre à mater des blockbusters américains avec des futurs chauves qui sauvaient le monde de la destruction.

La destruction, eux, c'était plus ou moins ce dont ils rêvaient.

Les deux adolescents s’avançaient donc dans le gros tuyaux, tranquillement mais surement, l'iroquois en tête, couteau dégainé à la main pour si jamais quelque chose venait leur foncer dessus d'en face, mais pas si angoissé à cette idée. Quelque chose lui disait que rien de trop méchant ne leur tomberait dessus avant destination sucrée.

Au bout d'un petit temps, derrière lui, une voix pétrie de malaise se fit entendre.

"Au fait, ce... Est-ce que ça va, tes dents? Est-ce que tu saignes encore?
- Mm ?" Apache avait légèrement tourné la tête, par reflex, sans pour autant jeter un regard au récolteur. "Nan ça va t'inquiète, c'est rien." Ca pouvait sonner comme une bravade, mais en fait c'était relativement vrai. "J'en ai vu d'autres, et des pires." Étrange tentative de rassurer. Il se la jouait dur à cuire, le punk, même si encore une fois, en effet, il en avait vu des vertes et des pas mures !
Tout en parlant, ils marchaient, et autour d'eux, la ferraille semblait se transformer, ou plutôt, c'était comme si elle se recouvrait de quelque chose.
Ca craquait sous les chaussures, c'était blanc, mais ce n'était pas froid et ça ne glissait pas.
Par curiosité, l'Hérissé avait passé un doigt sur l'une des parois ronde, et puis, il avait reniflé le truc pour ensuite le porter a sa bouche, littéralement. Il n'avait pas peur.

"Du sucre !" Il s'exclama. Pour autant il continua d'avancer. Il lui semblait qu'il n'y en avait pas assez dans le conduit pour remplir grand chose. Le sucre s'y était cristallisé. Ce serait vraiment une galère sans fin que de vouloir le récupérer. il faudrait gratter... Et encore. Mais cela donna une bouffée d'optimisme au chasseur. "Super, ça devrait pas être trop compliqué d'en trouver un tas quelque-part, en récupérer assez pour la mission et se tirer dès qu'on en aura l'occasion." Et puis, après quelques pas supplémentaires ; "Hey, t'entend ça ?"

C'était un genre de grondement perpétuel qui leur parvenait, clairement qui ricochait dans le conduit.
Pas un roulement. Ni quelque chose qui semblait s'avancer vers eux, non.
Ca ne sonnait pas intimidant ni inquiétant.
Ils tournèrent au niveau d'un coude du conduit, et soudain furent éclairé par une lueur qui vacillait.
Cela tombait bien car plus ils s'était enfoncés dans le tuyau, plus la lumière, naturellement, s'était tarie, les plongeant graduellement dans le noir.
Fini la nuit !
Les deux se retrouvaient désormais face à...

"Une cascade ..!" Un sourire s'était dessiné sur la bouille du punk, clairement émerveillé.
Car c'était bien une cascade, oui, c'était d'elle que venait le fameux grondement ! Mais ce n'était pas n'importe quelle cascade !

"... De Chocolat !!!" Le français avait tendu la main, celle qu'il avait de libre, et avait ramené le liquide à ses lèvres. Décidément, Apache avait décidé de tout gouter sur son chemin. "Putain il est trop bon en plus !" Il s'était écarté pour laisser de la place à Skunk, qu'il puisse bien voir lui aussi ! "Vas y, goute !"

“C'est qui John McClane ?”

Skunk écarquille les yeux, l’air sobrement scandalisé.

“Tu n’as jamais vu les Die Hard? Deux films d’action, sortis en 1988 et 1990, avec Bruce Willis dans le rôle principal? Une histoire de prise d’otages dans un building, puis dans un aéroport? Ils sont assez stupidement fun - beaucoup de sang et d’explosions. Le méchant du premier est plutôt classe, en plus, même si la fin ne lui rend pas honneur ; je comprends que les scénaristes aient voulu condamner son arrogance, mais il était tout de même beaucoup trop intelligent pour...”

Il s’interrompt de manière abrupte, comme si quelqu’un venait de lui flanquer une baffe derrière la tête. Son expression, qui s’est un peu détendue au fur et à mesure qu’il parlait, redevient instantanément son habituel masque fermé et méfiant. Il jette un coup d’oeil à Apache, inquiet de sa réaction, avant de reprendre d’une voix beaucoup moins assurée :

“John McClane, c’est le nom du personnage principal. Un peu une caricature de mec costaud, déterminé mais pas très malin, qui se retrouve dans des états pas possibles parce qu’il n’a pas...”

Skunk s’arrête encore, puis émet un soupir qui ressemble à une reddition : qu’est-ce qu’il y a de pire qu’une vanne qui tombe à plat? Essayer d’expliquer une vanne qui est tombée à plat. Bonus si ça prend plus d’une minute et s’il y a un risque de vexer l’autre sans le faire exprès en explicitant le fait qu'on l'a comparé à un gros bourrin un peu con.

“... C’était juste une référence à un film, quoi.”

Le Dandy laisse une contracture remonter le long de l’une de ses épaules, grimace un peu quand elle tire sur les hématomes de son dos. Puis il porte les mains à ses bras, pour les frotter doucement à travers sa chemise : il fait toujours un peu frais dans le conduit, mais sa veste est dans son sac et il n’ose pas arrêter Apache pour un tel détail. Déjà qu’il ne se remet pas de voir le punk porter son barda à sa place...

Et c’est presque pire quand le Chasseur rassure Skunk sur l’état de ses dents. Tant mieux si ce n’est rien de grave, vraiment - ce serait dommage d’abîmer cette grande gueule, n’est-ce pas? Mais ce petit “j’en ai vu d’autres, et des pires” ne fait que conforter le Dandy dans son idée que lui-même s’est bien trop plaint et que son improbable compagnon doit déjà le prendre pour un idiot de touriste. Inutile d’en rajouter.

Skunk se contente donc de suivre Apache en silence, les yeux rivés au sol, ignorant au mieux son dos de plus en plus raide. Malgré l’éclairage qui faiblit, il remarque vite que le métal se couvre d’un dépôt blanc, qui crisse sous leurs semelles. Le Récolteur fronce les sourcils. Il passe une main sur la paroi pour y prélever quelques cristaux, les rapproche de son visage pour les observer de plus près... et manque de s’étrangler en voyant Apache goûter tranquillement le produit mystérieux.

“Mais t’es complètement...”

“Du sucre !”

“... Du sucre ?”

