AME&KAGAMI

Hoping for love to die, to be suffocated underneath ashes. If it refuses to happen, I'll do it myself. | FRIMELDA

TW relation abusive pour tout le topic en ce qui concerne Ame et son ex.

L'air est devenu humide—mélange entre lourdeur et pollution qui le force parfois à ralentir. A quoi bon aller là-bas. Si Ame était plus philosophe—qu'il n'avait pas une manche aux coutures qui menacent de céder parce qu'on a trop tiré dessus, que son corps n'était pas en train de hurler 'stop, stop'—il se lancerait dans une vaste définition de ce que représente une maison. Ou plutôt un appartement trop petit pour cinq. Tant mieux qu'il n'en ait rien à branler. Rues pleines d'employés qui vont peut-être se tuer en rentrant chez eux, de cravates trop serrées et de regards qui ne quittent presque jamais le sol—évitez le feu, ça offre des résultats pitoyables—et en un sens cette monotonie est terriblement ennuyeuse.

Ame Sakuma contemple le bâtiment à deux étages où vit sa famille, l'escalier en métal sur le côté qui grince tandis qu'il saute sur la première marche de toutes ses forces. Non, il n'a pas envie d'y aller. Ses parents seront probablement absents, Yuta étudie et Ame a depuis longtemps oublié s'il y a quelqu'un d'autre. Il ne vit plus là, à quatorze ans, préférant le reste de son minuscule univers, les arcades remplies de fumée à l'école, les gens qui lui tendent des canettes de bière juste parce qu'il sait s'il prendre, qu'on lui a bien enseigné à sourire et à se la fermer. Ah, non, la seconde partie ne rentre pas.
Pourtant on lui rabâche la leçon régulièrement. 

Il va juste entrer dans l'appartement dont il s'est fait jeter des dizaines de fois, parents hurlant, mains qui sont arrachées des jointures de la porte, pourquoi est ce que tu causes autant de problèmes ? Bleh. Un court voyage dans l'univers de la famille imparfaite—sa mère ne sait pas cacher l'argent. Il va prendre ce dont il a besoin, peut-être voler deux ou trois autres trucs, et se casser.

Le collège doit téléphoner, non ? Ah, qu'est-ce ça changerait? Il n'a pas l'intention de vivre assez longtemps pour le lycée~ Ame fait tourner le jeu de clés d'une main. Oh, il se souvient maintenant—Kagami. La dernière fois il l'a poussé et elle s'est écroulée sur le sol trop vieux de leur chambre, sans trop se souvenir pourquoi. Pour du maquillage souillé par ses doigts plein de terre, ou juste pour s'amuser. Un vent de bonheur au sein de la demeure familiale. Ah, Daisuke va l'attendre—faux, Dai a mieux à faire—il doit se dépêcher et récupérer la thune.

"Je suis rentré~" qu'Ame lance, plein d'amusement. Plus personne ne lui répond depuis des années. Il y a du violet et du vert qui glissent sur sa mâchoire et sourire est douloureux. Ah, il doit vraiment être masochiste. 

Bon, argent d'abord. Ensuite une douche serait peut-être pas si mal. Juste pour voir l'étendue des dégâts, cette fois. Au moins, Daisuke sait rire, quand il dit qu'il l'aime. Et les gens avec qui ils traînent sont cruels mais ils ne s'en cachent pas. Rien ne le dégoute autant que cette famille qui prétend encore et encore que tout est parfait, que tout va bien. Il balance ses chaussures l'une après l'autre, furieux contre l'univers entier, prêt à s'en prendre au premier venu.

Ou à la première.

Oh, ce sont les sandales de Kagami, qui traînent dans l'entrée ?

Elle était sortie avant tout le monde, et avait traîné pour rentrer. C'est ça qui est bien, quand on peut rentrer toute seule de l'école : personne pour surveiller.
On peut s'éloigner un peu du chemin, emprunter des ruelles clairement malfamées, mais qu'en sait-on, quand on a pas conscience du danger, hein ?

Et puis, on peut aller caresser -sans leur consentement évidemment- les chiens du quartier. Sont-ils des bâtards de la rue, ou alors ont-ils un maître qu'ils auraient lâché le temps d'une petite fugue ? C'est drôle, les fugues. Quand on revient, personne ne semble avoir remarqué votre disparition.
Quoi ? Pas dans une famille normale, vous dites ? N'importe quoi...

