T'as l'air de te calmer un peu, et Her souffle enfin. C'est que ta pluie de compliments, là, elle ne sait pas trop quoi en faire. Oh, oui, quelque part ça lui fait plaisir. Bien sûr. Mais y a toujours cette gêne, quand même. Ne pas dépasser des clous ? Pas tant, plus tellement. Surtout ce truc qui bizarre qui la stress, cette foule de messages et signaux qu'elle refusait d'admettre. Qu'elle refuse toujours, même si c'est plus délicat maintenant qu'il en rajoute des caisses. Elle l'avait presque admis par moment elle-même. Faut dire que Pretty avait été clair, lui aussi.

Apache t'aime bien.

Et si..? Et si c'était vrai ? Nouvelle bouffée de panique qui lui colore un peu les joues alors qu'elle te tourne le dos pour vérifier autour de vous si rien ne traine. Peut-être que tu l'aimes bien, au fond. Et en tête lui reviennent toutes les peines de bannissement dont elle se souvient. Elle a un peu peur de ce constat, c'est la porte ouverte à plein d'emmerdes qu'elle se dit. Et puis Apache.. Apache, est-ce qu'elle veut vraiment s'en rapprocher ?

Her se retourne vers toi d'un coup, surprise par ta question. La seconde, parce que la première elle l'a vaguement ignoré, ne l'ayant entendu qu'à moitié. Avec un air un peu ailleurs, comme quelqu'un qu'on réveille, Her te fixe un peu en clignant des yeux. Il lui faut quelques instants pour atterrir, et la sentinelle te fait la moue.

- Vaut mieux être prudent, je dirais.

Prudent contre quoi ? Contre qui ?
L'île ?
Apache ?

Cette question interne, formulée aussi directement, lui donne l'impression d'un uppercut. Un léger reniflement nerveux, Her se redresse, et se dirige d'un pas vif vers la porte. D'un geste, elle ouvre.. Et écoute. C'est calme, dehors. Pas aussi joli que ce qu'elle pensait. Ni aussi propre. Ni.. Elle n'est pas rassurée, Her. Mais elle ne sait pas trop pourquoi, ni contre qui ou quoi. C'est juste comme ça, elle a juste ça : des nerfs à vifs. Faut qu'elle s'endurcisse. Qu'elle soit plus forte.

D'un coup elle sort de l'encadrement et ferme la porte sèchement. Pourquoi elle est venue ici ? Elle voudrait soudain être dans son lit, sous la couette. sans pensées chiantes ni stressantes. Tranquille, toute seule. Ou avec Pretty, ça aussi ça lui irait. Son petit rayon de soleil mesquin adoré, elle ne s'occupe pas bien de lui en ce moment. Faudra y remédier.

- Prends ton épée . J'me méfie de l'île, on ne sait jamais c'qui peut nous tomber dessus.

Faudra qu'elle se trouve autre chose, sa lance, elle l'avait laissé au Grand Arbre. C'est son arme de service. Et c'est bien trop encombrant pour qu'elle ne l'emmène en balade. Mais intérieurement, Her jure. Elle aurait voulu l'avoir, pour une fois. Même si elle sait pertinemment que même avec, elle aurait été stressée quand même. Une lance contre qui, contre quoi ? Elle n'est même pas assez bonne avec, faut qu'elle le travaille. S'endurcisse.

C'est comme une obsession. Plus forte, plus forte, toujours !

Pour tenir contre le monde, contre les gens, pour les gens. Des gens comme Apache, pour le contenir et l'empêcher de faire d'autres conneries. Pour le proteger de ce qui pourrait venir d'au-dehors. Plusieurs fois elle s'était demandé pourquoi diable elle avait décidé de s'auto-proclamer son gardien, à celui-là. Mais maintenant, c'est plus fort. Plus impérieux. Il ne s'agit pas juste de le couver, mais aussi de pouvoir le mater s'il part en vrille. Nerveusement, sa main blessée se contracte. Le contrer autrement qu'en y laissant des morceaux d'elle en tout cas.

