Freckles suit des yeux une craquelure dans la glace. Elle sillonne sur le sol sur plusieurs mètres avant de se perdre au pied d’un arbre. Et en haut de cet arbre, au bout d’une branche, un morceau de neige laisse s’échapper de petites gouttes d’eau à mesure qu’elle fond ; les gouttes viennent une à une s’écraser dans la neige au sol à leur tour.
Ça fait plusieurs minutes qu’il regarde. Ça lui paraît plus, c’est jamais facile pour lui de se concentrer si longtemps. Mais c’est un spectacle dont on ne se lasse pas, il trouve. Oh, il fait toujours aussi froid. La neige est toujours épaisse, elle brûle la peau au contact, et il y a tous les jours de nouveaux accidents dus au gel – Freckles pense au garçon qu’ils ont sauvé la dernière fois, qui ne regagnera jamais tout à fait l’usage de sa jambe. C’est la vie. Mais les choses lui semblent mieux, tout de même. Il ne sait pas si c'est dans sa tête, s'il s'est juste habitué.

Ça fait aussi plusieurs minutes qu’il ne parle pas. Ça doit être reposant pour Justice, assis à côté de lui. Les deux garçons se sont perdus dans leur marche, à bavarder et constater l’effet du cocon qui ne s’est pas arrêté de briller et chauffer. De temps en temps il jette un œil en direction de Just et la conversation ne va pas plus loin que « quoi ? » « non, rien ».
Il sourit.

Peut-être que le gel désertera bientôt le Grand Arbre et qu’ils pourront rentrer. Il arrête plus d’y penser, ces temps.

Laissant tomber sa tête en arrière contre l’arbre auquel ils sont tous les deux adossés, il ferme les yeux.
Sa main se referme distraitement sur une poignée de neige fraiche.

Il y a des jours imperturbables où il pourrait tout accepter. Posé comme ça, aux côtés d’un amis, le froid bridé par un nouveau soleil, il respire lentement cet air pur qu’il n’a jamais remarqué jusqu’ici. L’air n’est plus si lourd, le vent moins brusque et le paysage… moins oppressant. Certains matins, il croit presque à la fonte des neiges mais il préfère ne pas trop espérer. En attendant, le temps s’est comme assagi et durant des jours comme celui-ci, il se dirait presque que… Que c’est agréable. Que c’est même joli la neige qui recouvre les cimes des arbres et les flocons qui mouchettent l’horizon.

Il y a des jours imperturbables où il se dit que ça ne le dérangerait pas si tout ça durait un jour de plus.

Just et Freckles se sont adossés à un arbre et ils ont discuté de tout et de rien et puis peut-être saisi par la même sérénité, ils ne sont plus sentis obligés d’entretenir la conversation. Cela doit faire quoi ? Dix minutes ? Une heure ? On entendrait les mouches voler si elles n’étaient pas en train d’hiberner.

Et puis sans réfléchir, ça finit par sortir :

« Il y a pas si longtemps j’aurais tué pour une glace à la pistache. »

Un rire étouffé secoue doucement ses épaules. C’est vrai, il n’y a pas si longtemps, ils étaient piégés en pleine canicule et rien ne l’aurait enjailler comme une glace à la pistache. Puis le froid, alors les occasions n’avaient pas manqué mais :

« Maintenant je donnerai mon chapeau pour un chocolat chaud. »

Avec le temps, il a remarqué que les gens s’imaginaient toujours qu’il entretenait un lien particulier avec son chapeau. Un genre de lien sacré. Alors c’est vrai, il n’aime pas le perdre et il n‘aime pas le prêter. Mais ça reste qu’un chapeau, non ? Mais c’est comme ça, on a décidé de donner de l’importance à ce chapeau alors il a décidé de jouer le jeu.

Jurer sur son chapeau, c’est jurer sérieusement.
Un serment sacré, même.

C’est Justice qui brise le silence. Un espèce de petit rire secoue ses épaules sous ses couches de vêtements.