Skunk porte ses doigts à son nez, ne sent rien. Méfiant, il préfère ne pas suivre l’exemple du punk et fait tomber la poudre blanche en se tapotant les mains. Mais il doit reconnaitre que l’hypothèse du poison n’a pas beaucoup de sens. Cela ne va pas avec l’aménagement relativement hospitalier des lieux, encore moins avec leur mission : ils ne sont pas les premiers à devoir ramener des trucs à bouffer de cette fichue Machine, et si certaines choses n’y étaient pas comestibles, voire ouvertement néfastes, Clumsy le lui aurait certainement dit.

Pour la première fois depuis que les effets de l’alcool se sont dissipés, Skunk sent l’étau qui enserre sa poitrine s’ouvrir un peu. Il n’est pas assez optimiste pour penser qu’ils sont tirés d’affaire (oh, de loin pas). Mais peut-être qu’ils ont une petite, juste une petite chance que tout ce bordel se termine pas trop mal.

C’est alors qu’un lointain grondement leur parvient, un son sourd et régulier que Skunk pourrait trouver inquiétant s’il n’était pas étrangement familier : il a déjà entendu ce bruit, et ce n’était pas quelque chose de menaçant. Intrigué, il continue de suivre Apache, constatant que la pénombre du conduit s’éclaircit à nouveau.

Et soudain, au détour d’un ultime virage, ils sont dehors.

Ou à l’intérieur. Question de point de vue.

Au minimum, la vue est spectaculaire. Le tuyau qu’ils ont emprunté débouche sur une plate-forme herbeuse, où mousse joyeusement ce qui ne peut être qu’un torrent de chocolat ; le liquide, d’un somptueux brun aux reflets dorés, tombe en cascade depuis un surplomb invisible au-dessus de leurs têtes, serpente au milieu d’une pelouse au vert trop vif (Skunk réalise avec un temps de retard que c’est de la pâte d’amande), avant de dévaler une seconde fois dans le vide. En contrebas, l'improbable rivière se perd dans une forêt hétéroclite de sucres d’orges, de barbes à papa et de sucettes géantes, puis dans une immense contrée multicolore qui s’étend bien, bien au-delà de ce qu’on aurait pu attendre vu la taille extérieure de la Machine.

Trop stupéfait et émerveillé pour réaliser que leur exploration prend des proportions problématiques, Skunk s’approche du bord de la plate-forme. Sous la pâte d’amande, elle s’avère constituée d’énormes blocs de gélatine, entassés assez régulièrement pour former une paroi qui ressemble presque à un escalier. En contrebas, la seconde chute de chocolat se déverse dans un petit lac, dont les remous mêlés de lait forment de grandes spirales brunes et blanches. Ebahi, le Dandy sourit presque.

“Putain il est trop bon en plus !”

Skunk se retourne et découvre que le punk a, bien sûr, directement foutu la main dans la cascade qui se déverse à côté de leur point d’arrivée. L’Hérissé se lèche les doigts avec une délectation visible, avant d’adresser un grand sourire chocolaté au Récolteur :

“Vas-y, goûte !”

Le Dandy fronce les sourcils, préoccupé.

“Je... ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée. T’as jamais lu Hansel et Gretel ?”

Il examine le ruisseau d’un air suspicieux, qui ne dissimule cependant pas une certaine envie ; cela fait longtemps que Skunk n'a pas mangé de chocolat, il n’y en a pas tant que cela au Grand Arbre. Et encore une fois, si c'était dangereux, Clumsy l’aurait prévenu, n’est-ce pas ?

Hésitant, le Dandy revient vers Apache, sans pour autant s’approcher de la cascade. Bien qu’il soit surpris que le beau liquide sombre ne lui évoque pas de la boue - l’odeur, sans doute ; le parfum de cacao est à faire tourner la tête - il n’a pas envie de s’exposer aux éclaboussures.

Et puis, même s’il n’y pense qu’en sourdine, l'adolescent ne souhaite pas donner l’occasion à l'Hérissé de le pousser dans le torrent. C’est le genre de sale blague auquel il a appris à s’attendre, même venant de ceux qui sont sympas avec lui. Surtout venant de ceux qui sont sympas avec lui, en fait.

Car si Apache lui a bien (en apparence) pardonné une grosse boulette, Skunk n'a pas oublié que le punk a aussi failli lui coller un pain, il n'y a vraiment pas si longtemps que cela. Une confiance totale parait très hors de propos.

“... De toute façon, je n’ai pas de cuillère dans mes affaires.”

Die Hard ?
Non, il n'avait jamais vu Die Hard. Ca ne lui disait franchement strictement rien, mais il écoutait tout de même l'explication ma foi... Jonchée de détails et visiblement passionnée que lui donna Skunk.
Est ce qu'il était fan de cinéma ?
On aurait bien dit.
En tout cas, c'était ce que le punk se disait alors que l'autre se perdait en élucubrations, se stoppait, se rendant compte qu'il en faisait trop, sans pour autant que le punk ne lui ai fait aucune remarque.
C'était toujours comme ça avec les gens à fond dans leur truc !
Lui ça lui faisait pareil quand on parlait de comment zigouiller tout les chefs. Alors il pouvait comprendre.

"... C’était juste une référence à un film, quoi.
- Ah ok ! J'l'ai pas vu !" Fit l'anarchiste sans se formaliser. Ou alors il ne s'en souvenait pas ? Non il ne l'avait jamais vu, mais la mémoire sur l'ile de Jamais étant ce qu'elle était, difficile de lui faire confiance.
En attendant, celle du récolteur avait l'air de bien tenir le coup ! Il avait sortit de ces détails ! C'était impressionnant ! Sans doute que ça ne durerait pas.
C'était par ce que son arrivée était toute récente, c'était sur.

Et puis, il y avait eu la cascade !
La fameuse et fabuleuse cascade de chocolat ! Et derrière elle, c'était tout un monde sucré féérique qui s'était dévoilé !
C'était magnifique !
De quoi faire briller les yeux et saliver de plaisir rien qu'a regarder !
Apache avait pris un peu d'avance, envoyant directement les mains à la cascade pour se régaler ! Et sans surprise, ce fut un délice !
Finalement, faire cette mission avait eu au moins un avantage... Ils allaient pouvoir s'envoyer plein de sucrerie et de chocolat tranquille ! Et sans limitation ! Le rêve !
Ultimate Mukbang !

