Inchangé depuis plus longtemps que beaucoup de mémoires de fées remontent, Boréal est un être sur lequel chacun sait qu'il peut compter. C'est une grande fée sérieuse mais avenante, connue pour sa sagacité et pour son sens des responsabilités. Pour autant, Boréal ne manque pas d'humour. Il lui arrive occasionnellement de plaisanter, ce dont on ne se rendra pas forcément compte immédiatement comme il parlera toujours sur le même ton égal et agréable, et avec ce sourire serein qui lui monte si facilement aux lèvres.

L'Alcyonien possède un charisme naturel à la hauteur de son autrement discrète efficacité. Il émane de lui un calme qu'on décrit souvent semblable à celui d'une plaine couverte de neige immaculée, avalant tout bruit parasite. Boréal n'a jamais un mot plus haut que l'autre. Son tintement est doux, mélodieux, et résonne rarement sans raison - même lorsqu'il fait la conversation, chose à laquelle il ne rechigne jamais. Boréal paraît par essence apaisé et transmet très aisément cette quiétude à ceux qui l'entourent. Créature placide, caractérisé par son sang-froid et par sa douceur suave et rafraîchissante, il ne panique jamais. S'il devait perdre partie de son calme apparent, c'est que la situation serait certainement très grave.

C'est loin d'être un trait de caractère principal, mais Boréal n'est pas complètement au-dessus de farces occasionnelles, légères et bienveillantes, lorsque ces dernières lui viennent spontanément. Cela fait longtemps qu'il n'a plus l'énergie d'une jeune fée. Ses amicales plaisanteries se manifestent exclusivement dans son usage des mots.

Tout est blanc dans l'apparence de Boréal, de ses longues vagues de cheveux à sa peau diaphane en passant par la quasi intégralité de sa garde robe. Ses yeux eux-mêmes présentent une couleur irréelle : un ivoire tirant sur le gris qui fait l'exploit de ne pas paraître dérangeant, mais de plutôt renforcer l'impression de délicatesse qui se dégage du visage autant que de la silhouette longue et fine de l'Alcyonien. Des lueurs vertes, cyan et mauves dansent constamment dans ses yeux, de la même manière que certains grains de sa poussière se détachent du bleu dominant - propre aux fées des neiges - pour prendre ces mêmes teintes. Son aura immaculée tire sur un bleu glacial mais paradoxalement réjouissant.

Ses ailes sont constituées d'un entrelacs de tiges de givre qui se dénouent sur leur extrémité. Assez larges quand elles sont déployées, elle sont plus discrètes quand il les replie. Elles sont froides mais ne fondent pas et ne laissent aucune humidité sur la paume lorsqu'on les touche. Lorsqu'elles bougent, les arabesques et stalactites de glace s'entrechoquent et produisent des tintements cristallins. S'il se concentre il est cela dit capable d'empêcher les constituants de ses ailes de se déplacer. Il peut donc tout de même se montrer furtif à l'envie.

Boréal est une force tranquille, disposant d'une prestance généralement affable et bienveillante mais si la situation l'exige, il peut se vêtir d'un sérieux marmoréen qui rend sa présence intimidante. Lorsqu'il utilise ses pouvoirs de froid, son corps et ses cheveux tout entiers changent de couleur et tirent sur un bleu polaire qui perd de sa paradoxale vibrance réconfortante et lui offre une silhouette inquiétante (si Eclipse était en mesure de le voir dans cet état, il lui trouverait sans doute des points communs avec Galadriel quand elle s'énerve un peu).

Il a l'impression d'avoir vécu très, très longtemps. Certaines routines le lassent, et le poids des jours et des pertes cumulées n'est pas si facile à porter tout le temps. S'il est un doyen parmi les fées il a bien conscience de n'avoir existé qu'une fraction de la vie de Mab et d'Obéron - toujours aussi fringants qu'au premier jour où il les a connus, contrairement à lui qui commence doucement à décliner. Il plaisante souvent de cet écart de vieillissement pour dédramatiser la situation, même si ça ne fait parfois rire que lui. Il sait pour avoir eu l'aveu de la Reine en marge de quelques cérémonies funéraires qu'elle ressent ce même poids, à un niveau bien au-dessus de tout ce qu'il pourra jamais connaître. C'est une douleur qui les rapproche. Boréal est par ailleurs désolé de ce que les premiers signes de son déclin peuvent réveiller comme mauvais souvenirs chez ceux qui n'ont vu ce schéma se répéter que trop souvent.