« Il y a pas si longtemps j’aurais tué pour une glace à la pistache. »

Freckles pouffe aussi. Il continue de tracer des petits sillons dans la neige avec son index, indifférent à la sensation de brûlure – il a toujours eu les mains froides, Givre ou pas. On lui reprochait tout le temps quand il effleurait involontairement celle exposée d’un autre perdu, comme si c’était de sa faute.

« Maintenant je donnerai mon chapeau pour un chocolat chaud. », poursuit Just.

Cette fois Freckles lui jette un regard carrément perplexe. Parier son chapeau c’est peut-être l’expression dramatique la plus extrême pour le cowboy. L’accessoire fait partie de la mythologie chez eux. Sacré, limite. Mais c’est vrai que rien qu’à penser à un chocolat chaud, le livreur salive. Pas de doute que s’ils devaient à deux se partager une tasse de la boisson en question, ça finirait en baston. C’est pas sur ça que Freckles se concentre :

« Pistache ? Une glace à la pistache ? »

Il offre à Justice une expression de dégoût volontairement exagérée comme si c’était la pire chose qu’il ait jamais entendu.

« Et je croyais que t’étais un homme de goût moi. » Et il continue de tordre sa bouche et tirer la langue d’indignation.. « Dis moi que t’aimes la réglisse tant qu’on y est. »

Aussi sérieux qu’il essaie d’être il peut pas empêcher un sourire de remplacer ses mimiques.

Au vu de toutes bêtises qu’il vient de déblatérer, il ne s’attend pas à ce que Freckles ne retienne qu’une chose :

« Pistache ? Une glace à la pistache ? »

Freckles a l’air indigné, comme si Just avait frappé un de ses livreurs. Apparemment, aimer la pistache est un grief au moins aussi légitime.

« Et je croyais que t’étais un homme de goût moi. Dis moi que t’aimes la réglisse tant qu’on y est. »

Just fronce les sourcils, tant froissé qu’amusé par cette prise de position. De tous ses potes, Freckles est le dernier avec qui il penserait entamer un débat. Le rouquin a l’air ok avec tout, d’habitude.

« Ok d’abord, je te permets pas. »

Il reprend d’un air légèrement snob :

« J’ai… besoin d’un contexte pour apprécier la réglisse. Mais c’est pas dégueu. »

« Ok d’abord, je te permets pas. »

Freckles souffle du nez devant l’indignation prétendue de Just -du moins il suppose qu’il fait semblant. Peut-être qu’il a juste touché une corde sensible et que le sentinelle est un fervent amoureux non seulement de la glace à la pistache mais aussi de cette immondice noire au goût de feutre à alcool.

« J’ai… besoin d’un contexte pour apprécier la réglisse. Mais c’est pas dégueu. »

Et voilà. Le drame. Freckles grimace, un sourire de travers et un roulement d’yeux qui indique qu’il aimerait encore mieux manger du pétrole.
Chacun ses goûts comme on dit. Après tout il sait qu’il est pas toujours au top non plus. Il baisse les yeux sur le pull qu’il porte, moche et aux couleurs délavées. Il a essayé de le rendre à son propriétaire à peu près six fois, mais Justice est catégorique ; il ne veut plus de ça dans sa garde-robe. C’est du coup devenu le vêtement fétiche de Freckles pendant cet hiver interminable, planqué entre d’autres couches de t-shirts et manteaux.
En terme de bon goût, on repassera.

« C’est pas grave, on va devoir apprendre à accepter nos différences je suppose. »

Il prend un ton bien philosophe pour une conversation sur les parfums de glace. Alors qu’il parle sa main se referme sur une poignée de neige, qu’il soupèse un instant, avant de se tourner vers le sentinelle pour déverser son contenu dans l'arrière de son col ; geste universel de déclaration de guerre.

Le visage tacheté du rouquin se tord en une grimace d’effroi. Just hausse les sourcils, l’air désabusé. Il lui parle parfum mais Freckles réagit comme s’il avait commis acte barbare. Et l’espace d’un instant, il en vient à se demander si c’est Freckles qui en fait des tonnes ou si les amateurs de pistaches sont si peu répandus. Peut-être qu’il devrait demander autour de lui, histoire de confirmer qu’il n’est pas le seul à l’apprécier.