Apache l'aime bien. Her commence à s'y faire. Et elle ? Bonne question. Il y a quelques temps, la Fille aurait été plus troublée, plus indécise. Contente aussi, en un sens. Aujourd'hui.. Elle se demande comment se préparer.

Her n'avait pas réalisé qu'un truc s'était cassé, ni qu'elle n'était pas certaine de vouloir le recoller. Avoir confiance, ne pas se méfier, ne pas redouter le moment où il ferait un truc con à réparer. De jeune endormie du coeur, Her devient Sentinelle toute entière.

"Vigilance constante", est-ce bien compatible avec "se laisser aller" ?

La Fille se retourna brusquement vers le punk, lui faisant ouvrir de grands yeux surpris, et puis, au bout de quelques secondes de battement, alors qu'Elle semblait être en prise avec une nervosité visiblement grandissante, elle répondit.

- Vaut mieux être prudent, je dirais.
L'Hérissé n'eut le temps que d'ouvrir la bouche pour peut être ajouter quelque chose, mais la sentinelle se dirigea soudainement d'un pas vif vers la porte, forçant le métisse à se reculer d'un pas puisque déjà, elle se saisissait à son tour de la clanche pour l'ouvrir d'un geste nerveux.

Un silence.
Elle écoutait.
Elle observait.

Apache, lui, n'avait même pas regardé ce qu'il y avait derrière cette porte, se contentant d'observer sa camarade avec une mine un peu inquiète.
Pourquoi est ce qu'elle semblait aussi stressée d'un seul coup ?
Pourquoi le moment de détente s'était-il si brusquement envolé ?
Pourquoi d'un seul coup, tout semblait dangereux dans les yeux bruns de Her ?
Même lui ?

La porte se referma sèchement, laissant réapparaitre une Her au visage crispé et contrit, faisant presque sursauter le punk.

- Prends ton épée . J'me méfie de l'île, on ne sait jamais c'qui peut nous tomber dessus.
Une moue de travers en réponse, les sourcils froncés mais pas autant que ceux de la Fille qui maintenant semblait regretter de ne pas être Elle même armée.
Et c'était étonnant, presque bizarre de pouvoir lire en Elle aussi facilement.

D'habitude, Her ne se laissait pas autant submerger par ses émotions, Elle ne les laissait pas si facilement transparaitre. Elle avait ce Poker Face ultra efficace qui témoignait de son sang froid et de son contrôle.
Quelque chose avait changé.
Il l'avait vu, déjà, quelque chose avait changé.
Elle lui avait dit, surtout, que quelque chose avait changé.

Her n'avait plus confiance.

Plus confiance en lui.
Plus confiance en Elle ?

Elle avait peur.

Devant ce constat, le punk pinça les lèvres, se les humectant, puis, sans rien ajouter, obéis à l'injonction qu'Elle lui avait servit sans doute même sans s'en rendre compte, s'éloignant d'Elle, disparaissant une seconde et revenant son épée à la main accompagnée de ce qui lui servait d'attache; un bête morceau de cuir, comme une ceinture noire émaillée à laquelle on pouvait fixer la lame en la glissant dans un cercle de cuir prévu à cet effet.
La mine un peu éteinte, il lui tendit la fameuse épée, son dorée atypique reflétant la lumière environnante, arme si particulière et unique.

"Tiens, prend la." Il haussa les épaules comme pour répondre à la question évidente qui allait venir. "J'en aurais pas besoin." Et c'était un peu bizarre, comme affirmation.
Sur son visage, c'était comme une expression d'abandon, peut être même de lassitude fasse à quelque chose, il lui fit cependant un sourire, au final.

Non, ce n'était peut être pas tant de la fatigue ou de la lassitude qui transparaissait.
C'était le calme, tout simplement.
Le calme face à l'agitation de Her.

Quoi qu'il arrive.
Il avait confiance.

Et si c'était ça qui lui faisait peur, à la Fille ?