Il sait qu'il est bien plus proche de la fin que du début (même s'il n'est pas mourant pour autant). Ca ne l'effraie pas, il accepte ce destin avec le même calme résilient que tout le reste de ce qui lui arrive généralement. Il est en revanche un peu contrarié de se rendre compte qu'il peut moins en faire qu'avant. S'il s'oblige souvent au repos, ça n'est jamais de gaieté de cœur.

Boréal parvient à nouveau à aller sur le terrain mais ça ne signifie pas qu'il a entièrement dépassé son traumatisme. Son calme et sa maîtrise sont mis à rude épreuve lorsque certaines dangereuses situations surviennent. Surprotecteur avec les siens, l'Alcyonien est susceptible de réagir sur des coups de tête qui lui ressemblent peu, de trop en faire, de se mettre en danger ainsi que la stratégie établie. Le mieux est l'ennemi du bien.

Extrêmement modeste, trop modeste, il a tendance à ne rien faire pour lui, à ne faire aucun cas de ce qui peut lui arriver. Ce n'est que pour préserver ceux qui tiennent à lui s'il prend soin de lui - le minimum syndical. Si ça ne tenait qu'à Boréal, il forcerait en permanence. Il est très exigeant envers lui-même. Trop perfectionniste pour les choses qui selon lui comptent. Son altruisme n'a jamais été complètement sain, et c'est pire depuis l'attaque du tigre de glace. Si Boréal semble tout prendre avec facilité, et s'il semble impossible à vexer - même si on peut le décevoir lorsqu'on bafoue ses valeurs - c'est peut-être aussi qu'il n'a qu'une très faible estime de lui-même.

Lorsqu'il a vraiment beaucoup forcé, ses périodes de récupération peuvent devenir assez longues, ponctuées de malaises. De façon générale, il dort beaucoup plus qu'avant. Lui qui avait un sommeil léger qui lui permettait d'être vif au moindre bruit suspect ne serait désormais plus réveillé si une fanfare jouait devant sa porte - et ça le contrarie pas mal, il faut bien l'avouer.

La mort de l'enfant-fée qu'il n'a pas réussi à sauver n'est pas sans lien avec la façon dont il a par la suite eu tendance à prendre sous son aile de nombreux jeunes protégés. Il n'en a pas conscience, mais c'est aussi une manière pour lui de s'excuser, de se rattraper perpétuellement pour son échec.

Boréal est complètement aromantique, au point de ne pas vraiment posséder les codes - qu'ils soient humains ou fée. Il a beau être sage, ce domaine lui a toujours échappé (et il a d'ailleurs déjà mis pas mal de râteaux sans même s'en rendre compte). Ce qui le chagrine un peu, c'est qu'il a beau essayer, il n'est pas forcément capable de répondre aux questions de ses protégés quand ils ont besoin de conseils à ce genre de sujets. Ca a déjà causé des problèmes. Il exècre réellement lorsqu'il leur fait défaut. Après tout, c'est à eux - puis à son peuple au sens plus large du terme - qu'il a décidé de vouer son existence entière.

Très secret, il ne parle vraiment - personnellement - de lui qu'à très peu de gens (globalement Mab, Obéron, éventuellement quelques amis qui le connaissent d'avant qu'il soit haut-conseiller). Même ses protégés n'en connaissent qu'assez peu sur lui, malgré toute l'affection et toute la bienveillance qu'il leur prodigue.

Il est aussi très pudique. On ne le verra jamais que très habillé. Les marques sur son corps parlent trop de lui, il n'aime pas qu'elle soient vues par autrui.

Son compagnon - il ne lui viendrait pas à l'idée de parler de monture - est une colombe nommée Aurore. Où ça, un trait d'humour ?

Boréal a tendance à limiter ses actions "de terrain", non pas parce qu'il s'y débrouille mal - au contraire, il y évolue avec une aisance que beaucoup de fées qui le connaissent mal trouvent étonnante - mais parce qu'il commence à accuser le coup de son âge important. Il s'épuise plus facilement qu'avant. S'il force vraiment trop, il pourra avoir besoin de prendre du temps pour récupérer avant de retrouver son rythme habituel. Lorsqu'il a besoin de se ressourcer, Boréal déserte sur des périodes plus ou moins étendues le Palais et va se réfugier dans sa demeure de l'Archeglace. Il reste néanmoins disponible à tout moment si on a besoin de lui.