"Vas-y, goûte !
-Je... ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée. T’as jamais lu Hansel et Gretel ?
- OoOoh allez ! Tu déconne !" Le punk avait fait ça sur le ton de la rigolade, levant les yeux au ciel. Enfin... Ce qui ressemblait en tout cas à s'y méprendre à un ciel ! Alors que son regard s'accrochait par hasard aux nuages qui semblaient tout fait de barbapapas colorées, le chasseur se rendit soudain compte de l'immensité de l'endroit, et de l'étrangeté qui accompagnait cette constatation.
Vu de l’extérieur, La Machine n'avait pas du tout l'air aussi... Énorme ?

"... De toute façon, je n’ai pas de cuillère dans mes affaires."
La remarque qui sonnait tout à fait bizarre aux oreilles du punk l'arracha de sa contemplation, son regard naturellement noir revenant automatiquement à son compagnon, l'air incrédule.
Il cligna plusieurs fois des yeux, prenant une inspiration pour dire quelque chose... Mais rien ne vint.

Une cuillère ?

Il avait vraiment parlé d'une cuillère ?

Apache était perdu entre l'étrangeté totale de la réflexion et l'idée que, à son avis, utiliser une cuillère pour attraper du chocolat qui tombait à la façon d'une cascade ne devait vraiment pas être simple.
C'était sur que ça ricocherait dans le creux de l'ustensile et que ça ferait qu'en foutre partout sans jamais le remplir.

"Faudrait plutôt une tasse..." Il se surprit lui même à dire, un peu paumé, mais il secoua la tête. "Bref euh..." Oui. Donc. Il était peut être temps d'avancer, non ?
"C'est putain d'immense cet endroit... Je m'attendais pas trop à ça." Il admit, revenant au sujet initial qui était : La mission.
Après tout, le Dandy était blessé, et même si profiter de l'endroit ne lui semblait pas être une mauvaise idée en soi, trainer dix siècles pour ça c'était pas non plus la solution.

"Ca va être chaud de trouver la sortie." En parlant, il se rendit compte que même l'air semblait chargé en sucre. Il pouvait en sentir le gout qui se déposait sur sa langue à chaque inspiration.
S'ils se paumaient la dedans pour de toujours, est ce qu'ils allaient finir tout momifié comme des sucres d'orge ?
En tout cas ils allaient pas mourir de faim.

Et puis, soudain, un peu plus loin derrière Skunk, l'iroquois repéra un quelque chose d’intéressant !

"Hey regarde !" Il lança d'ailleurs, pointant du doigt un panneau en forme de flèche.
Finalement, peut être que la Machine avait tout prévu ! Peut être qu'elle n'avait pas elle même envie de digérer de l'enfant perdu à la tonne et que du coup elle laissait une chance à ceux qui s'aventuraient dans ses entrailles.
En s'approchant de l'indication qui était toute faite de réglisse (Apache avait fait une grimace. La réglisse c'était dégueulasse ! Ca c'était pour être sur que personne ne croquerait dans le panneau ! Bien joué !) on pouvait voir que celle ci indiquait comme un escalier qui longeait ce qui ressemblait à un mur escarpé, mais en fait tout fait de guimauve.

Les yeux pers du Dandy traînent un peu trop longtemps sur la cascade, irrésistiblement attirés par les remous mousseux. Ce couillon de punk a raison, Skunk déconne un peu, sur ce coup-là. D’autant plus qu’il sait très bien pourquoi l’épais liquide lui fait tellement envie, que cela ne se limite pas à une question de gourmandise et de rareté : c’est un souvenir que l’Oubli ne lui a pas encore pris.

Un chocolat chaud, en rentrant de l’école. Cacao d’abord et lait ensuite, mélangé lentement pour ne pas faire de grumeaux, parce qu’il a horreur de ça. Il n’a jamais su pourquoi sa mère faisait attention à cette “lubie” là, alors qu’elle ne supportait aucune des autres. Aujourd’hui, il a compris que c’était sans doute juste un détail sans importance, qu’elle ne devait tout simplement pas aimer les grumeaux, elle non plus. Mais quand il était plus petit, plus naïf, il a parfois eu l’impression que cela voulait dire quelque chose. Et cette sensation-là, même si elle était certainement fausse, il y tient.

Quel dommage qu’il n’ait effectivement pas de cuillère. Ou peut-être même seulement de quoi se laver les mains, avant d’y tremper un doigt ; cela resterait un effort, mais...

“Faudrait plutôt une tasse...”

Skunk tourne la tête vers Apache en fronçant fugitivement les sourcils (il se fout de ma gueule), mais l’expression pensive et un peu déstabilisée du punk dissipe vite l’hostilité de son cadet, qui une fois de plus considère son compagnon d’infortune avec un plaisir prudent.

Clairement, le Français n’est pas parfait ; sans même parler du coup de poing qui a failli partir plus tôt, Skunk a encore un peu en travers la mauvaise blague que Apache lui a faite à l’Arbre, quand le Chasseur lui a fait croire qu’il ne l’aiderait qu’au prix d’une compensation bien humiliante. Mais dans l’ensemble, le Dandy doit avouer que Apache est plus...

Non, “patient” parait trop optimiste. Mais disons que l’Hérissé s’agace nettement moins vite des conneries de Skunk que la plupart des gosses que ce dernier a pu rencontrer dans sa vie. C’est un peu déstabilisant pour le jeune Anglais, parce qu’il ne comprend pas vraiment d’où sort cette étonnante tolérance, encore moins venant d’un foutu punk. Mais ce n’en est pas moins... rafraîchissant.

Peut-être que Skunk prendra le temps de vraiment discuter avec ce drôle d’hurluberlu à pics, à l’occasion. S’ils survivent à tout ce bordel.

“C'est putain d'immense cet endroit... Je m'attendais pas trop à ça.”

“Moi non plus.”

Le Dandy soupire, comme si l’aveu lui coûtait un peu, avant de jeter un regard préoccupé à la contrée qui s’étend devant eux - magnifique et beaucoup, beaucoup plus vaste que prévu. Plus pour lui-même que pour Apache, il ajoute en marmonnant :

“ “C’est plus grand à l’intérieur”... La bonne blague.”

“Ça va être chaud de trouver la sortie.”

Skunk émet un petit claquement de langue réprobateur à l’entente de cette évidence (“le retour de Captain Obvious”), mais par miracle, il arrive à ne pas commenter.

“Peut-être qu’on va trouver d’autres panneaux, comme ceux de l’ent-”

“Hey regarde !”

Il se retourne, pour découvrir la grande flèche de réglisse que lui désigne Apache. Skunk cligne des yeux un peu trop vite et ses sourcils se froncent à nouveau :

“... Depuis quand est-ce que c’est là, ça ?”

