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Juniper
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MessageSujet: Last year I abstained, this year I devour   Last year I abstained, this year I devour EmptySam 23 Jan 2021 - 17:43

La collection de polaroids, de photos délavées, parfois floues, parfois orientées vers un coin où il n’y a rien de spécial, ça ne comble pas l’absence du jour. Imaginer le soleil, c’est pas si compliqué—c’est juste un orbe gigantesque, qui contrôle l’univers. Le sentir contre sa peau, ce frisson lorsqu’on s’allonge devant une fenêtre, laissant les rayons courir sur sa peau, ça c’est juste une invitation à la mort. June ne dira pas que ça lui poserait un problème, que vivre est plus qu’une fatalité. Il n’y a d’éternel que les regrets, qu’importe qu’on en vienne à les oublier, la mélancolie reste, continuant à se jouer de nos souvenirs bâclés et brouillons. Ah ! L’encre sur ses doigts a séché, s’est incrustée aussi profondément que possible dans les chairs trop pâles et June ne s’est pas embêté à l’enlever.

Perte de temps, hein ? Après tout, ses manies sont souvent synonymes de tâches et d’une ruine qui s’étend de ses vêtements à sa chevelure. Encre, sang, quelle importance, tout s’accroche jusqu’à ce qu’il frotte une peau qui n’a plus vraiment de réaction. Les idées suivent le même principe, fragments de phrases, de concepts pour des poèmes que June n’a pas la volonté d’écrire, qui s’agglutinent jusqu’à ne former qu’une sorte d’ode permanent au désespoir et à l’amour déchu.

Ce n’est pas bien étrange, de le voir déambuler en une masse un peu collante, totalement dégueulasse serait un terme plus approprié, qui s’est offert un instant de repos au fin fond de l’âme d’autrui. Pas différent de son cercueil, dans le fond, uniquement dans la forme, dans l’effort inexistant qu’il faut fournir pour mettre à mal une cage thoracique la transformant en une cage d’os dans laquelle June est à l’aise. Et si on lui disait ‘oh quelque chose ne va pas chez toi, même pour un vampire, ton esprit est si rouillé qu’il est devenu autre chose’, June écrirait que l’âme n’est qu’un oiseau que l’on a enfermé et qui n’hésitera pas à arracher la langue du maître avec son bec à la première occasion.

Le sens derrière ce qu’il écrit, derrière les pensées qui s’emmêlent et le laissent absent, apathie qui le fait jouer avec le bout de ses manches sans se soucier que le pull soit devenu informe et impossible à sauver. Même en le faisant bouillir, les marques resteront, et c’est pareil pour son corps, pour sa tête aussi, certainement. Marchant d’un pas absent, asymétrie causée par son genou sur lequel il n’ose s’appuyer, June s’égare—le soleil est trop loin, un but inatteignable et il n’a guère l’intention de se faire enfermer de force pour une pointe de folie.

La nuit est jeune, sublime et éternelle ; elle est ce qui s’étend des étoiles au sol sous ses pieds, aux carcasses fraîches qu’il laisse derrière lui à ces créatures éternelles qui restent au milieu de l’Ossuaire. Les légendes, les dires des diurnes, des vivants, au sujet de la mort qui ne supporterait pas d’être troublée, cela ne lui fait pas grand-chose. Là est son problème, sa constante, l’absence d’intérêt, émotions étouffées et laissées pour mortes dans une foret—June évite le Bois Joli qui n’a de beau que le nom, il fuit aux arbres qui l’entourent, aux adultes qui ne cherchent qu’à—ah, dans le fond, lui aussi est un monstre. Juste pas un de ceux-là.

Le Garçon n’a pas découvert ce qu’il cherchait, sinon il ne continuerait pas à se déplacer. June se contente de suivre, de loin, ne s’étant pas encore fait repérer—la faute au sol qui étouffe ses pas, aux ossements par-dessus lesquels il sautille, sans faire de bruit. Son silence est majestueux, pour le coup. Est-ce que Dracula serait fier ? Est-ce que ça lui importe, d’être un bon gosse, quand il y est pas comme eux, pas un d’ces riches qui savent bien parler et bien être—ah voilà que le Français revient, se terrant dans un coin. June triture encore ses manches, qui ont cessé de goutter derrière lui, d’une main couverte de laine, il fait tomber quelques mèches rendues épaisses par le sang devant ses yeux ; pas qu’il n’a pas déjà mangé, juste que courir après la nourriture, ça ne lui plaît pas. Le Garçon, si petit, si sec aussi, avançant avec une énergie que June n’a jamais possédé, ne s’est pas encore retourné. Et il serait incapable de dire si ça n’a duré qu’un instant ou une vie entière.

