Lundi croisait les bras, toisant un peu Rowan. C'était qu'il n'avait pas pu prendre tant de temps que ça pour la regarder de haut en bas. Il rit à la remarque de l'ordre de présentation. Il faudra qu'il fasse attention d'ailleurs, est-ce qu'elle lui a laissé un cheveux sur les vêtements ? Juste au cas où...

La question qui vint le ramena plus concentré sur la situation, il haussa les épaules. Puis fit mine de réfléchir. Comme s'il avait oublié, alors que bien entendu, ce n'était pas tout à fait vrai.

- Je regardais la vie autour du Ranch, et j'ai vu une nouvelle tête. C'est pas très commun pendant ce sale temps. Du coup, je suis venu voir.

Le sourire s'agrandit en coin.

- On dirait bien que j'ai quitté la Tour juste pour toi.

En ce qui concernait la chance, Klere ne savait pas répondre à ça. Etait-ce de la chance que de tomber sur lui ? Ou que son amour décide de s'accrocher à quelqu'un ? Tout était très relatif. Sûrement. Lundi se savait bien trop émotif, mais il le vivait plutôt bien. Tant que ses colères ou peines ne blessaient pas ceux qu'il aimait. Ces traitresses étaient des plaies, qu'est-ce qu'elles ne comprenait pas à "un amour qui ne mourra jamais" ? Evidemment que le Baron n'accepterait jamais qu'elles ne l'aiment plus.

Bref, la demoiselle en face de lui avait un petit piquant aussi plaisant que le piment. Le Céleste aimait ça chez bien de ses femmes et amantes.

Il s'approcha, juste assez pour passer les doigts dans les cheveux d'orage. Assez doucement, mais c'est que ce Baron était très attaché aux contacts. La petite décharge ne se fit pas attendre. Un petit coup de fouet qui s'entend tout léger dans les airs.

- Ah... désolé pour ça. La foudre prend tous les chemins qu'elle veut.

Vague plaisanterie. Décidément, Klere était plus crème qu'électricité.

Les cheveux échappèrent aux doigts du Baron lorsqu'un demi-tour fut appliqué. Rowan semblait décidée à mettre un peu de distance, certes probablement de rigueur parmi les "bonnes manières approximatives" du Port -approximatives puisqu'elles n'étaient de toutes façons pas vraiment habituelles pour la majorité des déchets qui le peuplait. Lundi suivit simplement des yeux le chemin qu'elle traçait, il arqua un sourcil en la voyant jouer à nouveau les funambules.

Nonchalamment le Céleste retrouva le sol du pont, pour suivre le mouvement. Il écoutait les questions posées, Rowan ne perdait pas le nord. Où avait-il pu la voir ? Depuis sa Tour ? Bref, le Baron se trouvait plutôt amusé par le raisonnement.

- Un conte de fée ? Heh, ça veut dire que je suis prince ?

Il rit.

- Ah, mais je le suis en quelque sorte.

Samedi était Wa, mais pas ses frères, après tout. Ça le divertissait, Lundi. Mais rapidement, il s'intéressa plutôt à lever une partie du mystère. Ça avait eu bizarrement l'air de toucher la demoiselle, ce "juste pour toi". Les émotions, c'était ce qu'il préférait. À quel point le coeur pouvait prendre la place du cerveau, à quel point tout n'était dicté que par ces ressentis et non le froid pragmatisme.

Quelles étaient les éclairs qui bouillonnaient dans le palpitant de cette jeune fille ?

- Je plie le hasard à ce que je veux.

Petite remarque lancée comme ça, un sourire en coin. Le troisième Guédé connaissait bien son rang, le hasard était un petit jeu. On pouvait le suivre ou non. Il pointa finalement de l'index le ciel, les yeux se noyèrent dans la voûte céleste.

- C'est le ciel qui m'a montré le Ranch.

La tête retrouva l'horizon, et donc l'interlocutrice.

- C'est comme ça que je t'ai trouvée.

Il croisa à nouveau les bras, décidément le temps plus clément lui manquait particulièrement. Lundi commençait à penser fortement à la chaleur de sa maison. Mais pas avant d'assouvir sa curiosité. Il fallait passer un peu de temps avec cette Rowan du Port.

- Pourquoi est-ce que je chercherais à te baratiner ? Je n'aime pas utiliser des mots qui ne me rendront pas justice.