Les fées les moins renseignées (et les plus jugeantes, généralement des aristocrates étrangement) pensent effectivement que Boréal est un "gratte-papier" et qu'il doit se montrer peu compétent lorsqu'il est amené à partir en mission à l'extérieur du Palais et des Archevilles. Elles sont souvent étonnées de constater que le sage Alcyonien n'a pas les mains si douces. Il a en réalité fait partie des fées-chevalier en son temps et est plus qu'à même de se défendre et de prendre des décisions stratégiques dans le feu de l'action. Boréal fera toujours ce qui sied à la Reine... ce qui implique qu'il soit moins souvent dehors qu'il le pourrait. Il fait en sorte d'être raisonnable, mais il n'est pas non plus en déambulateur. Si sa présence est requise quelque part dehors, il n'hésite pas à sortir non plus.

Lorsqu'il était fée-chevalier, Boréal a gagné la confiance d'un peuple de créatures insectoïdes : les fourmis forgeuses. De taille égale à celle d'une fée adulte, elles vivent dans des galeries creusées dans le sol du Bois Joli. Ce sont des créatures très méfiantes, même à l'égard des fées. Profitant du lien privilégié qu'il a tissé avec elles, Boréal continue de les visiter régulièrement avec une escouade et de leur apporter son aide pour réguler et tenir à distance leurs ennemis naturels : les termicendres, parasites ne disposant d'aucunes facultés de réflexion qui venus d'autres galeries infiltrent la fourmilière, attaquent les âmes qu'elles croisent, et font régulièrement des ravages importants. En échange de cette assistance, les fourmis forgeuses procurent aux fées un métal très résistant qu'elles produisent en mélangeant leurs secrétions aux minerais qu'elles déterrent, et qui permet de créer des armes féériques très solides malgré leur taille par essence restreinte.

Boréal a toujours été une oreille attentive. L'âge l'a rendu sage et expérimenté dans des domaines variés. Il est aussi très patient et fait un bon pédagogue. Lorsqu'il n'est pas occupé à des tâches plus importantes, il se fait un plaisir d'instruire les plus jeunes fées aux divers arts qu'il leur est nécessaire de maîtriser - c'est d'autant plus vrai depuis que ce rôle a été institutionnalisé lors de la Pluie Salée. Lors de la Réforme il s'est largement prononcé pour la création du rôle de mentor destiné à guider les jeunes fées. Du moment où cela a été acté, il s'est lui-même très vite porté volontaire pour le devenir.

Le tigre des glaces qui a décimé son équipe peu de temps avant qu'il quitte son poste de chevalier a laissé une longue marque de lacération dans son dos. La cicatrice reste invisible sous ses vêtements. La magie de l'animal - alimentée par celle de Boréal - y est encore infusée. La marque émet donc une lueur cyan perpétuelle.

Lors de cet épisode, ses décisions ont provoqué la mort de ses quatre compagnons, dont il se sent donc directement responsable. Deux fées avec lesquelles il était très ami étaient notamment présentes : la fée des feux Fournaise et et la fée des forêts Palissandre. Boréal avait par ailleurs tenté de dissuader Fournaise de s'impliquer dans cette mission ayant lieu sur le sommet enneigé - lieu particulièrement hostile à son espèce de fée - mais Fournaise a tant insisté qu'il a capitulé.  

Initialement comme rappel constant de sa faute, puis en guise de souvenir plus doux de ses amis perdus, Boréal a récupéré un objet ayant appartenu à chacun de ses compagnons décimés. Il a notamment gardé de Fournaise une pierre de lave et de Palissandre, un morceau du bois qui lui a donné son nom. Il garde ces deux objets accrochés par une chaine autour de son cou qui reste sous ses vêtements. Très peu de personnes sont au courant de ce détail qui n'a pas vocation à être partagé.

Boréal a à cœur de protéger la vie de toute fée qui serait mise sous sa responsabilité directe. Il serait hors de question qu'un nouveau compagnon meure de sa faute. L'Alcyonien serait capable du plus grand sacrifice pour empêcher cela d'arriver à nouveau.