Comment est-ce qu’il a pu rater un tel panneau ? Est-ce qu’il était déjà planté à cet endroit, l’instant d’avant ? Et l’escalier qu’il désigne, alors ? Skunk n’a pas l’impression de l’avoir vu, lorsqu’il s’est approché du bord de la plate-forme. Quelqu’un d’autre se dirait qu’il a dû le manquer, mais le Dandy est du genre légèrement obsédé par les détails, et il lui parait très improbable qu’il ait pu omettre un immense panneau et un putain d’escalier en guimauve, alors qu’en plus il cherchait précisément un moyen de descendre. Il n’a vraiment plus assez d’alcool dans le sang pour justifier ce genre de loupé.

Mal à l’aise, Skunk se rapproche de l’escalier et teste la première marche du bout du pied. La guimauve s’enfonce un peu sous son poids, un peu comme de la mousse à mémoire de forme, ce qui le fait grimacer : vu l’état de son dos, il se serait passé de jouer les équilibristes. D’autant plus que même si l’escalier est plutôt large, il longe une paroi de gélatine qui reste abrupte, accidentée et d’une hauteur considérable. Ça donne moyennement envie de louper une marche.

Skunk expire longuement, pour calmer son coeur qui bat un peu trop vite à son goût, et se répète ses propres arguments sur le fait que la Machine n’a pas l’air de vouloir les tuer. Pour l’instant.

“Bon. J’y vais en premier, histoire de tester.”

Cette fois, il ne laisse pas le temps à Apache de lui griller la priorité et entame aussitôt sa descente. Il pâlit dès la seconde marche, quand ses pieds peinent un peu à trouver leur appui sur l’escalier mou et que ses lombaires se tétanisent. Mais il ne s’arrête pas et poursuit lentement, une main appuyée sur la paroi. Quand il finit par parler, on note à peine la tension dans sa voix:

“Ça a l’air à peu près stable, mais méfie-toi du poids du sac, c’est quand même casse-gueule...”

"... Depuis quand est-ce que c’est là, ça ?"
En guise de réponse, Apache haussa les épaules, une moue inscrite sur le visage qui dépeignait bien son incapacité à expliquer quoi que ce soit, et peut être même un peu, au fond, que ça lui importait peu.
Lui, ce qu'il voulait, c'était se tirer dès qu'il pourrait. Et si cette foutue machine décidait de leur montrer le chemin, il n'allait pas s'en plaindre !
Puis c'était ça ou quoi ?
Sauter ?
Il n'aurait pas forcément été contre, en vrai. Faire un plongeons dans un lac de chocolat ! Mais quelque chose lui disait que le récolteur, lui, serait plus difficile à convaincre.

Peut être de ce fait, malgré la question d'avant qui émettait clairement des doutes, Skunk s'était rapproché de l'escalier, testant la première marche, son pied s’enfonçant dans la guimauve toute molle.

"Bon. J’y vais en premier, histoire de tester.
- Att..." Mais justement, l'autre n'attendit pas. Apparemment, il n'avait pas envie de se retrouver en arrière comme pour le tunnel, et avait donc directement entamé la descente sans plus de cérémonie.
Le punk eut un soupire, mais n'ajouta rien de plus qu'un "Ok ça marche." Vaguement trainant.
Il regarda donc le Dandy descendre un peu plus bas avec précaution, la main bien arrimée à la paroi de gélatine. Ça avait pas l'air d'être tout à fait de la tarte.

"Ça a l’air à peu près stable, mais méfie-toi du poids du sac, c’est quand même casse-gueule...
- D'acc !" L'iroquois remonta un coup le sac qu'il avait sur le dos, le replaçant le mieux possible, faisant légèrement brinquebaler ce qu'il contenait dans un cliquetis de verres et d'autres trucs. Et puis, à son tour, il s'engagea dans la descente.

Comme pour Skunk avant lui, il sentit ses pieds s'enfoncer un peu trop dans la guimauve des marches, cassant l'équilibre naturel que l'on pouvait avoir sur un sol bien solide.
C'était le genre de matière sur laquelle on pouvait facilement se tordre une cheville si on allait trop vite et qu'on faisait pas gaffe ! Alors l'anarchiste tacha d'y aller doucement et de rester attentif.
En effet, comme le Dandy l'avait prédit, le poids du sac n'aida pas beaucoup le chasseur, mais il se débrouilla tout de même, ne tanguant pas tant que ça. Juste de temps en temps.
Et ils avancèrent comme ça, à leur rythme, ne se pressant pas, descendant lentement mais surement le long escalier, perdant progressivement de la hauteur, se rapprochant des arbres sucettes et autres barbapapas cotonneuses aux couleurs sucrées acidulées pastels.
Plus le sol vert pâte d'amande se rapprochait, et plus Apache se détendait.
La pression redescendait en même temps qu'eux.

Et enfin, sans encombre, ils mirent pieds sur le plancher des vaches. Enfin... Ce qui s'y apparentait !
Heureux qu'ils ne se soient pas casser la gueule et brisé le cou, l'Hérissé en profita pour arracher un petit morceau de guimauve de l'escalier, la fourrant dans sa bouche pour se donner instantanément une dégaine de hamster qui stockait.

Un coup d’œil à ce qui les entourait. Un paysage digne des plus farfelus contes de fée. Des couleurs dans tout les sens. Un sol tout couvert de fausse herbe en pâte d'amande qui collait aux chaussures et d'un vert pétant pas naturel pour un franc, avec de ci de la des petites sucettes qui pointaient le bout de leurs nez comme des fleurs multicolores !
Des petites rochers en guimauve, et tout autour d'eux, d'immenses sucres d'orge surplombés de barbapapa en guise d'arbres !
Et le détail qui fit un chouilla froncer les sourcils du chasseur accompagné d'un petit sourire interrogateur.

"Il y a des oiseaux !" En effet, ça chantait. Ca gazouillait. La forêt était habitée ! Curieux de savoir à quoi pouvait bien ressembler les volatils, le chasseur plissa les yeux, le nez en l'air, cherchant à les repérer. Et soudain, un mouvement rapide et coloré le fit loucher et même reculer d'un pas !

"Oh merde !" Pas si effrayé ! Mais surpris quand même ! C'était à première vu un insecte ! Qui bourdonnait et lui volait autour de la tête, visiblement très intéressé par les cheveux ébouriffés du garçon.
"Maiis ! Fiche le camp la bestiole !" Le punk agita la main pour l'effrayer, sans un franc succès ! Juste de quoi l'éloigner assez pour mieux aviser de quoi il s'agissait !

Pas un insecte en fait !
C'était un colibri !
Son corps était composé d'un serpentin de bonbon tout enroulé, et sa tete semblait faite d'un gros dragibus piqué de deux carensacs dépareillés !
Ses ailes, vrombissantes, était difficilement définissables !