Bref. À propos de ces chiens, Kagami ne savait rien de leur provenance, même si, tout bon observateur aurait pu se rendre compte que des chiens sales comme ceux-là ne pouvaient décidément pas appartenir à un humain qui se respecte.
Quoi ? Maltraitance animale, vous dites ? Bah... c'est pas possible.

Dans tous les cas, la petite fille s'était bien amusé avec ces toutous, dont les plus téméraires avaient fini par s'approcher pour lui faire la fête en se frottant chaleureusement contre elle, dégueulassant -il n'y a pas d'autre mot- son petit uniforme qui manquait déjà cruellement d'entretien au départ.
À force de caresses et de bisous sur leurs têtes pleines de poussière et de terre, elle réussit, à son grand étonnement, à apprivoiser - ou plutôt à intéresser suffisament- l'un des chiens pour qu'il décide de faire le chemin en sa compagnie.

Bientôt, la fillette, boule de poils puante et sale collée aux talons, franchit le seuil de l'appartement, visiblement laissé ouvert par Oniisan, qui, comme d'habitude, n'avait pas de temps à lui accorder. Kagami, comme une bonne fille, ferma la porte derrière elle, jetant nonchalament les clés un peu plus loin.

Cet Oniisan, elle l'avait toujours connu comme étant l'ombre silencieuse qui se faisait oublier à son bureau, coupé du reste de la maisonnée en étant dans son monde plein de trucs compliqués et inintéressants, caché entre deux piles de livre. La seule chose qu'il avait prononcé à son égard jusque là ? "Je n'ai pas le temps".
Ce type fut donc bien vite relégué à la case des gens "pas intéressants", au même titre que les deux adultes qui leur servaient plus de meubles que de parents. Oui, des meubles. On est d'accord qu'on ne peut pas jouer ni discuter avec une table basse, non ? Et qu'elle se fiche complètement de vous, la table basse, hein ? Bah là, c'est pareil.

Parents + Oniisan = meubles, donc.

Le seul qui sortait un peu du lot et qui mettait, bien malgré lui, un peu de couleur dans sa vie, c'était son Nii-chan.
Celui "entre deux".
Celui qui aurait probablement préféré ne jamais être là.
Celui qui réagissait à ses provocations enfantines et qui s'intéressait à elle, que cela se finisse par une douloureuse chute ou quelque chose dans le genre.
Et sa "réserve de beaux trucs qui brillent" aussi. Le maquillage, quelle belle invention. Il faut absolument qu'elle lui chippe son nouveau fard à paupières.

Nii-chan + animaux = pas meubles.

Comme ce Nii-chan avait tout de même la sale tendance à disparaître de plus en plus longtemps, il fallait bien que la petite dernière s'occupe comme elle le pouvait, en trouvant quelque chose pouvant la distraire à la place du cadet.
Oui, remplacer son frère par un chien, ça lui avait paru être une bonne idée. Mais ça ne l'avait pas empêchée d'accourir quand même lorsqu'elle entendit les clés tourner dans la serrure, et de se cacher pour mieux sauter sur -agresser- l'adolescent qui venait tout juste de rentrer, le gratifiant de quelques taches de boue au passage.
C'était pas de sa faute, c'est le chien.

- Bon retouuuuuur !

Lui lance gaiment la petite, profitant de son effet de surprise pour s'accrocher à lui. Elle a tendance à rentrer sans ménagement dans la bulle personnelle des animaux. Pourquoi serait-ce différent avec les humains, hein ?

AME&KAGAMI

We’re hungover in the city of dust, Let our hearts run round in circles, While we fall apart | FRIMELDA

Ame a le loisir de retirer ses chaussures, ce qui en soi est pas si mal—des fois on lui hurle dessus avant même de lui accorder ce privilège—puis il se trouve interrompu dans sa quête de domination du monde et de vengeance un brin trop personnelle. C’est aussi pour ça qu’il évite de rentrer, outre ses parents qui préféreraient sans doute qu’il ne soit jamais venu au monde, un sentiment qu’il partage quoique les emmerder en continuant d’être leur gosse est devenu une habitude malsaine.

Sa sœur est crade. Il en vient à se demander si elle se lave, vu le niveau de saleté sur son uniforme et sa tronche. Et vas-y qu’elle s’agrippe, sachant pertinemment que Ame a une profonde aversion pour le fait de se retrouver couvert de terre. Et aussi pour le contact physique. Sauf avec Dai. Dai ne demande jamais—exactement comme Kagami, la seule différence étant que Ame a bien plus d’affection pour un monstre que pour quelqu’un qui partage son sang.