Elle n'avait rien trouvé. Restant pensive le temps que tu ailles chercher l'épée, elle prend le temps de réfléchir. Et ça l'aide, ça la calme. De rationnaliser, d'analyser. De démêler un peu les raisons de cette pointe de stress pas trop anticipée. C'est un mélange de fuite en avant avec tes compliments, et la claque qu'elle s'est prise d'enfin réaliser que peut-être bien que tu l'aimes bien, ou en tout cas que tu aimes bien l'image que tu as d'elle. Ca, et un rappel des grands méchants que tu as invoqué avec ta question, les gens comme Big Jack, et les monstres. Les trucs contre lesquels elle ne peut rien, et contre lesquels elle se sent impuissante maintenant qu'elle les voit.

Plus forte. Il faut qu'elle soit plus forte.

Et plus calme. Plus solide. Les sentiments faussent le jugement, l'instinct peut-être salvateur mais également traître. Prenant une profonde inspiration, Her se recentre sur ça, et se calme. Quand tu reviens, elle se tourne vers toi et visiblement la Fille est de nouveau elle-même. Y a encore un peu d'étincelles dans son regard, mais ce n'est plus de la peur. C'est de la volonté. Plus forte, plus solide, plus stable. Ne plus se laisser avoir par les émotions trop facilement, en reprendre le contrôle sans les couper pour autant. Au moins assez pour ne plus se perdre et vaciller. Pour ne plus se faire atteindre trop facilement, par un peu tout et n'importe quoi. Y compris par toi. C'est en tout cas ce qu'elle va essayer de faire, et sans doute qu'au début il y aura des ratés. Mais c'est comme l'entraînement : avec le temps et la pratique, ça viendra.

Quand tu lui tends l'épée, Her la regarde comme pour considérer la question, et finalement secoue la tête. Avec un léger sourire, elle te fait signe de la garder sur toi.

- C'est pas mon épée, c'est pas à moi qu'elle obéit. Je ne saurais pas la manier de toute façon. J'ai peut-être pas ma lance, mais j'ai toujours ma tête et moi entière pour me battre si besoin. Et puis passer une lame, paraît que ça porte la poisse.

Elle couvrira tes arrières, tu n'auras qu'à couvrir les siennes. N'est pas Dieu qui veut, et Her n'a certainement pas la prétention de pouvoir tout vaincre. Se tournant à nouveau vers la porte, la Fille hausse des épaules et te fait signe de la tête pour t'inviter à y aller.

- Moi c'est bon. Si t'es prêt, on peut y aller. Mais j'te préviens, ça a changé. C'est plus trop un truc de super héros, j'ai mieux compris pourquoi tous les costumes sont esquintés quand j'ai vu la gueule du truc.

Et si tu dis que tu es paré aussi, la Fille s'avancera vers la porte et l'ouvrira sans flancher, prête à dézinguer les merdes qui se pointeront.. Ou en tout cas à essayer, s'il y en a.

"C'est pas mon épée, c'est pas à moi qu'elle obéit." Elle avait refusé, pas méchamment, pas brusquement. "Je ne saurais pas la manier de toute façon." Apache acquiesça doucement de la tête, baissant la main qui tenait toujours l'arme. "J'ai peut-être pas ma lance, mais j'ai toujours ma tête et moi entière pour me battre si besoin." La remarque arracha un sourire au punk, mais au fond, il était un peu déçu. Pourquoi ? Ça c'était un peu flou, même pour lui. "Et puis passer une lame, paraît que ça porte la poisse." Un regard vers la lame dorée alors qu'il la retournait avec une mine songeuse et que l'or du métal semblait absorber toute la lumière.
Ça portait malheur ?
Vraiment ?
C'est pas mon épée.
En en arrière fond, l'histoire de cette arme qu'il tenait dans sa main. Cette histoire qui lui avait été conté par un monstre. Son forgeron. Lui même.
Big Jack.
C'était pas son épée a lui non plus, au fond...