Quand ils arrivent en bas de ce fichu escalier mollasson et que les semelles de Skunk retrouvent enfin un sol un peu plus stable, l’adolescent ne peut retenir un long soupir soulagé. Il reste un instant appuyé contre la paroi de gélatine, pâle et un peu tremblant : leur petit numéro d’équilibriste n’a pas été des plus spectaculaires, mais rien que s’obliger à se tenir bien droit et gainé pour ne pas faire un faux pas sur ces marches trop molles, pour son dos tétanisé, c’était déjà trop demandé.

D’un geste qu’il espère discret, il essuie avec sa manche son front à nouveau humide de sueurs froides. La souffrance elle-même n’est pas si terrible, pourtant ; mais elle est sourde, profonde, elle noue son estomac et lui fait tourner la tête, et s’il sait ignorer la douleur, il n’est pas habitué à gérer ce genre de malaise. Heureusement cela semble se calmer dès qu’il arrête de bouger, mais cette petite expérience prouve hélas le peu de marge de manoeuvre dont il dispose. Pourvu qu’ils ne prennent pas trop de temps à sortir de cette galère.

Le Dandy inspire un grand coup, pour se reprendre autant qu’il le peut. Puis il se tourne vers Apache, juste à temps pour voir le punk prélever une poignée de guimauve sur l’escalier et la mettre en bouche d’un air satisfait. Une expression dignement dégoûtée passe sur le visage de Skunk:

“Sérieusement, Apache, on vient de marcher dessus...”

Bon d’accord, il exagère un peu : le Chasseur a pris son butin sur le bord de l’escalier, bien loin du chemin qu’ils ont emprunté (et qui reste bien visible) le long du mur. En vérité, Skunk est un peu envieux de voir l’autre Perdu se bâfrer joyeusement. Il persiste à penser que ce n’est pas très prudent, que ce joli monde coloré doit bien cacher quelque chose, avec ses panneaux si opportuns et ses chemins qui apparaissent quand on a le dos tourné. Mais la théorie du paysage empoisonné parait de moins en moins vraisemblable, et le Dandy sent bien qu’en fait il commence à se chercher des excuses, juste pour ne pas se sentir trop bête de ne pas oser manger avec les doigts.

"Il y a des oiseaux !"

Skunk suit la direction du regard d’Apache, réalisant à son tour qu’en effet, l’étrange forêt de friandises qui s’étend autour de la cascade de chocolat est emplie de jolis gazouillis. Le Récolteur sonde un instant le paysage du regard, avant d’esquisser un sourire :

“Pas que des oiseaux... Regarde, près de l’embouchure du lac.”

Il lève le bras aussi haut que son dos le lui permet, pour désigner une drôle de bête en train de se dorer la pilule au bord des flots de cacao. Cela ressemble beaucoup à un iguane, dont tout le corps semble fait de massepain et de marshmallows - ces derniers sont alignés le long de son dos, comme une colonne vertébrale, et forment une longue queue souple qui ondule dans l’herbe d’un vert radioactif. Comme s’il savait qu’on l'observe, l’animal relève doucement sa tête dont les écailles ressemblent à des dragibus, leur jette un regard circonspect, puis décide de reprendre sa sieste.

Le sourire de Skunk s’accentue jusqu’à devenir visible : oui bon, d’accord, c’est quand même un peu cool comme endroit.

"Oh merde !"

“Quoi, quoi ?!”

"Maiis ! Fiche le camp la bestiole !"

Le Dandy a tressailli au cri de surprise d'Apache, mais heureusement le punk n’a pas l’air en danger de mort immédiat : il est aux prises avec un minuscule oiseau-mouche, tout autant constitué de bonbons que l’iguane, qui tourne autour des crêtes de l'Hérissé d’un air intrigué. L’image est tellement improbable, après tout ce qu’il vient de leur arriver, que Skunk se surprend à laisser échapper un léger rire même pas vraiment cynique :

“Eh bien alors, tu m’as caché tes talents de princesse Disney ?”

A peine les mots ont-ils passé ses lèvres, cependant, que Skunk les regrette et que son sourire se dissipe : il ne l’a pas dit méchamment, mais il s’est pris des mandales pour moins que cela, et il ne tient pas à recommencer à s’engueuler avec Apache. Embarrassé, il examine les alentours, plus ou moins consciemment à la recherche d’un moyen de se rattraper et de prouver sa bonne foi.

“Attends, ne bouge pas.”

Skunk s’approche d’un buisson, dont le bois en réglisse supporte de gros flots cotonneux de barbe à papa d’un bleu vif. En se penchant au minimum, le Récolteur en arrache une branche d’une torsion, avant de revenir l’agiter doucement près du colibri inquisiteur. Cependant, loin d’avoir peur, le petit volatile se met à tourner autour de "l’arme" improvisée... avant de s’y poser avec une tranquille audace. Le Dandy cille un peu vite, avant de glisser un regard vers Apache :

“... Je savais qu’il allait faire ça.”

Evidemment.

Cependant, Skunk a mieux à faire que d'établir la pertinence de sa stratégie de défense : l’oiseau est juste sous son nez, et maintenant qu’il s’est posé, on peut voir que ses ailes sont en fait constituées de magnifiques plumes en sucre glace, d’une délicatesse incroyable. Fasciné, le Dandy perd quelques secondes à observer leurs reflets multicolores, avant de réaliser que le colibri est en train de récolter un peu de barbe à papa dans son long bec en bonbon.

“Eh, regarde... Si ça se trouve, il a un nid en sucre quelque p-”

Les yeux clairs de Skunk s’agrandissent brusquement. De sa main libre, il attrape quelques filaments de l’ornementation colorée du buisson et les porte à sa bouche, pour les goûter du bout des lèvres. Son visage s’éclaire d’un coup, tandis qu’il s’adresse au punk avec un enthousiasme inédit:

“Les buissons, les arbres. C’est de la barbe à papa. C’est littéralement du sucre cristallisé. Suffit de se servir.”

Il jette un regard circulaire sur l’immense forêt qui les entoure, tandis que son sourire prend des accents féroces.

“Vas-y, pose le sac : je vais le leur ramener, leur sucre à la con.”

Et machinalement, sans y penser, il tend à Apache la branche de réglisse toujours assortie de son colibri.

Des oiseaux, ouais, mais pas que ! Quand Skunk avait désigné le bord de l'eau chocolatée, le regard de l'Apache avait immédiatement suivi pour s’agrandir de stupéfaction et d’émerveillement !
Ca avait l'air vivant.. OUI ! Ca l'était ! Ca bougeait ! Pour de bon !
Le punk n'en croyait pas ses yeux, et pire encore lorsqu'il se retrouva avec le petit colibri qui lui virevoltait autour en continu !