Les humains n’écoutent pas, cachent leurs yeux, couvrent leurs oreilles, jusqu’à ce que quelqu’un soit mort. C’est là, que tremblants, plein de terreur, ils se permettent de demander qui a causé un tel acte, alors que c’était eux.

Ennuyé, l’Apathique se glisse, pied droit qui presse contre un os, juste assez pour entendre un craquement. Ce n’est pas bien amusant, d’avancer sans but comme ça, d’avoir croisé le garçon après avoir éventré un natif dont l’unique crime a été de ne pas reconnaître son bourreau avant que ce dernier ne lui décoche un simple ‘bonjour’, suivi par un carnage. Sa manche est portée à ses lèvres, canines qui se plantent dans le tissu pour chasser un besoin incompréhensible de mordiller quelque chose. Le Garçon. Il doit le suivre. Il doit le forcer à se retourner.

Ensuite, il le tuera.







 
June
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MessageSujet: Re: Last year I abstained, this year I devour   Last year I abstained, this year I devour EmptyVen 29 Jan 2021 - 16:56

Une légère brise se lève et Skunk frissonne. La nuit est pourtant aussi douce que claire, suite logique d’une agréable journée printanière. Mais depuis (qu’il n’est plus Orbleu) la fin du Givre, le Dandy est devenu frileux; il porte son pull quasiment en permanence, s’assied trop près du feu, dort avec autant de couvertures qu’au début de l’Hiver. Il sait que ses mains sont juste un peu trop froides, aussi, tout comme ses iris sont encore juste un peu trop bleus. Ce n’est pas grand chose et pourtant c’est là, comme un rappel sourd mais permanent. Parfois, il se demande si tout cela va finir par disparaitre, s’il va redevenir complètement comme avant. Mais comme il sent bien le gouffre qui se dissimule dans cette question, il préfère ne pas trop y réfléchir.

De la main qui ne tient pas sa torche, il boutonne sa veste. Il regrette de ne pas avoir emporté son écharpe, mais il n’avait aucune raison de le faire lorsqu’il est parti ce matin-là, et en vérité il aurait dû rentrer longtemps avant la tombée de la nuit. L’Ossuaire n’est pas à côté du Grand Arbre, mais il ne justifie tout de même pas une expédition aussi longue. Pourtant, à chaque fois, Skunk y passe beaucoup trop de temps.

Il se gardera bien de le dire, parce que lui-même trouve cela gentiment ridicule, mais ramasser des os a toujours été l’une de ses tâches préférées.

Déjà parce qu’il apprécie le lieu en tant que tel, avec ses crânes de mammouths monstrueux et ses squelettes de dinosaures presque intacts, qui en font une sorte de somptueux musée gothique à ciel ouvert. Skunk aime y flâner, tenter de deviner l’espèce d’origine de chaque reste, jouer aux sept différences entre les créatures de l’Ordinaire et celles de l’imaginaire. Parfois il s’arrête, le temps de griffonner le croquis d’un squelette particulièrement énigmatique ou d’une mandibule spectaculaire.

En l’absence de témoin, Skunk se surprend même à s’amuser un peu, comme quand il joue les équilibristes le long d’antiques fémurs dix fois plus grands que lui, ou quand il dévale en courant des ossuaires aux allures de pierriers. Ce n’est pas comme dans la forêt, ici au moins il ne craint pas trop de se salir: les os, c’est poussiéreux mais propre. Même quand il les prend en main, il les trouve agréablement solides, lisses et légers. Il aime les tester, prendre son temps pour sélectionner les os plats qui feront de bons récipients, les os longs qui pourront être utilisés par les Artisans, ceux qui feront une bonne cendre qui servira dans les céramiques ou le verre de Nasty, les plus récents qu’on peut faire fondre pour obtenir de la colle...

Et il y a les jolies trouvailles, bien sûr, celles qui ne servent pas à grand chose mais qui font sa journée. Comme cette fois où il a déniché une grosse griffe courbée, presque aussi grande que sa main. Il l’a gardée et il aime en parler comme de sa griffe de vélociraptor, même si au fond il ne sait absolument pas à quel monstre elle a bien pu appartenir, et que cela lui a surtout fait cruellement découvrir que presque aucun de ses potes n’a eu l’occasion de voir Jurassic Park.

Néanmoins, ce soir-là, Skunk cherche quelque chose d’un peu plus spécifique qu’un morceau de dinosaure. Il a terminé sa récolte, qui leste son sac à dos. Mais il est tombé sur les restes du campement des réfugiés qui ont vécu là pendant l’Hiver - ils ont abandonné pas mal de choses derrière eux, dans leur joie et leur hâte de rentrer chez eux lors du dégel. Et Skunk s’est soudain rappelé que Apache y a oublié son précieux manteau rouge.