(Il tait la douleur que la poigne cause, les bleus sous ses vêtements.)

« Bien, je n’étais pas certain de vouloir prendre une douche, mais maintenant je présume ne plus avoir le choix, » qu’il lance, voix acérée. Ses mains pressent sur les épaules de la chose qui se prétend sa frangine, pour la repousser sans ménagement. Ame a toujours un temps de retard avec ce réflexe, incapable de se protéger instinctivement. Ah, si ça continue il finira par être incapable de se défendre ; pas que ça lui importe, « tu es dé-gueu-lasse. »

Aucun cri ne résonne en fond—preuve que sa famille s’est bien barrée. Il ne lui vient pas spécialement à l’esprit que ses parents puissent avoir oublier sa sœur, ou plutôt ce n’est pas son problème. Lui a quatorze ans et il s’en sort très bien en ne rentrant quasiment jamais.

Et puis, alors qu’il oscille entre vouloir pousser Kagami juste assez pour qu’elle tombe en arrière et disparaisse de sa vision ou bien aller directement piquer dans les fonds familiaux, Ame repère… L’invité surprise.

« Tu vas te faire tuer, » ça serait une première, que leurs vieux hurlent sur celle qu’ils ignorent. Il faut dire que Kagami n’est pas comme Ame, pas aussi mauvaise—lui est capable de balancer son bol contre le mur en plein repas, si on lui fait trop de remarques. C’est peut-être pour ça qu’il ne s’emmerde plus à dormir là en premier lieu, « vire moi ce chien de là. »

Premièrement, les animaux sont interdits dans leur immeuble, et ensuite Ame a une profonde aversion envers ces machins plein de poils. C’est sale, ça sent mauvais, et en plus ils sont moches. Et son expression furibonde doit très bien témoigner de ce qu’il ressent. Certes, c’est la première fois depuis une éternité que quelqu’un est content de le voir. Lui ne partage simplement pas ce sentiment.

« Je ne reste pas, je viens juste prendre de l’argent, donc fous-moi la paix. »

Ah, comme elle est heureuse ! Sa source de distraction principale est revenue !
Elle est habituée aux interactions plus ou moins sèches lorsqu'il s'agit du "frangin du milieu". Elle a appris à les apprécier.
Il l'aime, s'il interagit avec elle. C'est juste qu'il ne sait pas le dire...

- ... tu es dé-gueu-lasse.

- Toi aussi, hihihi.

De loin (c'est-à-dire, à quelques centimètres d'Ame), la fillette observe son œuvre. Ça y est, la boue et la poussière recouvrent le cadet, principalement son pantalon, ainsi que les mains qui l'ont poussée tout à l'heure.

- Tu vas te faire tuer.

La benjamine ne peut s'empêcher de pencher la tête sur le côté, sans savoir ce dont il était question ici.
Suivant alors le regard de l'adolescent, elle repéra le chien, faisant toujours le tour du propriétaire.

- Il est mignon, hein ??? Je l'ai appelé Kiba !!

S'exclama la petite, qui s'approcha de l'animal afin de mieux le prendre dans ses bras. Il gigote un peu, mais se laisse faire.
Le chien est blanc-brun à cause de la boue. Plutôt petit, gros yeux ronds, oreilles plus ou moins dressées, poil plutôt long et emmêlé. Oh, et clairement mal fichu et déjà cagneux pour son jeune âge, aussi.
C'est un Spitz. Ou du moins, un résidu de Spitz. Il a dû être croisé une fois ou deux avec une autre race, pour résulter à... ça.

Kagami, jusque là ravie, lâche un énorme soupir ennuyé lorsque tout chez son frangin -son expression, ses mots- lui font comprendre que Kiba n'est pas le bienvenu à la maison.

- Je ne reste pas, je viens juste prendre de l’argent, donc fous-moi la paix.

- Et tu vas sortir en étant crade ? Beh... t'oserais jamais. Et pis, je peux pas venir avec toi ?

Elle louche sur la trace de terre qu'elle a gentiment laissé sur ses fringues, ravie de sa bêtise, puis lève les yeux pour jeter un regard implorant à son grand frère préféré.