"Eh bien alors, tu m’as caché tes talents de princesse Disney ?
- Pfffff !" Fut la simple réponse que l'anarchiste adressa à l'autre garçon, mais le sourire qui lui avait grimpé au visage laissait deviner qu'il était loin d'être vexé.
Il ajouta même;
"T'attend pas à c'que je chante une de ces chansons à la con !" Et il secoua la tête alors que le petit oiseau, visiblement, cherchait à s'installer au milieu de ses crêtes.

"Est ce que j'ai une tête à y faire un nid ??" Et le pire, c'était qu'il n'avait même pas posé la question ironiquement.

"Attends, ne bouge pas."
Le chasseur le regarda alors se diriger vers un petit arbre buissonneux de barbapapa pour revenir avec une de ses branches pour ensuite l'agiter près de lui et surtout de la bestiole vrombissante.
Celle ci, contre toute attente, et sous les yeux brillants de l'anarchiste, décida de se désintéresser de sa tignasse colorée pour mieux se poser sur le petit perchoir présenté !

"Oh !
- ... Je savais qu’il allait faire ça.
- C'est trop mignon..." Le ton avec lequel Apache avait dit ça aurait sans doute fait bondir Righteousness tellement cela sonnait comme une attaque contre la virilité personnifiée.

Pendant l'espace d'un instant, il y eut un silence.

les deux garçons s'étaient perdus en contemplation du colibri, le regardant s'installer et s'activer à récupérer le sucre dans l'enchevêtrement de bleu.

"Eh, regarde...
"Il mange !" S'exclama l'iroquois, visiblement attendri par le spectacle.
"Si ça se trouve, il a un nid en sucre quelque p-"
Les yeux noirs de l'Apache se relevèrent, intrigué que son collègue de mission ne finisse pas sa phrase, et il fut surpris de le voir taper dans la barbapapa, mais avec une retenue que l'Hérissé, lui, ne connaissait pas, pour ensuite voir son visage jusqu'ici plutôt tordu par la souffrance s'illuminer !
"Quoi ?
- Les buissons, les arbres. C’est de la barbe à papa.
- Ouais ?
- C’est littéralement du sucre cristallisé. Suffit de se servir."
La mine du punk suivit immédiatement celle du récolteur, s'éclairant en même temps que l'idée d'une mission torchée en un temps record faisait son chemin.
"Putaiiin, mais ouais ! T'as raison !
- Vas-y, pose le sac : je vais le leur ramener, leur sucre à la con."
Ca fit rire de bon cœur le révolté qui récupéra la branche à colibri en même temps qu'il faisait glisser le sac de son épaule, le déposant au sol comme demandé.
En passant, il ne pu pas s'empêcher d'en choper une bonne poignée pour se la fourrer dans la bouche.
C'était trop bon. Et il adorait tout ce qui était sucré.
"Il en faudra un max par contre !" Il fit remarquer. Sa bouchée s'était très rapidement transformée en un presque rien au contacte de sa langue qu'il avait désormais toute colorée de bleu.

Peut être mécontent qu'on lui bouffe son offrande, le colibri avait décidé de repartir, s'envolant plus haut, se dirigeant vers le feuillage plus touffu d'un arbre dont le tronc rayé bariolé n'était rien d'autre qu'un immense sucre d'orge.
Cela rendit le punk qui l'avait suivit des yeux pensif.

"Peut être qu'on devrait essayer de choper les grosses touffes qu'il y a la haut !"
Problème ?
Contrairement aux arbres traditionnels, ceux la n'étaient pas constitués de bois et d'écorces. Ils ne semblaient même pas vraiment avoir de branchages, ce qui rendrait l'escalade sans doute très compliquée.
Le chasseur fit une moue de travers, dubitative, mais se rapprocha tout de même d'un des fameux bonbons géants surmontés de nuages sucrés, s'éloignant du sac, considérant la question sérieusement.
Fort de sa réflexion, le garçon se pencha, cueillant une fleur, en fait une sucette en forme de marguerite, n'hésitant pas une seule seconde à se la fourrer dans la bouche, la suçotant avec des airs inspirés, comme si ça allait l'aider à mieux considérer la question.
Et puis, soudain, il fronça les sourcils un peu plus fort, son attention attirée par quelque chose.
Il fit quelques pas en arrière, rejoignant le sac à dos tout en sortant son couteau de sa poche, le dégainant, sucette toujours en bouche.

"J'ai entendu un truc." Qu'il fit en guise d'explication très brève, son arme courte tendue en direction des bois.
Et puis, quelques secondes après, en effet, le son de quelque chose qui se déplaçait se fit entendre.
Ça faisait comme si ça se trainait un peu au sol, avec des bruits de pas en accompagnement.
Sans vraiment y réfléchir, le punk s'était posté devant le Dandy. Le couteau en avant, et l'autre main tendue vaguement en arrière, comme pour lui signifier de rester en retrait.

Encore quelques secondes de plus, et enfin...

Devant les yeux des deux enfants perdus sortit du bois sucré un ÉNORME...

Crocodile géant en gélatine rose !

Apache rend son sac à Skunk avec un rire satisfait, avant de commencer à dévorer la branche de barbe à papa que le Récolteur lui a tendue. Il ne semble pas prêter attention aux regards perplexes de plus en plus marqués que son cadet pose sur lui.

C’est qu’il est bizarre, ce punk. Venant de Skunk, cela fait un peu hôpital qui se fout de la charité, mais ce n’en est pas moins vrai : Apache est étrange.

D’un côté, c’est de toute évidence un vrai punk, de la pointe de ses crêtes jusqu’à son blouson clouté et bardé d’écussons anti-autorité. Il parle fort, il picole de la bière tiède, il fume des clopes au contenu très aléatoire. Il balance des bouteilles vides dans le décor ou à la tête des gens, il n’écoute pas ce qu’on lui dit et il n’hésite visiblement ni à insulter ni à cogner ceux qui lui déplaisent.

Oh et il charge des Machines endormies pour le fun, aussi, ce con.