Le punk s’en est plaint à de multiples reprises, décrivant encore et encore la sublime beauté de sa défunte pelisse rutilante, comme s’il s’agissait d’une parure impériale. Skunk a écouté ses lamentations avec un agacement croissant, mais sans l’interrompre: après tout, il a ce point commun avec l’Hérissé qu’il tient énormément à ses vêtements, il peut comprendre. Et puis, d’une manière nettement moins avouable, le Dandy a un rapport particulier à ce manteau rouge, lui aussi.

Il l’a vu, en fait. Dans une autre vie, faite de glace et d’effroi. Il l’a vu, une fois, au loin, sur les épaules de ce garçon aux cheveux flamboyants, qui marchait dans un désert de glace en criant toujours les mêmes mots, en appelant toujours les mêmes noms. Ce garçon seul, ridiculement vulnérable. Une proie facile. Irrésistible.

Skunk l’a vu. Il l’a entendu. Et dans un effort de volonté qui lui a fait physiquement mal, il a fait demi-tour. Il a pivoté sur ses talons et s’est éclipsé dans le blizzard, avant que le garçon au manteau rouge ne le voie, avant que la proie ne l’approche et que la tentation de lui faire du mal ne devienne insurmontable.

Ce jour-là, Apache n’appelait pas seulement Trouble.

Alors oui, bêtement, Skunk a envie que l’Hérissé retrouve son manteau rouge. Il sait que le punk l’a déjà cherché, mais il sait aussi que cet idiot ne retrouve parfois pas son propre joint quand il est pendu à ses lèvres. Et c’est pour cela que le Dandy traîne encore au milieu des squelettes, à fouiller à la lumière de sa torche les huttes qui tombent en morceaux et les énormes crânes désertés. C’est idiot d’insister, il a froid, il fait noir et il ferait mieux de s’y remettre une autre fois. Mais c’est plus fort que lui, il cherche encore un peu, juste un peu, juste une cabane de plus, un dernier tas de débris.

Jusqu’à ce qu’il perçoive le craquement, dans son dos.

Skunk peut se montrer imprudent, mais il n’est pas inconscient : hélas pour lui, il sait très bien à quel point un Garçon Perdu est une proie pour quasiment tout le reste de l’Île. Dans le cas contraire, il ne passerait pas la moitié de ses nuits à rêver qu’une horreur quelconque le traque pour le dévorer. Alors même en terrain familier, il reste toujours vigilant, aux aguets, attentif au moindre signe qui pourrait trahir l’approche d’un prédateur, quel qu’il soit.

Il n’a rien entendu, à part cet unique craquement. Mais il comprend instantanément que le son est proche. Beaucoup trop proche.

Il fait volte face, torche levée, main sur le manche de son couteau.

Il ne s’attendait à rien de précis, mais il est tout de même surpris. La silhouette qui se tient juste là, peut-être à vingt mètres de lui, est bizarrement peu menaçante - humanoïde, taille moyenne, maigrichonne. Difficile de distinguer les détails à la seule lumière de la lune, mais cela pourrait être un (une?) jeune pirate aussi bien qu’un (une?) Perdu assez âgé. Les cheveux rabattus sur le visage et la manche portée à la bouche font juvéniles, mais sa parfaite immobilité, son profond silence ne cadrent pas avec un enfant. Et qu’est-ce qui coule de...

Skunk sent un violent frisson parcourir sa nuque, un frisson qui cette fois n’a rien à voir avec le vent. Quelque chose en lui devient tout à la fois brûlant et froid, les battements de son coeur se font sonores dans ses oreilles.

Il sait. Au fond de lui, il sait. Peut-être par pur instinct. Peut-être parce qu’il reconnait cette attitude trop calme et attentive, qui était la sienne encore pas si longtemps auparavant. Peut-être parce qu’il vient de comprendre ce qu’est cette poisse brune qui couvre (la créature) l’inconnu des pieds à la tête.

Ou peut-être parce qu’il a légèrement levé sa torche, et qu’elle a soudain créé un reflet profondément anormal au fond des yeux de ce qui lui fait face.

Il y a un énorme crâne reptilien, tout près. Avec peut-être juste la place pour se glisser en-dessous.

Skunk part en courant.






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MessageSujet: Re: Last year I abstained, this year I devour   Last year I abstained, this year I devour EmptyMar 27 Avr 2021 - 19:48

Y court vite, l’bestiau.

L’instinct de survie, pas aussi poétique que dans les écrits que ses yeux parcourent inlassablement ; l’énergie née du désespoir, June ne peut la comprendre. Il est bien trop léthargique, enfermé dans un cercueil qui est autant une métaphore qu’un repos qui n’en sera jamais totalement un. Le garçon, brindille malmenée par le vent et la vie—June aussi, voudrait bien se souvenir, être vivant plutôt qu’immortel, aimé au lieu de bourreau, mais ce ne sont que des mots sans valeur—court. C’est malencontreux, une chasse n’étant guère du goût de Juniper. La torche, qui l’a aveuglé, presque par surprise, comme s’il n’était pas habitué aux frasques des mortels, laisse son regard bordé de noir pendant quelques secondes. Ombres qui dansent pour ensuite s’écarter et lui laisser le champ libre.