« C’est pas grave, on va devoir apprendre à accepter nos différences je
suppose. »

Ça lui va bien de jouer les médiateurs quand c’est lui qui vient lui chercher des noises. Just ouvre la bouche pour faire une remarque mais ses yeux s’écarquillent, ses épaules se lèvent et sa mâchoire pendante laisse échapper un gémissement.
Le sentinelle bondit sur ses pieds, secoue ses vêtements pour faire glisser la neige en-dessous. Mauvaise idée : le peu qui en glisse glace le bas de son dos.

Une minute après, la stupeur laisse place à un désir de vengeance. Son regard se pose sur Freckles, brûlant. D’un commun accord, la discussion est mise entre parenthèses tandis que s’annonce un combat d’anthologie.

Just se baisse précipitamment pour former une boule, tête rentrée pour se protéger de quelques projectiles. Puis, il effectue un tir puissant dans la face de son adversaire.

Avec un sens tordu du devoir accompli, Freckles ricane en voyant Justice se lever d’un bond pour essayer d’évacuer la neige qui tombe dans son col. Erreur classique. Tout coule le long de son dos jusqu’au bas de son t-shirt ; et Freckles se contente de rire, encore. Il sait que son heure arrive, pourtant. Il se précipite sur ses pieds alors que le sentinelle rassemble une boule de neige entre ses doigts. Se penche pour faire de même ; pas assez rapide. Il a à peine le temps de refermer ses doigts sur une poignée de poudreuse qu’un projectile l’atteint en plein visage. Compact. Gelé. Lancé à pleine vitesse.

Ouch.

Justice a définitivement des antécédents en terme de pétage de nez. La crosse de fusil aura fait plus de dégâts qu’une simple boule de neige mais Freckles se sent tout de même reculer et lâcher un cri de douleur sous l’impact. Il s’essuie le nez du revers de la manche avant de se pencher de nouveau pour fabriquer une boule semblable.
Il lance à Just un regard qui signifie clairement qu’il a fini de rigoler avant de lui rendre la monnaie de sa pièce, avec – il espère – autant de force dans son lancer.
Après la Ville Apocalyptique, la clairière devient leur champ de bataille.

Dans le mile. La boule de neige s’écrase en pleine face et le rouquin part en arrière dans un cri de douleur. Saisi par l’effet de sa propre performance, Just se fige le regarde s’essuyer d’un revers du bras, l’œillade assassine.

Le sentinelle a une pensée pour son futur : la certitude que lorsqu’il devra raconter cette histoire, il dira que c’est à ce moment précis que les choses ont dégénéré.

Un quart d’heure plus tard, il est étendu, bras écartés comme un Christ en croix, sur ce tapis de neige saccagé. Défait. Il n’est pas le seul : Freckles n’est pas dans un état plus enviable.

Il desserre les dents puis passant sa langue sur ses lèvres gercées, il capte le goût ferrugineux du sang frais. Comment est-ce qu’ils ont réussi à se blesser avec de la poudreuse ? Peut-être qu’ils se sont lancés des cailloux par mégarde ? Ou peut-être que lancer des boule de neige à bout portant, finit, si l’on fait preuve de suffisamment d’obstination, par blesser.

Il s’essuie les lèvres du bout des doigts, et montre la trace rouge à Freckles, l’air sidéré. C’est si incroyable que ça finit par lui arracher un rire d’abord nerveux puis franchement libérateur quand il se rend compte que Freckles ne s’en est pas sorti indemne.

« On est vraiment doués ! »

Just se prend sa boule de neige dans la gueule. Et puis une autre. Et c’est à lui d’en lancer. Et c’est Freckles qui s’en prend une. Et une autre. Des fois ils les évitent. Ils se servent du terrain pour parer et se ravitailler en munitions. Il y a personne pour les voir donner tout ce qu’ils ont dans une bataille de boules de neige. C’est dommage. C’est plutôt épique.
Ça dure un petit moment, et les deux se retrouvent étalés dans la neige, presque à bout de souffle. Dans le cas de Freckles, un peu euphorique et le visage et les doigts complètement engourdis par le froid.