Ce qu'il voulait probablement dire par là, c'était qu'il ne mentait pas très souvent. Du moins, pas en usant les mauvais mots. Tout n'était question que de termes manquants, de règles non-dites, ou de la précision des significations. Surtout lorsqu'il était question de contrats vaudous. Pour les affaires de coeur, il pensait ne pas avoir besoin de mensonges. Lundi n'était pas très doué pour cacher les colères, alors... il était assez franc. Pour ce sentiment, du moins.

Décidément, il y avait quelque chose de particulier. À en juger par l'attitude. Lundi en oubliait presque ce quelque chose qui se dégageait de cette Rowan, la magie était bien connue au Bayou. Mais il n'était pas exclu que des humains soient touchés par cette aura. Et puis, le Guédé était bien trop occupé à discuter pour se soucier du reste. Sa raison était bien souvent mise de côté. La réponse en revanche, alors que le Céleste observait le petit manège d'équilibre de sa nouvelle rencontre, fut apportée dans un emballage qui trahissait quelques déchirures. Le Baron ne s'y attarda pas, ce contentant d'observer la démarche de Rowan.

L'air peut-être plus grave s'envola avec une vague surprise sur le visage lorsque la demoiselle se tourna à nouveau. Une autre question éclata dans l'air, puis une précision en prime. Un sourire en premier lieu servit d'entré à l'explication.

Klere ne savait pas encore ce qu'il comptait faire, et ne savait donc pas encore s'il voulait être précis ou non. D'un côté, ce n'était peut-être pas bien difficile pour elle de se renseigner. Déjà des pirates avaient été foudroyés. Par contre, il ne pourrait pas maitriser les déformations du bouche à oreille. S'il y en avait. Impossible d'être certain.

- La surface d'une eau stagnante me permet de voir ceux dont j'ai récupéré un objet. Ou un cheveux. Au Ranch, il y en a plusieurs que je peux observer. Alors ça arrive, parfois, que je vois de nouvelles personnes. Je ne peux pas suivre ceux dont je n'ai rien.

Un côté plein d'égo ne voyait pas de mal à exploser une partie de son pouvoir, et le côté plus rationnel ne regardait pas en Rowan quoi que ce soit d'intéressant à berner sur ce sujet. Il ne comptait pas la foudroyer. Il ne comptait pas obtenir des secrets d'elle. Elle savait se montrer assez amusante autrement. De ce qu'il avait pu testé jusqu'à cet instant. Le Céleste avait peut-être bien décidé d'être sympathique.

Et puis, elle semblait être du genre à comprendre que les gens étaient fourbes. La réponse qu'elle avait offerte expliquait bien cet aspect.

Lundi jouait les observateurs, c'était toujours un peu spécial avec celles d'en dehors du Bayou. Elles n'avaient pas forcément les moeurs que lui.

- C'est une partie des choses que je tiens de mon père.

Parce qu'être demi-dieu, évidemment que ça nourrissait cet égo déjà bien grand.

- T'en fais pas, je préfère te voir en vrai.

Un sourire un peu taquin, alors qu'il eut une grande envie de s'étirer en faisant presque craquer les os. C'était que le Céleste restait bien paresseux, il n'était peut-être pas encore totalement réveillé. Un tour sur lui-même permit de s'intéresser à rambarde opposée à celle de Rowan et de s'y asseoir. Il jeta un oeil à l'eau glacée qui passait sous le pont.

- Tu n'aimes pas pouvoir toucher les gens ? Moi je le fais, même avec ceux que je déteste. Je peux pas m'en empêcher.

Bien sûr, avec ceux qu'il aimait, il pouvait passer sa vie à rester collé à eux. Il n'aimait pas voir ses femmes être trop loin de lui. Evidemment, il les laissait faire, c'était impossible d'être toujours avec toutes tout le temps. Il avait appris avec le temps. C'était peut-être bien sa première épouse qui dû supporter la présence presque omnipotente. Et petit, il ne pouvait pas rester bien loin de ses frères et de sa mère.

Tout était bien trop exagéré.

Lundi se prêtait au jeu, ça passait bien le temps conceptuel de l'Île.

Le guédé avait ri à la mention de pervers. Obscène, il pouvait l'admettre parfois. Mais voyons, il ne pouvait pas s'inviter dans les salles de bains des maisons. Oh, mais c'était vrai, Rowan ne le savait pas. Il ne l'avait pas précisé. Un côté avait envie de faire un peu peur, de faire une bonne blague.