- Comme ça je repose Kiba dans la rue et je sors pour manger un truc ! J'ai faim, moi. L'autre, il s'occupe même pas de moi. Il m'a même pas dit bonjour... ensuite moi je rentre, et toi tu fais c'que tu veux.

Juge bon de se justifier la fillette, sans se défaire de son air de chien battu.
S'il ne dit pas oui tout de suite, elle passera au chantage. Il lui en faut peu pour trouver quelque chose de valable...
Mine de rien, elle a peut-être l'air idiote, elle n'en est pas moins maligne pour autant, et malgré une certaine naïveté, elle a tendance à faire preuve d'une certaine ruse, pour son âge.

AME&KAGAMI

Insolent and out of character. We’ve changed so much. I barely recognize our formative lives| FRIMELDA

Un jour, Ame va détruire le peu qu’il lui reste au sein de cette famille, et il entrevoit cette possibilité tel un soulagement et non pas une punition. La saleté sur ses habits provoque un profond dégoût qui lui donne envie de la blesser—de s’isoler et de disparaître là où personne ne pourra le voir. Si on est incapable de conserver un semblant de beauté, comment peut-on être aimé ? Il aurait peut-être été mieux qu’aucun d’eux deux ne vienne au monde, non ?

« Je déteste les animaux, et ils me rendent bien la pareille, » qu’Ame répond, son ton plein de dédain. S’il les traitait mieux, les bestioles, certainement qu’elles ne seraient pas aussi hostiles. C’est que l’adolescent n’est pas capable d’aimer deux êtres à la fois, encore moins ceux qui ne peuvent pas. Ah, il aurait tellement de vérités terribles à balancer dans la figure de sa sœur, mais il ne le fera jamais, se contentant de méchancetés distantes à la place.

« La faute à qui, si je suis sale ? » Un rapide passage dans la salle de bain puis dans leur chambre suffira à régler ce problème ; Ame prend toujours des douches brûlantes et courtes, évitant la baignoire avec soin. Il ne supporte pas de se voir sans vêtements trop longtemps ; une myriade d’incohérences qui lui saute aux yeux dès qu’il ose se regarder dans un miroir. Kagami n’a jamais rien pigé, et elle est bien trop stupide, top prisonnière de sa propre calamité pour le comprendre. Ame, au moins, est la bête informe et cruelle de la famille. Kagami, elle, n’est rien du tout, outre une ombre dans un coin.

A son âge, elle devrait savoir ouvrir le frigo et se nourrir sans aide—quoique peut-être qu’un adulte devrait les surveiller, ou s’intéresser à ce qu’ils font. C’est beau de rêver. De toute façon, comme souvent les placards doivent être vides, personne ne s’étant donné la peine d’aller en courses. Ame ne vit plus vraiment là, donc ça ne le concerne pas.

« Tch, si je te donne de l’argent, tu peux bien aller au magasin sans moi, je n’ai pas que ça à faire—ce n’est pas de ma faute si tu t’ennuies. »

Lui a Daisuke.
Ses doigts pressent contre sa mâchoire meurtrie, juste assez pour lui rappeler l’importance d’un tel amour.

« A cause de toi je dois me doucher avant de repartir—et passer à la laverie ensuite, » S’il portait ses propres vêtements, il s’en fouterait royalement, de les laisser choir sur le sol de la chambre. Sauf que là, c’est un haut qu’il a emprunté à son pseudo-ex, et ça ne serait pas un bon plan de ne pas lui ramener, « vire le chien. »

Passant à côté de sa sœur sans lui accorder un regard, il atteint la chambre parentale, ouvrant l’armoire d’un geste sec. Juste là, caché entre deux couettes, se trouve exactement ce qu’il cherchait ; quelques billets pour un week-end fantastique. Ou tout du moins correct.

« L’autre est à la fac, non ? » Qu’il lance soudainement en revenant vers l’entrée, « ça m’étonnerait qu’il rentre ce week-end. » Oh. Leurs parents, eux aussi sont absents.

Le ricanement qui échappe à Ame est plein de méchanceté, tandis qu’il tapote sa propre joue avec deux doigts.

« Ils t’ont a-ban-donnée~ »

Honnêtement, Kagami ne savait pas trop pourquoi elle s'entêtait à écouter Ame. Après tout, ils n'étaient jamais sur la même longueur d'onde, et l'un comme l'autre lançait des paroles en l'air.
Pourtant, elle espérait à chaque fois qu'il laisse enfin échapper un petit mot gentil, rassurant; en vain.