Longtemps restée rangée à l'abri des regards, son épée est légèrement plus large qu'une rapière. Constituée d'un métal blanc qui conduit très bien le froid, elle luit et émet des vapeurs telles celles de l'azote liquide quand il applique sa magie sur la lame (par l'intermédiaire de la main qui la tient). Elle porte le nom d'Absolue, en référence au zéro absolu. Boréal ne s'est longtemps plus senti digne de la porter à sa ceinture ce qui explique qu'elle n'y soit revenue que durant la Pluie Salée (lorsqu'il a repris la tête de certaines équipes de guerriers). Entre sa démission des fées-chevalier et la Pluie Salée, même lorsqu'il enseignait l'escrime à d'autres fées, Boréal utilisait des rapières standard mises à sa disposition - de toute façon moins dangereuses à utiliser dans le cadre d'un entraînement.

Fée ancienne et Haut-Conseiller depuis désormais très longtemps, Boréal s'est naturellement rapproché de la Reine Mab, mais aussi d'Obéron avec lequel il s'est toujours très bien entendu (même lorsqu'il n'était encore que fée-chevalier). Ils partagent de nombreux avis et points communs qui les ont progressivement amenés à développer une amitié que les humains qualifieraient de fraternelle. A une époque où Obéron ne savait pas encore manier l'épée, Boréal lui a enseigné ce qu'il savait.

A l'époque où les fées de l'Ordinaire visitaient encore l'Île régulièrement, Boréal a connu Titania, laquelle essayait souvent de le convaincre de glisser quelques mots en sa faveur à Obéron (... ce qui n'a jamais vraiment fonctionné, même si Boréal est toujours resté complaisant et ne lui a jamais répondu par un refus frontal).

Boréal a connu Flammèche lorsqu'elle est devenue haute-conseillère et son caractère impétueux lui a immédiatement rappelé celui de son amie Fournaise, tombée au combat. C'est pourquoi sans même s'en rendre compte, il se montre plus doux avec Flammèche qu'il ne l'aurait (déjà) été naturellement. Par instinct, si la situation venait à le nécessiter, il éprouverait le besoin particulièrement prononcé d'empêcher qu'il lui arrive le moindre mal.

Boréal a connu Absinthe lorsqu'elle était encore très jeune, fourrée dans les jambes d'Obéron. Les jeunes fées l'ont toujours attendri et il est souvent arrivé qu'Absinthe l'amuse d'une manière ou d'une autre : en venant lui montrer ses progrès dans l'art de la révérence - il ne manquait alors pas de la féliciter - ou bien en mettant à l'œuvre ses tendances facétieuses. Boréal étant lui-même, il n'a pas pu s'empêcher de lui glisser quelques suggestions de farces dans l'oreille... Jamais rien de bien méchant, car l'Alcyonien est tout sauf un être malveillant. Chaque réussite était félicitée par un clin d'œil discret. Boréal et Absinthe ont gardé une bonne relation, la seconde venant souvent raconter ses frasques au premier - qui a le rire facile et le jugement peu prompt. L'Alcyonien éprouve pour elle l'affection lointaine d'un aîné pour une jeune âme qu'il a vu grandir (les humains y verraient sans doute un parallèle avec une sorte de relation oncle/nièce).

Boréal est proche de l'actuelle gouverneuse de l'Archeglace en cela qu'il l'a beaucoup guidée lorsqu'elle était plus jeune et qu'il comptait sur elle pour prendre des responsabilités durant ses absences du sommet enneigé. Elle a pris Verglas sous son aile et la jeune fée lui a donné du fil à retordre. Boréal tentait lorsqu'il en avait les moyens d'aider à apaiser Verglas mais ses passages n'étaient jamais suffisamment longs pour produire un effet durable. La gouverneuse en devenir ne sachant plus quoi faire pour réguler son protégé, elle décida de l'envoyer à la Citadelle - elle se convainquit aussi que vivre parmi la haute-société lui permettrait d'aller plus loin dans son évolution personnelle. Boréal n'a pas franchement approuvé cette décision qu'il jugeait trop brutale et trop absolue, Verglas n'ayant pas eu son mot à dire sur la question, et les justifications invoquées ne correspondant pas à ses valeurs. Mis devant le fait accompli, il se serait certainement proposé pour s'occuper de Verglas si il n'avait pas déjà eu les bras pris. Il suggéra alors la tutelle d'Obéron et sa proposition fut acceptée. Il passait voir Verglas (ainsi qu'Obéron et Absinthe) très régulièrement.