Y court vite, l’garçon avec sa torche et sa veste boutonnée, y court vite quoique pas assez ; June pourrait s’élancer s’appuyer sur un genou aux os consolidés avec les moyens du bord, et il irait aussi vite qu’il le désirerait.

L’horreur dans les blessures, même, pour ne pas dire surtout, celles qui guérissent, c’est qu’elles ne partent par pour autant. Ses doigts glissent sur son front, sur le liquide poisseux qui menace de recouvrir ses paupières et de devenir une gêne. June ne va pas courir, ça n’est pas nécessaire. Disons que le garçon a le droit à sa longueur avance, à jouer à la proie si cela peut lui procurer une quelconque impression qu’il contrôle la situation. De toute façon, la mort est inévitable.

June se délecte de cette malfaisance qu’il a fait sienne lorsqu’on l’a laissé pour mort, d’une sorte de vengeance dénuée de sens. C’est de la survie aussi, pour un vampire, non ? De se régaler d’un peu plus de sang, jusqu’à ce que sa gorge soit trop remplie pour que les mots soient noyés. Et puis, ce n’est qu’un gamin, il doute de pouvoir l’éventrer, d’y trouver la moindre chaleur. Non, le garçon est trop sec, trop froid, un bâton mâchouillé abandonné au détour d’un chemin.

Ses pas ignorent les os et autres détails sur le sol, écrasant sans peine ce qui se trouve dans le passage. Même en marchant, juste en accélérant le pas, en boitant très légèrement sans que cela ne soit nécessaire, June sait qu’il peut rattraper sa future victime. Bien sûr, il pourrait rajouter des fleurs, pétales fanés répandus sur un cadavre, ça donnerait un peu moins de malheur, un soupçon de beauté. Dans le fond, est-ce que ça apporterait quoi que ce soit. Peut-être qu’un inconnu pourrait y lire des remords—plus qu’une ode à l’horreur, et ça serait totalement faux.

June rêve de poésie et de lettres qui n’ont pas de destinataire ; il rêve d’horreurs et de corps déchiquetés sous le coup de l’ennui.

Au milieu des géants qui peuplent l’Ossuaire, il n’est qu’un amas d’os et de souvenirs de plus. Est-ce que la chair qui le recouvre a une quelconque valeur ? Et le garçon court toujours, ce qui devient ennuyant. Pas non plus pénible, pas insurmontable—il lui semble qu’il se dirige vers un crâne. Quelles créatures peuplaient ce monde avant son arrivée ? L’Apathique n’a pas grandi avec des cahiers tâchés d’encre et les rires de ses camarades, ça il l’a découvert une fois de l’autre côté, et ses camarades sont une famille morbide aux bouches remplies de dents acérées et de sourires faussement sympathiques.

Juniper hésite, tête penchée en arrière pour admirer le ciel, puis vers le sol qui émet un amas de poussière à chacun de ses pas. N’est-ce pas le genre de jeu qui se transforme rapidement en corvée ? Surtout qu’il a déjà profité plus tôt, qu’il a goûté à quelques instants de chaleur avant que son corps ne redevienne glacé—il accélère, incapable d’évaluer sa vitesse par rapport à celle du garçon.

Ah, ses jambes sont courtes, il ne doit pas aller bien vite.

June, silencieusement bien que repéré, veut d’abord le rattraper, sans tendre la main et encore moins tenter de l’amadouer. Se tenir à ses côtés et l’observer, détailler les traits du visage, y tracer un poème du bout de ses doigts, ongles tirant sur les chairs jusqu’à les arracher.

Juste quelques pas en avant—il secoue la tête, projetant du sang autour de lui, en une auréole qui n’a rien d’angélique.







 
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MessageSujet: Re: Last year I abstained, this year I devour   Last year I abstained, this year I devour EmptyLun 24 Mai 2021 - 22:57

Skunk court vite, oui. Vraiment. C’est un peu difficile à croire, quand on voit sa dégaine d’intello maigrichon coincé dans un costard trop ajusté. Mais quand il se lance, une étrange alchimie fait son oeuvre. Sa maigreur devient légèreté, ses jambes disproportionnées de jeune adolescent se synchronisent presque jusqu’à l’élégance, sa rigidité anxieuse se transforme en vivacité et en détermination. Il est rapide, agile, esquive les obstacles avec une aisance née de ses perpétuelles randonnées de Récolteur, et Skunk lui-même se surprend parfois à apprécier cette sensation de performance purement physique qui se dégage de son propre corps.