« On est vraiment doués ! »

Il tourne la tête vers Just qui lui montre d’un air incrédule une trace rouge sur son doigt. Le sentinelle a la lèvre en sang. Freckles explose de rire sans bien savoir pourquoi- peut-être parce qu’ils finissent toujours comme ça, quoi qu’il arrive. C’est stupide. Il porte une main à son propre visage et en ressort une vague trace de sang mélangée à de la neige sur sa paume. C’est pas le flot continu causé par un impact cette fois, plus une vieille blessure mise à mal par le froid. Il renifle et laisse mollement retomber son bras dans la neige près de celui de Just.

« Ça finit toujours pareil. »

En d’autres circonstances il voudrait savoir qui des deux a « gagné ». Pas sûr que ça s’applique à la situation. Il tourne la tête de nouveau pour regarder Just, la joue posée contre le tapis de neige.

« Quand le givre sera parti je te trouverai du chocolat chaud », déclare-t-il comme si leur conversation n’avait jamais été interrompue.

« Ça finit toujours pareil. »

Cette remarque l’oblige à se souvenir et c’est un effort qu’il ne fait plus si souvent. Et à force de gamberger il se rend compte que oui, ça finit souvent comme ça entre eux. Que ce soit pendant la Canicule ou même après, au Paint Ball, cela finit à peu près toujours de la même façon : les deux gamins à terres et quelques coulée de sang par-ci par-là. Pourtant, il ne lui semble pas qu’ils se détestent ou que la lute soit si acharnée. Non, c’est plutôt qu’ils se relâchent au point de ne pas se rendre compte quand ils dépassent légèrement les bornes.

« Quand le givre sera parti je te trouverai du chocolat chaud.»

Cette dernière phrase le tire ses pensées et lui arrache un sourire béat, du genre stupide, du genre qu’il ne fait pas souvent. Bah, oui, il se lâche. Et là, il donnerait tout pour son chocolat.

« On le boira ensemble. Et on se racontera notre journée. Comme les vieux. »

Cette idée lui arrache un gloussement. Il se voit déjà, dans un rocking chair, sirotant un boisson d’Homme avec son compadre. Ouais. Il se sent parfaitement taillé pour finir comme ça.

« On le boira ensemble. Et on se racontera notre journée. Comme les vieux. »

Il tourne la tête vers Justice qui a un sourire qui lui ressemble pas.

« Comme les vieux », il répète en ricanant.

Comparaison à la con d’un truc qu’ils connaissent à peine. Si tout se passe bien, ils le seront jamais, vieux. Les grand-pères imaginaires qu’on imagine assis devant une cheminée avec un livre et du thé. Mais l’idée de cet après-midi chocolat chaud lui plait quand même – et comme Justice, il ne peut pas s’empêcher de sourire. C’est probablement une phrase en l’air, détachée, mais ça lui fait quelque chose quand même- allongé dans la neige, il est envahi par une sorte de chaleur et une soudaine envie de donner un coup de poing dans l’épaule de Just, comme pour se donner une contenance, comme si celui-ci pouvait lire dans ses pensées. A la place, il se redresse, en position assise. Il regarde son pote en biais.

« Mais ouais. Ce serait cool. »

Puis il détourne le regard comme s’il s’intéressait soudain au paysage toujours si morne et blanc. Renifle, et s’essuie encore le visage du revers de la main. Il saigne plus, déjà.

« Et tu me dois toujours un concert de guitare en plus. »

« Comme les vieux »

Quand il entend Freckles ricaner, il se rend compte à quel point cette idée est stupide. Ils ne grandiront jamais. Cette notion si brutalement abstraite lui donne le vertige. Ils ne deviendront pas chauve, ils n’auront pas de cheveux blancs, ils ne seront jamais en maison de retraite. Chouette ? Chouette.

A côté de lui, Freckles s’est redressé.

« Mais ouais. Ce serait cool. »

Cool… Just ferme les yeux. Avec un petit effort, il peut imaginer sentir la chaleur du liquide à travers son mug, la vapeur qui s’en dégage lui noyer le visage. Et le goût. Quel goût ça a déjà ?