Mais Apache se permet également de jolis discours sur l’altruisme et l’entraide, auxquels non seulement il a l’air de croire, mais qu’il applique ; même avec un petit con psychorigide qui l’a entraîné dans une mission de merde. Et Skunk ne pense pas juste au fait de l’aider à se relever, ou de porter son sac : depuis qu’ils se sont rencontrés, le Chasseur ne lui a pas une seule fois dit de la fermer. Il n’a pas interrompu ses explications et théories trop longues, il ne les a pas trouvées arrogantes - ou au minimum, il ne l’a pas dit à voix haute. Il ne s’est pas foutu de la gueule du Dandy, ni quand ce dernier s’est stupidement fait mal, ni quand il a laissé entrevoir quelques unes de ses trop nombreuses lubies et obsessions.

Et voilà que maintenant l’Hérissé s’émerveille ouvertement devant un paysage en sucre peuplé d’animaux en bonbons. Il fait des commentaires, ramasse et goûte tout ce qui est à sa portée, mâchouille une sucette en forme de fleur, comme cela, naturellement, comme s’il se foutait éperdument que Skunk trouve cela normal ou non. Il n’a même pas mal pris la vanne sur son côté princesse - au contraire, il a joué avec.

Etrange, vraiment. Un drôle de mélange, déstabilisant, pourtant pas si incohérent. Cela laisse le Dandy un peu mal à l’aise, comme à chaque fois qu’il ne comprend pas comment quelqu’un fonctionne. Il ne peut s’empêcher de se dire que cette apparente (gentillesse) franchise cache sûrement quelque chose. Et pourtant...

Il ne sait pas trop comment le formuler. Il sait juste que c’était cool que quelqu’un d’autre le trouve mignon, ce colibri.

Pensif, Skunk s’accroupit avec des précautions infinies pour fouiller dans son sac. Il en retire tout d’abord sa veste, qu’il enfile aussitôt - il se fait mal, bien sûr, mais cela en vaut la peine : bien qu’il ne fasse plus aussi frais dans la Province Acidulée que dans la bouche de la Machine ou dans les tuyaux, le Dandy se sent toujours mieux avec sa veste sur les épaules, cela lui donne un peu moins l’impression d’être un escargot qui se balade sans sa coquille. Sans parler du poids familier et toujours réconfortant de sa flasque, rangée dans celle de ses poches intérieures qui se boutonne.

Skunk rajuste son revers et tapote le flacon de rhum à travers le tissu, comme s’il saluait un vieil ami, avant d’attraper sa gourde et un chiffon et de se nettoyer (enfin!) un peu les mains. Se sentant plus léger de quelques tonnes, il pioche ensuite au fond du sac une autre gourde, vide. Il la remplit de chocolat dans la rivière toute proche. Puis, alors qu’il s’apprête à en essuyer l’extérieur avec son chiffon, il hésite. Et finalement, il en boit une grande goulée.

Oh merde, Apache avait raison, ce foutu chocolat est absolument délicieux.

Skunk s’autorise une seconde gorgée, bien plus ravi qu’il ne le laisse paraitre. Puis il remplit à nouveau la gourde, la nettoie et la remet à sa place au fond du sac.

Le Dandy jette un coup d’oeil au punk, qui est occupé à étudier les arbres en sucre d’orge et le sucre qui couronne leur sommet - pour cette fameuse mission qui ne le concerne pas. Sans rien dire, Skunk se saisit alors d’une seconde gourde vide, qu’il emplit de chocolat liquide.

Une option, disons. Pour plus tard.

Quelques instants après, le Dandy s’est relevé tant bien que mal (c’était moins pire que la première fois, au moins) et est occupé à prélever de la barbe à papa sur un buisson proche de la rive, pour la tasser au fond d’un bocal. L’entreprise est moins satisfaisante qu’il ne le pensait : les filaments lui collent aux doigts, et il a oublié à quel point une barbe à papa est surtout constituée d’air, bien plus que de sucre. Il va mettre des plombes à remplir ne serait-ce qu’un seul...

“J'ai entendu un truc."

Skunk redresse brusquement la tête, surpris de voir que Apache est revenu vers lui, couteau en main. Le punk fixe le sous-bois multicolore d’un air préoccupé, et bien malgré lui le Dandy sent sa bouche qui s’assèche. Il tend l’oreille à son tour, se dit qu’il n’entend rien de spécial. Puis il réalise que c’est un peu trop vrai.

Autour d’eux, les oiseaux ont cessé de chanter.

Doucement, Skunk referme son bocal. Et son oreille moins entraînée que celle d’Apache capte enfin ce dont parle le punk : le bruit sourd de quelque chose qui rampe, se traine, au rythme régulier de gros pas lents et lourds...

Spontanément, le Dandy pense à Jurassic Park. Il frissonne, écarte l’idée comme ridicule.

Puis les buissons qui bordent la forêt s’écartent, et pour la seconde fois de la journée, Skunk regrette d’avoir (presque) eu raison.

Oh sa mère...

Le crocodile, monstrueux, ne fait sans doute pas loin de dix mètres de long ; il est tellement grand que son abdomen est soutenu par une troisième paire de pattes courtaudes. Mais à part ce détail, c’est la copie conforme (et à peine délirante) d’un bonbon crocodile en gélatine. Il est translucide, d’un rose profond, presque fuchsia, à part son ventre et le dessous de sa mâchoire qui sont d’un blanc immaculé. Il pourrait presque avoir un côté sympathique... si sa gueule ne paraissait pas parfaitement fonctionnelle, emplie de dents immenses qui sont peut-être solides, ou peut-être pas, honnêtement Skunk n’a aucune envie de le savoir.

La bête s’immobilise juste à la lisière des arbres. Les deux bonbons roulés qui lui servent d’yeux n’ont bien entendu aucune expressivité, mais Skunk sait que la créature les a vu, il sent qu’elle les regarde. Il déglutit nerveusement, jette un oeil au chemin qu’ils ont empruntés pour venir... et perd le peu de couleurs qui lui restent.

“Apache...”

En murmurant, il fait un pas vers le punk... et se rend soudain compte que ce couillon de Chasseur s’est mis entre le crocodile et lui, une main tendue vers l’arrière comme pour lui signifier de rester à l’écart et non mais et puis quoi encore?!

“... Non mais tu te calmes là, tu m’as pris pour ta gonzesse ou quoi ?!”

Il chuchote toujours, mais sa voix s’est faite sifflante d’indignation. Il écarte la main d’Apache d’une petite tape et s’avance pour arriver à son niveau. Quand ses yeux clairs retombent sur le crocodile, cependant, l’expression vexée de Skunk s’atténue : un vague reste de bon sens vient de lui rappeler qu’ils ont d’autres priorités que de faire un concours de l’idiot le plus viril.

“... Ecoute, panique pas, mais... L’escalier de guimauve. Il a disparu.”