Les pensées avaient été tournées sur autre chose.
La réaction de la demoiselle avait empêché le Baron de retourner à sa réflexion précédente. Il écoutait ce que disait sa partenaire de discussion, elle racontait quelque chose qu'il savait déjà. Mais qui faisait bel et bien sens. Certaines se laisseraient faire, sans broncher, trop à l'ouest pour comprendre. D'autres seraient juste résignées. Mais une catégorie était aussi celle du répondant. Le Céleste aimait toutes ces sortes, mais généralement il était motivé par un coup de foudre. Alors loin de lui l'envie de faire peur à celle qu'il choisissait.

Lundi regardait le parcours de Rowan qui venait le rejoindre, répondant au taquin par le taquin. Un sourire toujours là, parce qu'elle l'amusait bien. Et elle avait bien l'air de jouer aussi, elle donnait déjà un écho de ce qui s'était passé juste avant et le soulignait dans les mots qui suivirent.

- C'est vrai, y a des mains plutôt sales au Port. Mais moi je suis un prince charmant, non ?

Et il trouvait sa blague amusante, il en rit avant de reprendre.

- Non, non, c'est vrai que je suis un Baron. J'ai l'habitude de m'autoriser beaucoup. Les mains, les lèvres... ça dépend, mais évidemment c'est pas pour n'importe qui.

Seulement ce qui lui plaisait, hein ?

- Et puis il y a des rituels qui demandent beaucoup plus, mais ça c'est un autre cadre.

Des rites d'orgies, au Bayou, il aimait bien. Mais Lundi avait cru comprendre que cette éducation plus libre sur ce point était absolument lointaine à ceux qui ne faisaient pas partie de leur monde. Tant pis pour eux.

- Je n'ai pas besoin de mes pouvoirs pour ça.

Il préférait tant toucher avec les mains qu'avec les yeux.

- Alors ?

D'un coup, comme venu de nulle part. Le Céleste se pencha vers Rowan.

- Raconte-moi. Pourquoi étais-tu sur ce pont ? Comment ton frère et toi êtes arrivés ici ? Et est-ce que j'ai vraiment profité de toi ?

Le regard malin, un petit sourire satisfait pour la forme. Il s'amusait bien. Tellement, qu'il se laissa tomber en arrière. Les pointes de quelques nattes touchèrent la surface de l'eau, il aurait pu en être ainsi pour le manteau de Klere mais non. Le Baron jouait peut-être à la chauve-souris, se retenant à la rambarde par les jambes et un pied accroché à une petite poutre verticale soutenant le reste de leur siège du moment.

Lundi voyait le monde à l'envers, bras croisés -il ne saurait pas où les mettre à cause de la gravité-.

Il avait noté un touche de curiosité, est-ce que Rowan ignorait totalement de quoi est-ce qu'il avait parlé ou non ? C'était un peu curieux, il n'arrivait pas à imaginer que c'était possible en vivant parmi les pirates. Ou était-ce juste un décalage monumental entre son monde et le sien ? Possible.

Mais pour le moment, il souriait, amusé parce que la demoiselle l'avait suivi tête en bas. Il commençait à aimer cette attitude aussi, il l'avait déjà reconnue en d'autres de ses épouses. Parfois, c'étaient même elles qui l'emmenaient dans leurs jeux. Et donc, il écoutait ce que cette rencontre avait à raconter sur elle-même. La vie au port, ce qu'elle pourrait bien y faire pour apporter de l'argent à elle et son frère... Assez banal pour le coup, mais c'était le lot de beaucoup de pirates sans le moindre doute. Il fallait s'installer après tout, ils n'étaient pas tous une grande famille.

- Ah ça, faudra trouver alors...

Un peu taquin, mais déjà en train d'observer l'horizon inversée. Il était bien heureux d'être du Bayou plutôt que du côté de la mer, cet autre monde ne l'intéressait que pour se jouer d'autres.

Puis, voilà autre qui se montra. Un autre air se fit entendre dans les oreilles du Céleste qui sourit en un souffle amusé.

- Tu me réprimandes, mais tu demandes.

Klere jouait juste sur des mots. Mais il posa le regard sur Rowan, et fit mine de réfléchir avant de se redresser pour redonner au sang le sens naturel. Assis un peu en biais, pour être tourné vers Rowan.

- Alors, tu peux me poser les questions que tu veux mais elles ne doivent pas concerner ma magie du ciel.

Un sourire un peu moqueur.

- Je t'ai déjà assez parlé de ça.

Il remettait quelques nattes en place, celles qui le gênaient. Elles rejoignirent donc la queue principale.

- Et moi je te pose une autre question : Qu'est-ce que tu veux pour que je me rattrape ?