Skunk court vite. Cela lui a déjà sauvé la vie.

Mais ce soir-là, cela ne sera pas suffisant.

Au fond de lui, le Dandy le sait déjà. Il essaie quand même, bien entendu ; il n’est pas de ceux qui renoncent sans se battre, même quand c’est sans espoir, même quand c’est foutu d’avance. Il a trop l’habitude de se relever quand on l’a mis à terre, et il a appris à le faire seul, sans attendre une aide qui de toute façon risque fort de ne jamais venir. C’est presque un réflexe, à présent, une pulsion de survie rageuse qui ne s’encombre plus d’un “pourquoi ?”, qui se contente juste de pointer un doigt d’honneur vers l’hostilité du monde en crachant “et pourquoi pas ?”.

Mais ce soir-là, cela ne sera pas suffisant.

Soudain, la créature qui le suivait est devant lui. Skunk n’est même pas sûr de l’avoir vue bouger ; il peut juste dire qu’elle était derrière-lui, et que maintenant elle lui fait face. Et qu’elle se tient entre lui et le crâne sous lequel il cherchait à se réfugier. Bien entendu.

Haletant d’horreur plus que des suites de sa brève fuite, Skunk s’arrête en dérapant, torche toujours levée. Ses neurones shootés à l’adrénaline l’abreuvent d’idées, pour la plupart remarquablement pertinentes, et sans même y penser le Récolteur laisse tomber son sac à dos d’un geste de l’épaule (trop encombrant), dégaine son couteau (probablement inutile mais dissuasif et un coup peut suffire), abaisse sa torche pour en faire un semblant d’arme (peut-être que ça craint le feu peut-être que tu peux le faire fuir le contourner le brûler).

Mais ce soir-là, cela ne sera pas suffisant.

Parce qu’à présent, la créature est assez proche pour être illuminée par le flambeau que tient Skunk. Assez proche pour que le Garçon Perdu croise son regard magnétique, dont l’éclat n’a plus rien d’humain.

Assez proche pour qu’il aperçoive les débris de chair accrochés dans le pull du monstre.

Assez proche pour qu’il détaille ce qui dégouline des cheveux de l’horreur, ce qui macule son visage, ce qui coule le long de ses mains, de son torse, de chaque centimètre carré de sa personne, et il n’y a qu’une seule substance qui peut être aussi rouge et brune et collante et qui sèche en caillots sombres et soudain la lumière de la torche tremble au rythme de la main de Skunk, sa respiration passe de rapide à erratique, son visage devient de la couleur de sa chemise, et dans sa tête il n’y a plus de question de survie ou de réflexions intelligentes, il n’y a plus qu’un grand blanc qui fait un horrible bruit entre le larsen et le hurlement.

Le monstre. Il est couvert de...

Non.
Non.
Non non non NON tais-toi tais-toi ne le dis pas ne le pense pas sauve-toi sauve-toi SAUVE-TOI!


Skunk ne se sauve pas. Il n’y arrive pas, il n’y arrive plus. Il est figé, tétanisé, incapable de parler, incapable de penser. De très loin, il se rend compte que sa poitrine se ferme, que sa respiration se fait sifflante, presque gémissante. Il essaie de résister, de reprendre pied, parce qu’il ne peut pas paniquer maintenant, s’il perd les pédales il est mort - mort, mort, et re-mort.

La créature secoue la tête, et une giclée de rouge vient éclabousser la poussière d’os aux pieds de Skunk. Le Perdu laisse échapper un faible cri, qui ressemble presque plus à une plainte douloureuse qu’à de la terreur. Dans un suprême effort de volonté, il parvient à ne pas lâcher la torche, à ne pas partir en courant comme un dératé ; mais il ne peut pas s’empêcher de reculer, titubant comme s’il était ivre.

Pour s’éloigner du sang. Juste pour s’éloigner du sang.






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MessageSujet: Re: Last year I abstained, this year I devour   Last year I abstained, this year I devour EmptyLun 6 Juin 2022 - 20:39

Le problème avec les lettres, l’encre qui s’amasse en des tâches ici et là, c’est que même avec une adresse, il faut avoir la volonté de les envoyer. Se tenir droit devant la vieille boîte du village, papier rongé par l’humidité prêt à dégorger sur le bois et à s’effacer avant même d’être partie. Et June n’a jamais écrit autrefois, ne sachant pas comment, ou peut-être que c’est une excuse, qu’écrire représente un lien gravé sur le papier, un appel silencieux dans l’encre qui tourbillonne. Les courriers qui terminent dans le feu, qui se rongent, il pourrait passer l’éternité à les contempler, sans que son cœur rongé par le froid n’y trouve son compte.