"Moi c'est bon." Le garçon releva ses yeux noirs fraichement maquillés vers la sentinelle. "Si t'es prêt, on peut y aller. Mais j'te préviens, ça a changé. C'est plus trop un truc de super héros, j'ai mieux compris pourquoi tous les costumes sont esquintés quand j'ai vu la gueule du truc." Une nouvelle fois, l'Hérissé acquiesça silencieusement juste avant de ranger l'épée à sa hanche dans un bruit caractéristique. "C'est bon pour moi aussi !" Et c'était marrant d'une certaine façon, de voir la Fille se préparer au pire, la mine tellement sérieuse et visiblement prête a en découdre. Assez drôle tellement tout ça dénotait d'avec sa tenue colorée bardé de grosses étoiles. Cela fit souffler un rire au chasseur dont le sourire resta la, bien installé sur ses lèvres. Un sourire sincère qui chassait les nuages.
"C'est parti !"

Et tout deux se tournèrent vers la porte, l'empruntant enfin, traversant un quelque chose d'invisible pour se retrouver dans un tout autre univers, un tout autre monde, une toute autre ambiance.
Du gris et du noir à perte de vu. Du béton, des trottoirs, des vitres brisées. Comme une impression bizarre de familiarité sur quelques détails, quelques sensations qui revenaient au punk sous forme d'un frisson bizarre qui lui remonta l'échine.
Cette atmosphère ne lui été pas inconnue et sentait le vieux, le "il y avait très longtemps" et pourtant, cela resta à l'état de sensation un peu amère sans jamais se fixer sur quelque chose de tangible, de descriptible.
Une ville délabrée.
Le vent soufflait, faisant frissonner une seconde fois le garçon trop peu couvert qui jeta un œil à sa camarade.
C'était fou comme sa robe cassait la grisaille environnante !
Comme un petit bout de chaleur et de merveille à Elle toute seule.
Ca rappelait le jeu, ca rappelait le magie et ça le renvoyait à ce pourquoi ils avaient décidé de venir ici !
Soit; s'amuser !
Quelle drôle d'idée.

"Ca donne envie d'explorer !" Lança t-il avec des yeux brillants. Et il n'y avait rien de plus vrai à son sens. Tout en marchant, les deux révoltés avaient longé une grande rue bordée d'immeubles aussi haut les un que les autres, tous à l'aspect abandonné depuis des lustres.
A l'horizon, il n'y avait pas âmes qui vivaient, du moins, l'endroit semblait parfaitement désertique.
Pas de danger immédiat à déplorer.
Un vieux papier journal transporté par le vent se colla soudain à la cuisse du punk, le faisant baisser les yeux et récupérer le dit papier juste avant d'y jeter un œil, les sourcils froncés, et soudain, sa mine s'éclaira, un sourire tranchant son visage même si cela restait un peu de travers. "C'est du français !" Qu'il lança, lisant les quelques lignes qui ne s'étaient pas encore effacé avec le temps. "Le ministre de l’intérieur enjoint tout les résidents de la cité à se barricader chez eux, garder contacte avec les proches ainsi que de se maintenir informer des nouvelles à venir."
Qu'il avait traduit avant de se re-focaliser sur le décors, pas troublé pour une seule seconde.

T'as pas l'air d'être ravi, quand elle ne prend pas l'épée. Tu ne rechignes pas non plus, mais ton manque de répondant marque Her. Tu es décidément très calme. Trop presque. Ca ne te va pas, ça ne te ressmeble pas. Il se trame quoi, le punk, pour que tu sois si docile et silencieux ? Elle te jette un coup d'oeil curieux, rapidement, sans rien dire. C'est peut-être juste elle qui est parano ? Qui pense trop ? Ca ne serait même pas étonnant.

- Ok !

T'as dit que tu étais partant, allons-y donc !  Et de nouveau, la Fille passe par l'ouverture. Mais cette fois, tu es avec elle.

Her t'avais prévenu : c'est un peu moche. Tout est gris, rectangulaire ou carré. De grand bâtiments à moitié effondrés, de la crasse un peu partout. C'est un endroit mort, qui a l'air d'avoir un lourd passé mais un avenir mort-né. Plus rien ne vie, ici. Tout juste peut-on survivre, mais ce monde là ne plait pas vraiment à la sentinelle. Trop gris, trop pourri. Où est la verdure ? La nature ? Un peu mal à l'aise par le calme mort qui vous accueille, Her reste sur ses gardes et observe autour de vous. Elle n'aime pas cet endroit.