Anecdote qui peut surprendre lorsqu'on connaît les personnalités très disparates de ces deux fées : Boréal s'est occupé d'Opium lorsqu'il était plus jeune. Boréal a rencontré Opium par hasard tandis qu'il jouait avec un fleuret en s'imaginant protagoniste de grandes scènes épiques. Amusé, l'Alcyonien qui transportait justement une rapière d'entraînement s'est prêté au jeu, improvisant finalement un premier cours d'escrime. Il a été vite nécessaire de faire comprendre à Opium le danger réel des combats pour s'assurer qu'aucune catastrophe n'arrive. Alors que leurs interactions devenaient plus régulières, leur relation a finalement évolué vers un lien de (pseudo-)mentorat atypique, qui ne ressemble à rien de ce que Boréal a connu avec les protégés qu'il a pu avoir avant ou après Opium. L'Alcyonien a très vite compris que le Narcisse, même enfant, possédait déjà une vision de la vie bien à lui sur laquelle il ne pourrait que très peu influer. Boréal a pris et prend encore la chose avec humour et philosophie. Il lui a appris l'escrime et s'est assuré qu'il ait suffisamment de plomb dans la tête pour ne pas être tenté de se ruer au casse-pipe par héroïsme inconscient. Tout le reste de ce qui a pu rentrer dans sa tête dure est un bonus. Boréal dit souvent pour plaisanter qu'Opium s'est "globalement élevé tout seul". Ce qui n'est qu'à moitié une plaisanterie.

Il existe une complicité entre Boréal et la Reine Mab que le temps a permis de développer. Ils se font une confiance mutuelle et partagent souvent des avis similaires - ainsi qu'une certaine forme d'humour. Pendant les réunions du Conseil, lorsque le ton s'enflamme, l'un comme l'autre a tendance à rester en retrait. Ils profitent occasionnellement de ce moment pour faire des paris entre eux sur l'issue des discussions. Notons par ailleurs que ni l'un ni l'autre ne joue pour gagner. Ils sont capables de tenir un pari qu'ils savent probablement perdu d'avance, c'est vraiment juste la dynamique de ce jeu qui les amusent.

Lorsque Mab a nommé Opium Grand Intendant, chose que personne d'autre qu'eux deux ne sait, ils ont aussi parié pour savoir si le Narcisse allait parvenir à garder son rôle. Boréal a gagné ce duel ci (même s'il aurait préféré le perdre). Boréal s'est naturellement proposé pour endosser les responsabilités du Grand Intendant le temps d'en trouver un nouveau (il fallait quelqu'un pour le faire, et comme ils se sont amusés de la situation, l'Alcyonien considère que Mab et lui-même avaient leur part de responsabilité dans cette affaire, qu'il leur fallait assumer). C'est dans cette courte période que Verglas a été envoyé à la Citadelle par la future gouverneuse des glaces, ce qui explique que Boréal n'ait pas pu s'occuper de lui personnellement : il avait déjà trop à faire.

C'est une question qui se pose peu, car c'est là que se trouve mon Royaume et là que vont toutes mes allégeances, ainsi que presque toutes mes sympathies. L'Île - et avant tout la sauvegarde du peuple féérique - prévalent sur tout le reste.

Un intérêt restreint qui se limite aux tâches courantes qui doivent y être menées, ainsi qu'aux fées qui l'habitent. Ses paysages immenses ont pu m'impressionner autrefois, mais j'en suis revenu. J'ai à coeur la protection de l'Ordinaire et des saisons, mais j'éprouve plus d'affection pour mon pays et les âmes qui l'habitent que je ne le ferai jamais pour l'univers au-delà du Jamais.

Peter Pan est nécessaire. Je le respecte en cette qualité, et parce qu'il a l'affection de notre souveraine. Sa nature approchant celle du peuple féérique m'enjoindrait à lui porter une affection moins mitigée si nombre de ses comportements rapportés n'étaient pas si semblables à ceux des pires représentants de l'humanité.

Soit dit en passant, l'humanité ne m'inspire aucune répugnance particulière prise dans sa globalité. En revanche, elle m'intéresse peu, quoique j'éprouve parfois de la tendresse pour les très jeunes enfants qui en font partie. Je ne souhaite aucun mal aux humains et trouve immoral et modestement contrariant qu'il leur en soit fait s'ils ne l'ont pas mérité, en revanche, mon peuple passe avant tout le reste, quoiqu'il en coûte et quoique ça implique - de ma main, ou de celle d'autrui. Hook comme le reste des humains m'indiffère. Je ne lui voue pas une haine particulière, ce qui ne m'empêche pas de le trouver antipathique. Il fait partie de ces humains qui pour leurs actions ne méritent que le mépris.