Le garçon, s’il n’allait pas mourir, à qui serait destiné sa dernière lettre ? June n’a qu’un seul désir viscéral, et ce n’est pas de comprendre, et encore moins de savoir. C’est de mettre un terme à cette page où on manque déjà de place. Le garçon qui dérape, qui le jauge du regard, June le détaille sans intérêt, en partant du bas. Corps frêle, plus un oiseau qu’un cerf, petit et si facile à écraser—Juniper sent le sang contre sa nuque, qui sèche et qui colle, refrénant l’envie de gratter sa peau jusqu’à en retirer une partie. L’oisillon geint, hurle également, en un tout qui ne fait sens que si on est face à la mort. Et s’il le laissait crier jusqu’à vider complètement ses poumons, est-ce que le garçon serait capable de se tuer lui-même ?

La terreur laisse l’Apathique silencieux ; il contemple, il en est encore aux mains, à la lame qui n’est rien de plus que ça, pas baignée d’argent, encore moins capable de lui infliger quoi que ce soit, puis à la torche, soleil miniature qui pourrait les engloutir tous les deux si les circonstances étaient différentes. Juniper se délecte de ce repas inutile, de cette humanité qui fait écho à un vide qui goutte sur le sol, qui forme une ligne entre eux.

La posture hurle plus que la voix, il dirait, tandis que le garçon recule. Pas assez vite, pas assez loin, et c’est assez. June n’a que faire des chasses, de jouer avec la nourriture alors que cette dernière supplie ; il entend une voix quelque part, par-dessus les gémissements, tapie sous la respiration qui lui semble stridente. Dans un autre monde, peut-être que c’était sa voix qui s’était déformée ainsi, jusqu’à ne plus pouvoir supporter le poids dans sa poitrine.

Il s’avance, horreur qui fait plus d’une tête que le garçon alors même que June ne se tient pas droit, doigts qui jaillissent, ongles qui se referment dans la chair dure d’un poignet. Qu’importe qu’il casse un os ou non, que quelqu’un puisse reconnaître l’amas abominable de chairs qui est condamné à prendre la poussière. Que le garçon se débâte ou pas, June est certain de sa force, qu’importe qu’il reporte son poids sur le genou qu’il juge plus stable que son voisin.

Puis, June s’autorise finalement à voir le visage.

Le problème avec les lettres, c’est que si le destinataire est mort, ça ne sert à rien de les envoyer. Personne n’irait écrire un courrier pour ‘tombe inconnue, quelque part’. Peut-être qu’il l’a déjà fait, qu’il passe sa vie à le faire. Et, d’un seul coup, Juniper est un monstre. Pas parce que c’est le cas, ça il le sait, l’Apathique recouvert de sang. Non, il devient monstre lorsque les traits se font familiers, que l’enfance peinte sur les traits terrifiés est presque un souvenir et non une réalité.

June doute ; pression qui s’alourdit sous ses doigts, le garçon qui devient Le garçon, son nom lui ayant été arraché sur une tombe qui n’existe même pas. Son garçon.

« June ? » Accent français dénué de malice qui dénote avec sa gestuelle.

Ce n’est pas lui, il le sait. Il ne peut que le savoir, qu’en subir les conséquences de manière éternelle. Ce n’est pas June, parce qu’il est June, et qu’en même temps, June n’est aucun des deux. Il est coupé en plein élan, canines trop visible au milieu d’une bouche entrouverte par surprise.

Il devrait le tuer.

Il doit le tuer.

Le problème avec les lettres, c’est qu’une fois envoyées, on ne peut plus les intercepter, que le message s’est déjà répandu. Qu’on ne peut qu’attendre une réponse, que s’imaginer la scène, le visage de la personne déchirant l’enveloppe avec hâte.

Juniper avait oublié le visage de June, jusqu’à cet instant, jusqu’à le voir peint avec tant de vie qu’il est sur le point d’arracher, juste parce qu’il le peut.







 
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MessageSujet: Re: Last year I abstained, this year I devour   Last year I abstained, this year I devour EmptyLun 11 Juil 2022 - 12:40

Skunk n’est pas un bon Garçon Perdu. Il ne sait pas bien être gai. Il a du mal à se montrer sans coeur. Mais c’est surtout son innocence qui a pris cher, et souffre d’un accroc majeur.

Le Dandy a toujours eu très conscience qu’il pouvait mourir.

Il a déjà senti le souffle froid de la Fin sur sa nuque. Cette fois où le piège à loup lui a cassé la jambe, au milieu de nulle part, et où personne n’est venu le chercher. Pendant la Canicule, lorsqu'il s’est vu disparaitre petit à petit, rongé par le manque, la soif et la faim. Au début du Givre, quand le Virus s’est répandu en lui pour bouffer son humanité plus vite que Skunk n’était prêt à l’abandonner. Dans la Machine, dans la Jungle, dans le Bayou, dans l’Arène. Tant de fois qu’il en a perdu le compte et le souvenir.