« Et tu me dois toujours un concert de guitare en plus. »

Le sentinelle rouvre les yeux d’un coup, une expression de pure surprise avec une pointe d’horreur.

« … Mais j’suis pas prêt. »

Just rouvre les yeux comme s’il se réveillait en sursaut d’un horrible cauchemar. Et Freckles se demande pendant un instant s’il a vu ou entendu quelque chose de dangereux et qu’il faut qu’ils se mettent à courir.

«  … Mais j’suis pas prêt. »

Mais non, c’est bien l’histoire du concert qui le met dans tous ces états.

« Quoi ? » Freckles ne peut pas s’empêcher de rire en regardant le sentinelle d’un air incrédule. « Mais on s’en fout. Au pire c’est nul. Y aura que moi. »

C’est quoi, du trac ? L’envie de trop bien faire ? Ou juste une excuse, parce qu’il a pas envie de lui jouer de la musique du tout. Peut-être qu’il n’y a même pas touché à la guitare, ou qu’il l’a perdue. Malgré le dédain que Freckles avait pour l’objet à la base, ça lui ferait du mal. Il sourit toujours, mais avec plus de réserve.

« Enfin, t’es pas obligé de toutes façons. Je disais ça pour rire. »

L’inquiétude du sentinelle était tout de ce qu’il y avait de plus authentique. Il ignore encore exactement comment qualifier ce mélange de stress et d’excitation que lui inspire la perspective d’un concert. Le temps lui apprendrait que ça s’appelle le trac. Jusqu’ici, il se contentait de pratiquer des sports qu’ils maitrisaient ou participer des activités dont il se fichait bien. Autant dire que l’inquiétude de bien faire, il ne l’a pas tous les jours.

« Quoi ? » Freck se gondole. « Mais on s’en fout. Au pire c’est nul. Y’aura que
moi. »

Le sentinelle serre les lèvres, il tire son chapeau pour le laisser recouvrir son visage. Freckles a raison, il le sait bien. Pourtant, ça lui reste.

« Enfin, t’es pas obligé de toutes façons. Je disais ça pour rire. » se ravise le rouquin.

Piqué au vif, le sentinelle écarte le couvre-chef et se redresse légèrement, s’appuyant sur son coude.

« J’ai envie de faire les choses bien. »

Et comme son argument ne le convainc pas lui-même, il se tourne vers Freckles et insiste :

« Je veux que ça soit cool ! Que t’ai pas attendu pour trois accords boiteux. »

Comme il a l’impression d’argumenter comme un gamin qui cherche à négocier avec un parent, il décide de mettre les pieds dans le plat et rajoute en prenant un air boudeur tout gamin :

« Je veux avoir l’air cool ! »

Mais Just, lui, ne rit pas. Il se redresse, le regard intense, les yeux qui pourraient presque lancer des éclairs. Freckles comprend pas trop.

« J’ai envie de faire les choses bien. Je veux que ça soit cool ! Que t’ai pas attendu pour trois accords boiteux. »

Il s’enflamme d’une façon qui lui ressemble pas. Freckles écarquille les yeux devant cette démonstration passionnée qui sort un peu de nulle part. Et son point final :

« Je veux avoir l’air cool ! »

Avoir l’air cool ?

« Pour moi ? »

Cette question sort toute seule, presque plus naïve et immature que l’exclamation du sentinelle. Immédiatement, il se sent embarrassé.

« Mais Just ... » il commence.

Et puis il s’interrompt. Il sait pas quoi répondre. Il se rend compte qu’il n’a jamais vraiment eu à rassurer Just sur quoi que ce soit, ou en tout cas rien d’aussi personnel que son envie étrangement adolescente d’avoir l’air « cool ».

« T’es déjà cool ! » il finit par dire.

Comme de peur d’avoir l’air trop sincère, il grimace un sourire, et tend la main pour attraper le rebord du chapeau du sentinelle, qu’il baisse d’un coup sec pour lui cacher les yeux.