- La faute à qui, si je suis sale ?

- À la terre dehors. Le sol, c'est sale. Si le sol était pas sale, je le serai pas aussi, donc toi non plus.

Jugea bon de répondre la fillette, usant du tac-au-tac par simple envie, par simple besoin d'avoir le dernier mot.
Ame la prenait souvent pour une idiote. Alors, elle se dédouanait comme elle le pouvait, et tentait de faire de même.

- Tch, si je te donne de l’argent, tu peux bien aller au magasin sans moi, je n’ai pas que ça à faire—ce n’est pas de ma faute si tu t’ennuies.

- Okay.

Et sur ce, la voilà qui se fait accuser de tout et n'importe quoi. Bah, ça lui passe bien au-dessus de la tête, à Kagami : on rentre forcément crade quand on est de sortie, non ? Même si ce n'est pas visible.
C'est pas logique ?

Elle lance un regard de mort à son frangin quand il passe à côté d'elle en l'ignorant, tout en demandant de "virer le chien". Eh bien, le chien, il était clairement plus sympa que lui, déjà.
Pas sûre qu'elle ait réellement envie de le virer. Pourtant, elle arrive à le pousser négligemment dans un placard à portes coulissantes pour le récupérer plus tard.
Dans un sens, pourtant, personne n'allait rien lui dire.... justement parce qu'il n'y avait jamais personne dans cette maison.
Du moins, c'est ce qu'elle se dit.

- L’autre est à la fac, non ? Ça m’étonnerait qu’il rentre ce week-end. 

Bref haussement d'épaules de la part de la petite. Leur aîné était si peu présent habituellement qu'à force, elle allait bien finir par l'oublier.
C'est que des fois, elle pense qu'il est simplement affalé à son bureau, alors qu'il s'agit d'une bête pile de livres...
La solitude est pesante, finalement.

- Ils t’ont a-ban-donnée~ 

- Bah toi au-ssi.

Qu'elle répond aux provocations d'Ame, sur le même ton, avec un tirement de langue en prime.
Après tout, le cadet sera bien obligé de rentrer à un moment aussi à la maison, non ? Et il se retrouvera tout seul aussi. Elle n'ira même pas lui dire bonjour.

D'ailleurs, elle allait l'ennuyer en allant se laver avant lui. Et toc. D'un pas sautillant et surtout sans rien dire, la fillette se dirige donc vers la salle de bain, où elle fait couler l'eau très vite tout en se deshabillant à la même vitesse - un oeu plus et elle finira par se fracasser les genoux sur le sol avec sa maladresse.
Mince, elle a oublié des vêtements propres. Tant pis. Elle s'emballera d'une serviette et puis c'est tout. Là, son but est accompli.

- C'EST MOI LA PREMIÈRE !!

Qu'elle braille sur son pire ton de petite peste, sans même prêter attention à l'eau qui lui coule dans les yeux.

AME&KAGAMI

Like the way you fall asleep in a swaying train
Like the way you work without taking rest
Like the way you whittle away at your own life to continue living| FRIMELDA

Les pathétiques excuses—qui ont plus à voir avec une tentative vaine de paraître plus maligne qu’elle ne l’est—de Kagami sont une nuisance sonore dont Ame se passerait bien. Il ne supporte plus rien, quand il met les pieds dans l’appartement aux allures de demeure fantôme, ni sa sœur, ni leurs parents, ni le vide logé quelque part dans sa poitrine. Alors il ne rentre plus, c’est simple dans le fond. Il n’a qu’à se trouver des opportunités, à s’incruster auprès de Daisuke jusqu’à ne plus se souvenir de rien sinon du goût de la bière qui le rend malade et des cliquetis des touches sur les bornes d’arcade.

Kagami ne comprend rien, ce n’est pas nouveau. Personne n’abandonne Ame, c’est lui qui part, toujours. Même avec Sawada, quand il a poussé contre son épaule, que la chute dans l’escalier a détruit tout ce qui restait entre eux, c’était son choix. Tout est sous contrôle, même l’amour.

Il ne sera jamais abandonné par quiconque. Impossible !