Disparu, oui. Comme s’il n’avait jamais existé. Il n’y a plus que la paroi accidentée dont dévale la cascade de chocolat. Elle comporte quand même pas mal de prises et parait possible à escalader, au moins un peu... Mais pas pour quelqu’un avec le dos bloqué, évidemment. Ce que Skunk se garde bien de dire.

Doucement, il tend à Apache le bocal de verre qu’il tient toujours.

“Tiens, essaie de balancer ça derrière-lui... Si ça se trouve, ça l’intéressera plus que nous? Et s’il charge...”

Moment de silence, à peine perceptible.

“... on court vers la paroi rocheuse.”

Les crocodiles normaux ne sont pas vraiment doués en escalade. Reste à espérer que celui-là ne l’est pas non plus, n’est-ce pas?...

Un crocodile géant !
Un putain de crocodile en gélatine rose bonbon GÉANT !
Non mais c'était sérieux ça ?

"Ça fait un sacré gros lézard..." Avait murmuré le punk pour lui même, pas trop sûr de comment gérer la situation.
Oh bordel, si seulement il n'avait pas lâché son épée ! Avec elle, il aurait pu découper cette bestiole en tout un tas de petits cubes fuchsias et blancs sans aucun mal ! Mais avec un couteau court... Ça n'allait pas être la même histoire !
Quel con !

"Apache..."
L'iroquois, fort de sa position protectrice eut envie de lui sommer de rester en arrière et de ne pas s'inquiéter. Que comme quoi il gérait ! Qu'il en avait croisé des plus gros. Qu'en tant que chasseur (Spécialisé dans les potits lapins) il avait l’expérience en la matière (gélatineuse ?), mais il n'en eu pas vraiment le temps.

"... Non mais tu te calmes là, tu m’as pris pour ta gonzesse ou quoi ?!"
Le chasseur cligna des yeux, baissant son arme d'un seul coup. Ses deux bras même, les laissant reposer le long de son corps, pour ensuite se tourner un peu lentement vers Skunk qui s'était avancé, le fixant sans rien dire. Un peu comme si soudain le crocodile n'existait plus. Il le regardait, juste. Silencieux. Mais ce n'était pas pour autant qu'il ne pensait rien. Loin de la.
Non mais il était sérieux la ?
L'Hérissé sentit une vague d'indignation grimper en lui et sa respiration se fit un peu plus rapide.
La, tout de suite, il mourrait d'envie de l'assassiner verbalement, ce petit connard looké façon VRP, et la manière dont l'iroquois se pinçait les lèvres tout en le fixant intensément l'illustrait bien. Pourtant, le monstre gélatineux eut vite fait de rappeler son attention alors qu'il avait ouvert grand la gueule, la claquant deux fois de suite, ses dents pointues et visiblement solides se heurtant les unes aux autres.
Dans un reflex, le punk s'était remis en position de défense, lame en avant, la mâchoire contractée.

"Fais pas l'malin, sac à main, c'est moi qui vais t'bouffer !"
Des menaces sommes toute... Originales. Et pour l'instant, il épargnait son collègue d'infortune.
Pour l'instant, oui.
Pendant ce temps la, le Dandy avait visiblement prit le temps de chercher une issue au gros problème dentu et coloré qui se présentait à eux.

"... Ecoute, panique pas, mais... L’escalier de guimauve. Il a disparu.
- Fait chieeer..." Le chasseur avait sifflé entre ses dents serrées, ne lâchant cette fois plus le monstre des yeux qui n'avait heureusement pas encore décidé de s'avancer vers eux.

"Tiens, essaie de balancer ça derrière-lui..." Le bocal tendu par le récolteur entra dans le champs de vision du révolté. "Si ça se trouve, ça l’intéressera plus que nous?" Sans rien dire, de sa main libre, le punk se saisissait de l'objet tendu. C'était pas con comme idée. Mais quelque chose lui disait que ça ne suffirait pas. "Et s’il charge..." Un petit silence. Court mais inratable au vu de la situation tendue. "... on court vers la paroi rocheuse."

L'Apache prit un inspiration, sa mine se décontractant, l'air de rien. Il réfléchissait au plan de Skunk, et au vu de la bouille qu'il tirait, il n'était pas tout à fait satisfait.
Il y avait un truc qui collait pas.

"Excuse moi, chéri. Mais t'as toujours eu une tendance à me surestimer." Il commença, les yeux toujours focus sur l'énorme reptile bonbon qui semblait s'impatienter, s'agitant, secouant son immense gueule, l'ouvrant et la refermant en rugissant.
Malgré tout, le punk eut l'audace de tourner un regard noir taquin vers le Dandy, à la fois assassin et amusé.
"Je sais, je sais, un petit copain est sensé pouvoir soulever son amoureux sans mal, mais si je dois te porter tout en grimpant ça va faire beaucoup pour mes petits bras." Et il ponctua sa remarque d'un grand sourire de travers.

Et puis, alors que le monstre claquait une énième fois de ses dents tranchantes, faisant un pas vers les deux garçons, Apache balança de toute ses forces le bocal non pas un peu plus loin mais directement sur la tête du bestiaux !

La chose étant toute constituée de gélatine, le verre ne se brisa pas au contacte de son crane, mais se contenta de rebondir dans un BOooUuuiing bizarre ! Pas d'chance ! Ou peut être que si, finalement ! Car le crocodile, malgré l'absence totale d'efficacité de l'attaque, se mit à réagir comme si on lui avait jeté un gros bout de viande ! Ouvrant la gueule et tentant de broyer le bocal ! La mâchant comme une proie !
L'anarchiste n'attendit pas qu'il ai terminé, se jetant à corps perdu sur la créature, sautant pour éviter l'énorme tête toute bardée de crocs, de toute façon déjà occupée, et atterrissant sur son dos, y rebondissant un peu comme le bocal avait fait avant mais parvenant à y réatterrir et à planter son couteau tenu à deux mains dans le crane fuchsia du reptile bonbon !

SPLORTCH !

Et il tira, ouvrant une grosse plaie qui ne saignait pas !
Pourtant, il semblait que le bonbon fut capable de sentir la douleur ! Car il se mit à s'agiter plus fort ! Il avait fini par briser le bocal par la force de sa mâchoire, l'explosant en un tas de débris de verre coupant ! Et il s'agitait ! Se secouait ! Bougeant sa grosse tête de gauche à droite la gueule grande ouverte !
Le chasseur lui, tenait bon dans ce drôle de rodéo ! Arrachant le couteau pour mieux le replonger dans la gélatine rose encore et encore ! Des manières dignes d'un tueur en série dans un très bon slasher... Sauf que le rouge de l'hémoglobine était remplacé ici par de la gelée bouillie rose translucide !