Lundi était moins fourbe avec ceux qui l'intéressaient, encore moins avec celles qui tapaient un peu dans ses émotions. Et puis, le Céleste pariait qu'il devait éveiller de l'attrait. L'égo pouvait probablement plaider coupable, mais le Guédé en face était celui qui aimait faire des éclairs avec les émotions.

Vraiment, elle ne lâchait pas l'affaire du pervers. Lundi en riait un peu, il imaginait qu'elle allait s'inquiéter dès qu'elle se dévêtirait. Il devrait la rassurer au moins pour lui dire qu'il ne peut pas voir au travers des murs. À la place, il haussa juste les épaules.

- Je n'ai pas besoin de ça, j'ai assez d'épouses pour savoir ce qu'il en est.

Lui qui voulait être un peu plus galant, il avait laissé les perches de côté pour plutôt inviter. Il entendait bien ce que Rowan lui disait, et l'enregistrait dans la tête. Puis, elle enchaina en parlant du Bayou. Ou plutôt, en demandant d'en savoir un peu plus. Klere remit en place un collier qui s'était retourné à cause de la petite acrobatie précédente.

- Le Bayou, heh. C'est plein de plantes plutôt intéressantes pour des préparations, ou pour juste se sentir un peu flottant. Il y fait sombre, l'eau est noire, le ciel aussi. C'est presque la nuit tout le temps. Tout le monde est un peu sorcier, mais c'est Maman, mes frères et moi qui sommes les plus puissants. Bien sûr, Maman est la plus forte et c'est Samedi qui la suit de près pour ça.

En parlant de ça, il observait le visage de Rowan. Comme pour chercher ce qu'elle pouvait bien penser à ce moment. Lui, il affichait un sourire en coin. Il aimait beaucoup sa famille, mère et frères. Il fallait chérir ces liens que rien ne pourrait jamais détruire. Pas même la mort. De toute manière, la fratrie était entre les deux mondes.

- On sait faire la fête, mieux que les pirates du Port. Mais je préfère les rituels pour les Loas, ils nous considèrent comme des parents d'ailleurs.

Ce "nous" s'adressait aux Barons, pas aux habitants. La hiérarchie était tout de même présente, et le Céleste l'aimait bien cette pyramide avec sa mère tout en haut. Les lèvres du Guédé changèrent leur posture en un rictus plus taquin alors que le "demi-loa" se penchait un peu vers Rowan, comme pour lui parler d'un secret.

- Les rites dont je parlais avant, ceux qui demandaient plus, en font partie. Des debòch.

Puis il posa un coude sur sa cuisse pour se tenir la tête dans la main, observant de travers la demoiselle. Il se demandait pourquoi aussitôt avait-elle pensé aux pervers lorsqu'il parlait d'observer les gens par les cieux. Il avait l'impression de déceler une curiosité qu'il croyait reconnaître.

- Tu sais ce que sont des orgies, hein ? Il n'y a que les petits garçons pour regarder dans les salles d'eau.

Taquin jusqu'au bout. À vrai dire, il ne pensait pas un jour demander ça à quelqu'un. Généralement, il n'avait simplement pas à l'expliquer. C'était parfaitement naturelle au Bayou, et respectueux des liens qu'il ne fallait pas mêler à ça. Oh et, il fallait croire que ça le vexait un peu de l'imaginer user de son pouvoir pour ce genre de curiosité. Il le pouvait, mais il aurait fallu une raison à ça. Et Lundi, ça ne l'inspirait pas. Si le Baron avait conscience d'un certain décalage entre un statut plutôt obscène pour les autres peuples, il avait un peu appris ce qui pouvait être acceptable pour les dames des autres clans. Mais voilà que Rowan était bien particulière.

Mais c'était qu'elle avait un côté bien titillant cette demoiselle mécontente. Il ne donnait pas assez de preuves ? Elle voulait des preuves ? Ici sur cette Île qui admet qu'un enfant peut voler ? Le sourire était cependant toujours présent, tout allait bien il n'était pas offusqué pour si peu. Il se redressa, et ne pouvait nier l'insatiable pour le désigner. Que devait-il comprendre de la reprise de son image de salle d'eau ? C'était elle qui avait la curiosité de l'innocence ? À en juger par le premier baiser qu'il semblait être celui qu'il lui avait pris... ce serait cohérent. Et assez commun au peuple des pirate qui ne vivait pas de débauche.

- Heh, des preuves, des preuves... t'aurais voulu y assister ?