« Moi, au moins, mes amis ne sont pas des chiens errants qui puent, » qu’il marmonne, en tirant la langue en retour, « toi qui ira t’aimer ? »

Eh, il devrait cesse de répéter ce que dit Daisuke.
Son regard glisse vers les billets, qu’il compte méticuleusement à plusieurs reprises, calculant avec une moue concentrée. S’il gère bien, ça devrait bien se passer. Pourquoi est-ce que ça serait son problème, d’abord, si l'autre n’a pas de thune ? Son ex-quelque chose qui passe son temps à voler ne devrait pas compter sur lui pour ces trucs.

Merde, Kagami.

Sa saleté de voix résonne dans l’appartement—Ame n’aimerait pas qu’elle meurt, uniquement qu’elle disparaisse—et il hurle presque immédiatement.

« Je te laisse trois minutes et après je te vire de là ! » Oh, il n’hésitera pas. Plaçant la thune sur un meuble, il s’élance dans le couloir, donnant un brutal coup de pied dans la porte de la salle de bain. Puis un second, pour faire bonne mesure. « Pas une de plus. »

La penderie de leur chambre ne contient quasiment plus rien à lui—Ame ignore s’il a grandi et que plus rien n’allait sans que ses parents ne s’en préoccupe, ou si il n’avait de base pas grand-chose. Tout est à Daisuke, stocké en piles informes dans la chambre de ce dernier. Ce que l’adolescent porte, c’est des bouts qui traînent, ce qui passe et qui n’est pas trop déformé, pas trop meurtri.

Ame cache trop son corps, ou bien pas assez. Tout est une question de maquillage, d’humeur, d’une pointe de rage qu’il ne peut retourner que contre lui-même.

Il se sert dans les affaires de Yuta, dans des machins neufs jamais portés—qui verrait cet abruti en short et débardeur de toute façon ? S’asseyant au bureau, il vire tout ce qu’il y avait dessus d’un geste sec, éclatant de rire au bruit sourd des manuels et autres choses inutiles qui terminent sur le sol.

Quant au petit miroir caché sous tout ça, et bien Ame n’apprécie guère l’image qu’il lui renvoie. Par terre aussi.

« Les trois minutes sont écoulées~ » Qu’il annonce avec une joie malsaine, oubliant déjà l’idée de se remaquiller pour retourner dans le couloir, les fringues de Yuta par-dessus son épaule, « Ouvre ou je te tru-ci-de. »

Elle en a foutu quoi du clébard d'ailleurs ? Il n'a pas fait attention.

A travers le bruit de l'eau qui coule, une voix autoritaire résonne :

- Je te laisse trois minutes et après je te vire de là !

Oh, qu'est-ce qu'il n'avait pas été dire. Le coup de latte donné dans la porte fut suivi d'un bruyant décompte qui allait durer environ trois minutes, entrecoupé de gargouillis d'eau et de toussotements - Kagami avalant de l'eau involontairement, de temps à autres.

- Cinquante-huit, cinquante-neuf...

- Les trois minutes sont écoulées~ Ouvre ou je te tru-ci-de.

- Soiiiiixaaaante... j'arrive !!

Une tornade. Un boulet de canon. Sans même vérifier si son frère se trouvait, ou non, derrière la porte, Kagami l'ouvre d'un grand geste, sortant comme une furie d'un nuage de vapeur.
Il y a ses fringues en boxon dans la salle de bain, des flaques de flotte sur le sol, des traces de pas mouillées et des gouttelettes dans le couloir. Enveloppée dans sa serviette, la fillette menace de se rétamer à chaque foulée mais atteint sa chambre, claquant la porte dans son empressement.

Comme elle ne sait pas quoi mettre, et qu'elle se fiche bien de son style en général, elle fouille négligemment dans une pile de sous-vêtements qui finit plus ou moins sur son lit, puis prend la première robe qui vient - un truc rosé au style simple et ample - avec des chaussettes blanches pour aller avec.
C'est en se frottant vigoureusement la tête avec sa serviette qu'elle ressort finalement, se dirigeant en titubant dans le couloir, sa serviette lui bouchant la vue. C'est une fois retournée devant la salle de bain qu'elle annonce :

- Trois minutes.

Dans la penderie à portes coulissantes, le chien commence à s'impatienter et gratte furieusement. Et de derrière la porte, une odeur nauséabonde commence lentement mais sûrement à circuler dans la pièce.

AME&KAGAMI

I've done nothing wrong. Except for all the atrocities, besides that I'm innocent.| FRIMELDA

Honnêtement, si Kagami venait à se noyer pendant sa douche, ça serait la merde.
Déjà, Ame porterait le chapeau alors que, pour le coup, il est parfaitement responsable et mature en attendant derrière la porte, et ensuite ses parents ne s’en rendraient même pas compte de la présence d’un cadavre dans la salle de bain avant plusieurs jours.