Boréal est né à une époque qui pour les fées commence à devenir ancienne. Il a été fée-chevalier, mais a démissionné de son poste suite à l'échec dévastateur d'une mission dont il s'est jugé coupable. Bien qu'il ait fallu le convaincre qu'il méritait ce nouveau départ, Mab l'a nommé Haut-Conseiller peu de temps après, une fois sa convalescence terminée. Il occupait déjà ce poste avant l'intrigue 1.

L'Invasion de Cauchemars correspond à une période de la vie de Boréal où son sang-froid notoire a été mis à rude épreuve. En effet, les songes l'obligeaient à revivre constamment la débâcle à l'origine de sa reconversion. C'est une période à la fin de laquelle il avait aussi plus de travail que d'habitude (cela dit, avoir l'esprit très occupé lui permettait de se distraire plus efficacement des idées noires). S'il était plus tendu et fatigué qu'en temps normal, cela se voyait peu (très résilient, il prenait beaucoup sur lui). En tant que fée des neiges, habitué des reliefs de la montagne et parfaitement à l'aise avec son climat, il a tenu à participer à l'expédition du Sommet Enneigé. Lors de l'avalanche, Boréal est resté en arrière pour secourir fées et enfants ensevelis - il a œuvré pour en sauver le plus possible, même si certains sont restés disparus.

Lors de la malédiction de l'Esprit Loup, Boréal continue d'exercer ses fonctions normales au sein de la Citadelle. La disparition d'Obéron après qu'il se fut rendu sur place pour observer l'évolution de la Sylve Obscure l'inquiète au point qu'il perd partie de sa sérénité caractéristique et envisage de partir à sa recherche. Mab s'en rend immédiatement compte et décide de l'accompagner. Ils partent seuls, et Boréal fait une exception : il dépoussière très provisoirement Absolue pour être sûr de mettre toutes les chances de leur côté. Mab et Boréal parviennent à ramener Obéron au Palais, où atteint par la Corruption il doit être soigné et entame une longue convalescence. Mab et Boréal se relaient à son chevet. Cet épisode lève partiellement le blocage de Boréal qui était à deux doigts de prendre la tête d'une escouade pour partir chercher Obéron et l'aurait certainement fait si Mab n'avait pas choisi de l'accompagner.

Durant la Nuit des Horreurs, Boréal est principalement resté dans son rôle de conseiller. Mab n'étant pas au meilleur de sa forme, il a fait de son mieux pour assister Obéron de sorte à (essayer d') éviter qu'il n'en porte trop sur ses seules épaules.

Lors de la Canicule, la chaleur étouffante qui s'installe révèle les premiers signes de déclin de Boréal - son organisme réagit exagérément mal aux températures. Mab le renvoie derechef au Sommet Enneigé où il se réfugie. Il continue cependant à communiquer avec la Citadelle par messages et par l'intermédiaire d'Aurore.

La Pluie Salée signe son retour à la Citadelle et c'est tant mieux, car il y a fort à faire. La Reine aidée du Conseil construit et applique la Réforme. Boréal passe définitivement à autre chose et sort Absolue de l'endroit où il l'a rangée depuis sa démission de l'ordre des fée-chevaliers (à une excursion près). Elle reste désormais constamment à sa ceinture. Les fées les plus jeunes et les moins renseignées se moquent, doutant des capacités de Boréal en terme de combat et de commandement. Celles qui témoignent de ce qu'il en est vraiment sont surprises de le découvrir sous un autre jour. Boréal s'applique à deux tâches particulières : la première, rendre à nouveau des visites régulières aux fourmis forgeuses et échanger leur métal contre les services de son escouade de sorte à créer les armes dont chacun aura besoin désormais. La seconde, entraîner au combat bien plus de fées qu'il ne l'a fait jusqu'à présent. Il est très actif et son corps accuse parfois le coup de la charge qu'il lui impose. Mab lui demande de ne pas participer aux expéditions qui ont lieu dans l'Ordinaire afin de ne pas empirer son épuisement, ce à quoi il consent sans discuter. Le sel lui arrache l'une des jeunes fées qu'il a pris à sa charge, ce qui l'attriste profondément - comme à son habitude, il le montre peu.