Il a fini par se penser résolu. Il s'est dit que puisqu’il considérait sa propre disparition comme une option tristement réaliste, il ne servait à rien d’en avoir peur. Que c’était inéluctable, et qu’il était assez intelligent et mature pour l’accepter. Dans sa tête, c’était presque une petite fierté, un drame de théâtre un peu noble et digne.

Mais ce soir-là, il voit la Mort comme il ne l’a jamais vue, et il comprend que non, il n’est pas prêt. Il ne l’a jamais été.

Parce que cette fois, il la reconnait. Il la reconnait, et ce constat glisse encore un peu plus de désespoir dans son horreur, fige encore davantage son corps paralysé de terreur. Elle est exactement comme dans ses cauchemars, un monstre poisseux aux crocs aussi cruels que son profond désintérêt, inexorable, impossible à semer, impossible à vaincre. Comme si tous ces atroces réveils étranglés d’angoisse, avec encore la sensation d’une mâchoire refermée sur sa gorge et de griffes en train de lacérer son ventre, n’avaient été qu’une sinistre répétition de ce soir-là, de cet instant précis.

Skunk va mourir.

Maintenant. Tout seul. D’une manière brutale, bête, crade, sans honneur ni beauté.

Pour la première fois depuis très longtemps, le Dandy n’arrive pas à réagir. Le choc de ce qui l’attend le percute avec violence, le fait tomber loin au fond de sa propre tête et le laisse vide. Il n’enregistre qu’à distance ce qu’il lui arrive ensuite - le mouvement de la créature, trop rapide pour être visible, les ongles acérés qui s’enfoncent dans son poignet. Il sent le craquement de bois vert dans son avant-bras, comprend qu’un os a cassé. Il n’a pas mal.

Sa main droite laisse tomber la torche, qui continue cependant de brûler sur la poussière d’os. La lueur chaude de la flamme accroche les traits du monstre, transforme ses rétines en deux puits de lumière froide, jette des reflets écarlates sur le sang à moitié coagulé qui dégouline de ses cheveux. La main de l’Horreur, froide et morte sur le poignet brisé du Dandy, est visqueuse d’hémoglobine. Une odeur de meurtre, mélange de cuivre et de terre humide, s’infiltre dans les poumons suffoqués du Perdu. Tout est gelé, tout est gluant. Tout est si terne et sale.

Skunk a entendu dire que lorsqu’on mourrait, on revoyait toute sa vie défiler devant ses yeux. Mais lui ne voit qu’un rouge morne.

Il a lu dans ses livres et vu dans ses films d’innombrables exemples de héros à l’agonie qui songeaient à un être aimé et trouvaient alors la force de se battre encore, de vivre plus longtemps. Mais lui ne peut penser qu’au silence.

Skunk reste figé dans la prise du monstre. Sa respiration se résume à un sifflement ténu qu’il n’entend pas, son couteau reste immobile au bout de son bras sans force. Quand la créature finit par émettre un son, l’adolescent ne comprend même pas que c’est un mot, encore moins un nom ; dans son monde crépusculaire, soudain si vide et laid, c’est une civilité trop impossible. La seule réaction que la voix de la chose tire au garçon, c’est que des larmes silencieuses se mettent à couler depuis ses yeux éteints.

Oui, il a toujours su qu’il pouvait mourir. Naïvement, il s’est dit que le moment venu, cela le rendrait au moins un peu plus courageux.

Mais au final, il se sent juste terrorisé. Triste. Et très seul.






In order to insult me, I must first value your opinion.
Nice try though.
Now please go fuck yourself with a cactus.
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(And if I were you, I wouldn't love me neither.)

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Juniper
Juniper

† Vampire †


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MessageSujet: Re: Last year I abstained, this year I devour   Last year I abstained, this year I devour EmptyLun 11 Juil 2022 - 16:25

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"Sometimes I feel like I’m not solid. I’m hollow. There is nothing bethind my eyes. I’m a negative of a person. All I want is blackness, blackness and silence."  
— Sylvia Plath



Le Garçon qui n’est qu’un garçon, pas le Sien—il y a une telle horreur dans l’espoir, pire qu’un crime, que des paumes dont les crevasses restent ensanglantées malgré les nombreux lavages. June ne souhaite pas espérer, il en est incapable—c’est son propre hurlement, un silence la bouche entrouverte, un son qu’il est le seul à entendre.

Un nom n’est qu’un mot, si on ne l’associe pas à un visage, à un souvenir qu’on croyait mort, corps balancé dans une rivière, un amas de pierres teintées d’un rouge sombre en un unique témoignage jusqu’à ce que la pluie s’en charge aussi. June n’était que June, qu’un masque et une excuse, jusqu’à cette seconde. Ce n’est pas June, et si ça l’était, si Juniper avait l’occasion d’être humain juste un instant ? C’est impossible, une chimère grossière qui le rendrait malade s’il en était encore capable—ses entrailles ne doivent pas être si différentes que celles d’un humain, uniquement figées dans un froid qui pulse contre sa mâchoire tandis qu’un craquement résonne.