Quelle famille de dégénérés.

“Putain, Kagami—” Il évite de justesse la tornade qui menace de lui rentrer dedans comme un joueur de baseball au regard fixé sur la balle, au détriment des autres joueurs sur le terrain, et déjà elle s’est cassée. Tant mieux.

“C’est bien, t’as mis de la flotte partout dans le couloir,” qu’il marmonne, refermant la porte de la salle de bain derrière lui.

Sa douche est brève, juste ce qu’il faut. De toute façon, la terreur serait capable de se jeter sur lui s’il dépassait les trois minutes autorisées. Ame se plaint sans aucun public pour l’écouter, enfilant débardeur et short par-dessus un corps encore mouillé. Il glisse la thune dans sa poche, histoire de ne pas l’oublier.

“Parfaitement dans les temps, et je suis étonné que tu saches compter,” elle est en quelle classe déjà ? Pas la moindre idée, il fait coulisser la porte, lui tirant la langue.

Et vient l’odeur—”y’a un truc mort dans l’appart ou quoi ?” L’aboiement qui suit est un très bon indicateur de la connerie de la gamine, et Ame soupire, lourdement, “t’aurais pu l’attacher dehors, je sais pas, s’il a chié dans la penderie bonne chance pour nettoyer.”

Pourtant, Ame n’a pas l’air si affecté que ça, sans doute parce qu’il ne vit plus là, “va chercher ton clébard puant, qu’on aille au magasin. J’ai changé d’avis, tu peux venir, mais tu laisses le truc dehors.”

Pas qu’il se sente d’humeur charitable, mais si il lui donne de la thune directement, elle va acheter n’importe quoi. “En vrai nettoie pas derrière le truc, ça fera une surprise aux parents.”

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I am neither a child not an adult. I am a botched, failed creature, combining the worst qualities of each.| FRIMELDA

Qu’est-ce qu’elle est bruyante, à tout renverser uniquement pour provoquer un mal de crâne chez son frère—ouais, ouais, ce n'est certainement pas le but recherché. Juste que Ame s’agace d’un rien, qu’il est à fleur de peau en permanence ces derniers temps, et Kagami aide pas. C’est une étrangère, une sorte de fantôme qui refuse de hanter l’appart familial en silence ; elle est plus du genre ectoplasme gluant qui fait un boucan pas possible.

“En route, démon miniature, j’ai pas que ça à faire.” Avec un peu de chance, le clébard décidera d’aller voir ailleurs, parce que urg, Ame n’a pas envie de se coltiner deux chiens mal éduqués d’un coup.

L’air humide s’abat sur lui dès qu’il met un pied dehors, dévalant l’escalier métallique sans perdre de temps. Quant à Kagami et ses petites jambes, bah elle a qu’à faire un effort aussi. Le magasin est au coin de la rue, donc ça ira vite. Flemme d’aller au plus grand qui est à l’autre bout du quartier.

“Tu vas devenir quoi toi, dans cette ville de merde ? Non parce que tu vas finir par grandir.” Ame sait pas trop ce qu’il essaye de dire, et il tape dans un caillou qui va heurter un muret un peu plus loin, “les parents vont éventuellement se souvenir que t’existes. Tardivement, certes, mais tu vas morfler.”

Toutes les phrases à la con sur le fait de devenir une bonne épouse, d’apprendre la cuisine, de bien se comporter—des fois Ame a l’impression d’avoir échappé au pire, et en même temps, il a cette boule au ventre, comme s’il était en train de louper un truc important. “Les commères du voisinage font finir par réaliser que t’es une sorte de chien sauvage.”

Elle a quel âge Kagami déjà—il n’est même pas certain de se souvenir de son anniversaire. Quel frère minable. Bah ça lui en fait deux comme ça, parce que Yuta est probablement pas mieux.

“Le seul truc qui peut émouvoir les parents c’est l’idée de perdre leur précieuse réputation. Ils font comme si j’existais pas, donc ça m’arrange, juste que ça c’est pour moi. Toi t’auras un autre traitement.”

Si ça se trouve elle l’écoute même pas, la connaissant. Ame secoue la tête, agacé. “Faut que tu te trouves un plan de secours, ou des potes qui soient pas des trucs à quatre pattes.”