Pendant le Givre, la Reine charge Boréal de missions consistant à évaluer régulièrement l'évolution des frontières entre terrain sain et terrain contaminé. L'Alcyonien étant plus vaillant durant cette période, il peut se dépenser en risquant moins de conséquences qu'en temps normal. Il ne prend pas avec lui son escouade habituelle, préférant opter pour un groupe entièrement constitué de fées des neiges - les plus épargnées par le climat durant cette période si particulière. Lors de l'expédition dans l'Ordinaire la Reine insiste encore pour qu'il reste au Palais, cette fois en tant que membre du Conseil, destiné à aider le Prince Ciel dans sa régence en l'absence de Mab et d'Obéron.

Avec le beau temps qui revient la santé de Boréal se fait à nouveau moins vaillante. Cependant, il est encore loin d'être mourant. Ses responsabilités deviennent plus lourdes à la Citadelle : il est le doyen du Haut-Conseil en l'absence de Mab (inconsciente) et d'Obéron (en charge des nouvelles fées, à l'Archefleur). Ses visites aux fourmis forgeuses sont brièvement stoppées mais reprendront proportionnellement à la réduction de ses charges au Palais.

Les fées les plus anciennes se rappelleront sans doute des temps où le nom de Boréal était directement associé au tranchant implacable de son épée. L'Alcyonien était alors un guerrier féroce, bien que toujours tendre et concerné par le bien-être de ses coéquipiers. Il se distingua parmi les fées-chevalier et devint un chef d'escouade renommé.

Tout cela se passe bien avant que les cauchemars ne s'emparent de l'Île de Jamais, et c'est aussi avant cela que tout cessa.

C'était une mission réalisée dans l'urgence. Une très jeune fée des feux avait par curiosité fait l'erreur de fuir son confortable volcan pour aller visiter le second sommet de l'Île malgré l'environnement glacial, hostile à son élément. Elle n'était pas revenue de son exploration. Boréal et son équipe furent dépêchés sur place.

La vie de l'enfant était en jeu et vint un moment où le chef d'escouade dût faire un choix entre deux itinéraires : l'un plus long, plus sûr, l'autre rapide mais potentiellement risqué. Il s'agissait de passer au travers de l'antre d'un tigre des glaces particulièrement brutal, connu pour avoir ôté la vie à de nombreuses fées imprudentes.

Boréal fit le choix du danger, persuadé que celui-ci serait minime. En effet, la neige tombait dru à l'entrée de la grotte. Un blizzard était en train de se préparer. Le tigre, préférant des climats plus doux, ne restait généralement pas en altitude lorsqu'une tempête arrivait. Il préférait rejoindre sa seconde tanière, creusée sous les racines gelées d'un arbre millénaire qui se dressait plus bas sur la montagne.

Pas cette fois, cependant. Boréal et les siens se firent surprendre par la chimère des neiges et ce fut une débâcle sans précédent. L'animal redoutable eut raison des cinq chevaliers du groupe. Boréal, seule fée des neiges parmi ceux-ci, plus résistant contre le souffle gelé que la bête leur crachait au visage, fut le seul survivant. Triste conséquence ajoutant à ce drame : on ne retrouva jamais l'enfant fée perdu.

C'était l'œuvre de la malchance et Boréal avait en soi pris les décisions les plus sensées, mais le chevalier était incapable de voir les choses ainsi. Extrêmement coupable d'avoir causé la mort des compagnons qui lui faisaient confiance et de la jeune fée qu'il était venu sauver, il décida d'abandonner son poste. La Reine Mab fut celle grâce à qui il dépassa ce coup dur. Confiante en son jugement ainsi qu'en ses capacités, elle lui proposa le poste de haut-conseiller des glaces, qu'il accepta après beaucoup d'hésitation et suite à une longue discussion.

Pendant très longtemps, Boréal refusa de prendre les armes à nouveau, si ce n'est pour enseigner aux fées qui voulaient s'instruire aux arts de l'épée.

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Le vent à cette altitude était assourdissant. Il giflait son visage et emportait ses cheveux au gré des bourrasques glaciales. Au-delà de la roche saillante sur laquelle l'Alcyonien était installé s'etendait un précipice blanc. En face, un flanc de montagne lointain sur lequel couraient les scintillements somptueux d'un glacier. Il inspira, gonflant ses poumons de l'air gelé du Sommet. Chaque bouffée supplémentaire le revitalisait un peu.