Et non, elle ne savait pas de quoi il parlait. Il avait une vision bien drôle dans la tête que l'on ne décrira pas. Bref, concernant la colle, rien de bien étonnant, pour quelque chose qui ne devait pas se faire, ou pouvait se faire mais en milieu clos. Loin des yeux des jeunes filles. Klere glissa la main dans le dos de Rowan, créant un nouveau petit choc électrique, descendant jusqu'au flan opposé pour s'en défaire et s'appuyé sur le bois de leur perchoir. Le Baron était plutôt collé à son âme d'intérêt du moment.

- Je l'avais deviné... ce n'est pas ton monde ça.

De son autre main, le Céleste s'aventura à glisser un index un brin provocateur sous la mâchoire de Rowan en une brève caresse pour garder le visage face à lui.

Il aurait adoré, faire paniquer une douce innocente au milieu d'une bonne soirée. Juste lui faire peur, évidemment, une mauvaise farce sans jamais blesser. Non, il avait des filles, il lui était impensable de créer un vrai cauchemar de ce genre. Néanmoins, ça aurait demandé un peu plus de préparation qu'un coup de tête. Tant pis, tant pis. Le Baron trouvera autre chose pour jouer avec les moeurs de cet autre peuple.

- Hm, disons que ça porte chaud. Rituels ou non, je peux aussi en profiter chez moi.

Lundi était un peu moqueur dans les yeux, il avait l'impression son interlocutrice ne voyait pas ce qu'il imaginait.

- Devrais-je te le dire ? Ou ce serait inconvenable pour ton univers ?

Il pencha un peu la tête, comme pour appuyer sa question.
Tout en s'approchant tout autant, il n'allait pas lui prendre tout de suite un autre baiser. Ça pouvait lui passer par la tête, les liens et les contacts lui convenaient toujours, il fallait bien l'avouer.

- Quoique... j'aurais pas eu envie de partager.

Le rictus toujours là, toujours autant joueurs. Quand il ne s'énervait pas pour un rien.

Il avait offusqué Rowan visiblement, et elle le lui faisait bien savoir. Lui non-plus ne riait plus vraiment. Il resta juste un instant à regarder dans le blanc des yeux de la bermudonne. C'en était vraiment étrange qu'elle ne soit pas du tout au courant, pas même un peu. Pas une minuscule idée ? Pourquoi est-ce qu'elle insistait autant ?

Lundi s'était un peu écarté, pour mieux jauger, mais sans pour autant se détacher d'elle. Les plus prudes avaient eu l'air de plus en savoir...

Son frère la gardait dans une tour ?

Klere détourna la tête pour éclater de rire, c'était plutôt drôle. Il jeta la tête en arrière, tenant encore la demoiselle. Il ne lui fallut que peut de temps pour se reprendre et reprendre son observation de la grande curieuse. Lui-même n'avait jamais eu à autant l'être en réalité.

- Kisa ou gen nan tèt ou ?

Le Baron allait-il devoir expliquer les choses de manières précises ? Il fallait dire qu'elle semblait vraiment happée par ce "beaucoup plus".

- Ce n'est que le nom qu'on donne à une assemblée de gens qui font lanmou. Au même endroit, aux yeux de tous. On peut y avoir plusieurs partenaires. Èske sa klè ?

Un soupir en prenant une mèche de cheveux sombres dans la main libre, observant leur profondeur. Et il fallait avouer que le Céleste n'aimait pas partager ses épouses, elles pouvaient choisir quelques spécimens pour les amuser lors de ces rites si elles y participaient, mais jamais les hommes ne pouvaient les choisir elles.

- Tu voulais me parler pour que je t'apprenne des choses qu'un amant est sensé enseigner à sa dulcinée ?

C'était peu commun, de se dire qu'un Baron serait bon professeur. Du moins, venant d'un habitant du port. D'une jeune fille donnant des airs de bonne famille, encore moins... À moins qu'en effet, il faisait fausse route ? Et si l'ignorance absolue pouvait mener à se jeter sur ce qui semblait plus facile ? Peut-être, peut-être. Lundi n'y pensa qu'un bref instant, cette Rowan occupait bien l'esprit.

Mais bon. La bermudonne avait été claire. N'est-ce pas ? Il avait compris, il n'avait pas besoin de la prendre en princesse. Peut-être que ça se lisait dans le sourire en coin et les yeux qui avaient changé leur manière de regarder la jeune fille. Le Céleste ne la considérerait donc pas comme une fleur à prendre avec délicatesse, mais il resterait encore bon avec elle. Elle ne l'avait pas fâché.