Qu’il s’agisse de son propre cœur, de ce qu’il reste d’un visage que le jeune vampire ne rêve plus que de tracer puis d’arracher, besoin de possession insurmontable, ou d’un os, Juniper n’en a que faire.

Le Garçon ; garçon fait d’organes et de sang, de l’éclat de la lune contre son visage, de traits volés à un autre, un amas de souvenirs qui dansent contre sa peau. Juniper ne parvient plus à se rappeler si les vampires doivent respirer (probablement que non, alors que sa gorge se bloque n’importe guère), s’il devrait être là où bien en train de courir dans l’autre sens—l’erreur est malsaine, s’il avait voulu faire demi-tour pour June, il l’aurait payé de sa vie.

Ensemble, pourtant, ils auraient pu mourir.

Un pied heurte la torche, la lumière qui se reflète dans les yeux du vampire jusqu’à devenir insupportable, envoyant l’objet valser plus loin, flamme qui s’amenuise contre le sol. Le Garçon est en larmes, laissant à Juniper le rôle du monstre, de la créature au visage pratiquement humain, quoique pas assez pour permettre l’illusion.

Et les étoiles au-dessus d’eux sont toujours là, la main aux ongles acérés reste pressée contre un poignet brisé—Juniper n’a pas de cœur, pas un capable de battre, il ne lui vient pas à l’esprit de lâcher, de laisser la proie repartir—l’envie de causer un massacre, le tourment qu’il veut infliger au monde entier. Si Son Garçon n’a pas survécu, alors pourquoi accorder cette chance à qui que ce soit ? C’est horrible, de demeurer penché au-dessus de sa victime, de ne parvenir à rien outre à fixer les larmes baignant un visage bien trop jeune.

S’il osait le toucher, un pouce contre une joue, un confort depuis longtemps oublié, Juniper risquerait d’enfoncer un ongle dans la peau, de la déchirer.

Un nom n’est qu’un nom, jusqu’à devenir un souvenir, puis un second—une invasion qui tire contre le recoin de ses yeux, qui lui donne envie de tracer des croissants de lune contre ses paupières pour les empêcher de trembler.

Le Garçon devrait en profiter, soulever son bras frêle, le couteau qui tenterait de causer assez de dégâts pour lui permettre de fuir—si Juniper le lâchait, ça résoudrait le problème aussi.

Pas encore. Cet abandon, il l’a vécu une fois, pas une seconde. Ce n’est pas June (pourquoi pas), on ne répare pas les erreurs d’une autre vie aussi aisément (pourquoi pas), Le Garçon ne mérite pas ça (June non plus, June non plus, et malgré ça—)

Juniper ne réalise pas qu’il pleure, qu’il y a quelque chose de plus clair que le sang qui s’abat contre ses joues, d’un côté puis de l’autre, laissant des sillons au milieu du rouge devenu terne. L’Apathique était parvenu à taire ses émotions pendant si longtemps, uniquement pour qu’un reflet fantôme fasse tout vaciller. Sa main libre se redresse, s’arrête entre deux, n’osant rien faire.

Par crainte de ruiner, de détruire, et c’est une vie différente, une où aimer n’est qu’un tourment qui ronge, une chose impossible.

Les nuits sont devenues si longues, ancienne proie qui s’est mué en un chasseur implacable. Et il ne se retourne plus depuis longtemps, à la recherche d’un visage familier, d’un compagnon qui se mettrait à rire en lui ébouriffant les cheveux. A la place, c’est cette errance mortelle qui n’aura jamais de fin, qui parviendra à le détruite d’une façon ou d’une autre—et l’Apathique s’est résigné du jour où il a volé un nom sur une tombe construite avec ses espoirs.

Sa main s’abat contre une épaule. Elle glisse derrière, attirant Le Garçon plus près, en une étreinte tout aussi brutale qu’horrible pour tous les deux.

« Je suis désolé, » qu’il murmure pour un autre.
Juniper espère que Le Garçon va lever sa lame, l’enfoncer dans son dos—qu’elle soit faite d’argent et que tout s’arrête.

Mourir pour June est son unique désir, après tout.

Une sorte de pardon impossible à obtenir, une conscience que la situation n’aura pas de fin heureuse, que Le Garçon va se débattre ou bien se laisser mourir, que Juniper lui brisera les os l’un après l’autre sans s’en rendre compte, que le regard plein de vie ne portera bientôt plus qu’un voile silencieux.







 
June
"I bear a name found on a makeshift grave
that I created out of fading memories
and it's not enough for me to grieve
at least not properly."
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