La Montagne était telle qu'il l'avait toujours connue. Sereine, fabuleuse, implacable. Il y avait une époque où il lui arrivait encore d'y flâner pour profiter de sa seule beauté, mais désormais, il était devenu bien rare qu'il fut aussi oisif. Cette contemplation sans objet le mettait face à deux abysses : celui qu'il y avait sous lui, et celui qu'il y avait à l'intérieur de lui, au fond duquel se terraient ses plus anciens souvenirs.

Des souvenirs qui lui paraissaient effectivement si vieux que parfois, il avait l'impression d'en être détaché, comme s'il n'en avait pas entièrement été le protagoniste. Comment faisaient ceux qui avaient vécu une infinité de vies semblables à la sienne pour supporter le poids de l'éternité ? C'était quelque chose qu'il ne pourrait jamais concevoir, et qu'ils ne pouvaient certainement pas expliquer.

Boréal avait passé le début de la journée appliqué à rédiger les rapports habituels, mais il lui avait fallu écourter sa session et en reporter l'achèvement à plus tard. Sa main droite était encore bien faible, secouée de tremblements dès qu'il en sollicitait trop les muscles. Ainsi tout effort d'écriture conséquent lui était à l'heure actuelle impossible. La canicule naissante avait mis son organisme à rude épreuve. Son endurance ne lui revenait qu'à vitesse très lente. Cette faiblesse ne ressemblait en rien à ce qu'il avait déjà connu par fortes chaleurs, à d'autres occasions.

Peut-être cela avait-il réellement commencé.
Il avait beaucoup vécu, après tout. Ca aurait été cohérent.

Un point blanc  apparut dans le ciel et se mit à grossir jusqu'à prendre la forme d'une silhouette connue. Boréal leva le nez. Dans d'autres circonstances, il se serait peut-être redressé, il aurait déployé ses ailes et se serait envolé pour aller à la rencontre d'Aurore. Son corps lui paraissait encore trop lourd, en comparaison de sa tête trop légère. Il décida donc plutôt d'attendre que la colombe arrive à son niveau. L'oiseau atterrit à proximité de Boréal qui flatta sa tête et récupéra le rouleau coincé dans son bec. C'est avec un sourire dans la voix, les yeux pétillants de malice, que l'Alcyonien commenta en direction de l'oiseau :

"Te voilà, Aurore... Je ne suis pas certain que notre Messager officiel serait très heureux de constater que tu lui voles la vedette."

La colombe émit une sorte de roucoulement faussement choqué en guise de réponse, qui arracha à Boréal un éclat de rire doux.

"Certes, il t'est peut-être reconnaissant. Je doute que cet endroit fasse partie de ses étapes préférées."

Que la lettre contienne des nouvelles amicales ou quelque travail à accomplir qui viendrait couper la monotonie de sa contrariante retraite, Boréal en prendrait connaissance plus tard. Il se tourna plutôt vers l'oiseau qui commençait déjà à greloter de froid.

"Je suis rassuré de constater que tu te portes bien. Malheureusement je pense que tu ne devrais pas t'éterniser ici. Prend ces feuillets si tu veux bien et transmet les à la Citadelle, d'accord ?"

Un bruissement contrarié, auquel Boréal répondit par sa douceur habituelle, agrémentée d'un sourire contri.

"Ca ne me plaît pas beaucoup non plus. Mais cette situation aura une fin, Aurore. Sois patiente, nous en sortirons."

Suite à quelques derniers échanges et quelques dernières caresses sur le bec, l'oiseau s'envola avec son nouveau chargement. Mélancolique, Boréal observa son amie partir. Il aurait voulu passer plus de temps avec elle, mais la situation ne le permettait pas. Il lui tardait d'être en mesure de reprendre ses aller-retours entre la Citadelle et le Sommet Enneigé, mais il ne lui serait pas venu à l'idée de se plaindre. Son devoir était de rester ici autant de temps qu'il le faudrait. C'était le seul endroit où il ne serait pas un fardeau pour la Reine, pour Obéron, ni pour ses collègues. Il n'aiderait personne en leur claquant entre les doigts.

"Voyons ce que ça donne..."

L'Alcyonien prit un temps qu'il jugeait indécent à se redresser. Il se sentait lent et maladroit, c'était une sensation déplaisante qui, il l'espérait, disparaîtrait suite à quelques jours de repos supplémentaires. Ses ailes se déployèrent dans un concert de tintements glacés. Il s'envola pour aller se mettre à l'abri plus à l'écart du gouffre, là où le vent ne risquait pas de lui arracher la missive des mains quand il l'ouvrirait.