Tu te remets soudain à parler, et la Fille se tourne soudainement vers toi, comme surprise. C'est qu'elle avait un peu oublié, pour le coup. Pas très sympa, ça. Quand tu t'exclames et que tu traduis le journal, Her fronce des sourcils. C'est bizarre, quand même, ce papelard. Immobile, elle incline la tête sur le côté et réfléchit quelques instants. Quand sa voix résonne à nouveau, c'est en articulant les mots lentement. De toute évidence, Her est encore pensive.

- C'est bizarre que le journal soit en français, quand même. Ca n'a pas de sens. On parle surtout anglais, ici.

Véridique. A moins que l'île ne veuille être exotique, et varier les cultures ? Ca ne serait même pas étonnant, tout est tellement foutrac par ici ! Et puis ce que dit le journal, enfin, ce que tu en as lu en tout cas, c'est bizarre. Un MInistre de l'Intérieur ? Ca veut dire que y en a un de l'Extérieur ? Mais ça veut dire quoi, intérieur de quoi ? Un très, très vague souvenir lui souffle que c'est en rapport avec les gouvernements, les grands pontes avec des noms à rallonges pour expliquer leur boulot.

- Mais bon, en gros ça dit qu'il s'est passé ou qu'il se passe encore des merdes, quoi.

Si on résume, ouais, c'est un peu ça le message. Pourquoi vous aviez pris cette porte là, dejà ?

- Bon.. Si ça pue trop, on devrait pouvoir quand même se casser, je suppose.

Un nouveau regard autour.

- Mais c'est quoi leur problème, à rien vouloir de naturel ? Y a pas d'arbres, rien !

Ca la travaille un peu, quand même.

"C'est bizarre que le journal soit en français, quand même." "Mm" Apache avait acquiescé de la tête. "Ca n'a pas de sens. On parle surtout anglais, ici." "Ouais c'est clair..."
- Mais bon, en gros ça dit qu'il s'est passé ou qu'il se passe encore des merdes, quoi.
- En gros c'est ca!
- Bon.. Si ça pue trop, on devrait pouvoir quand même se casser, je suppose.
- Ouais, y a pas de raison de flipper, j'pense.
Il fallait dire que pour l'instant, il n'y avait pas de danger à constater dans l’immédiat. C'était ce qu'on pouvait appeler le calme plat. Pas un chat à l'horizon, bien que celui ci ne soit de toute manière pas visible, tout entouré d'immeubles hauts qu'ils étaient.

"Mais c'est quoi leur problème, à rien vouloir de naturel ? Y a pas d'arbres, rien !"
- Bah c'est ça la ville. Un peu comme s'il connaissait. Comme s'il était familier avec tout ce gris, tout ce béton, toute cette dureté. Et même un sentiment de nostalgie, quelque part.
L'iroquois du macadam ne regrettait pas sa vie d'avant. Il avait beau cracher sur le système du Grand Arbre, de l'Ile toute entière même, jamais il ne prétendrait que c'était mieux avant. De toute manière, il n'avait pas matière à le faire, ses souvenirs de cité dévorés depuis bien longtemps maintenant.
Il ne regrettait pas, mais il y avait comme un quelque chose qui lui serrait le cœur.
On avait beau avoir conscience de la laideur d'un endroit, de la tristesse, de la souffrance qui y galopait, lorsque tout cela nous renvoyait à notre plus tendre enfance, il était difficile de contrôler ce sentiment qui nous prenait.
Retour aux sources, dans ces rues sales, longeant les murs rugueux et tagués.

"J'ai l'impression de connaitre cet endroit." C'était bizarre. Il s'y sentait bien, avec ça. "Peut être que ça devrait me rappeler quelque chose." Mais en l'occurence, mise à part ces sensations, il n'y avait rien qui lui revenait.

Et soudain, le chasseur fut coupé dans ses réflexions, un son étrange lui parvenant au loin.
"T'entend ça ?"
C'était comme le bruit de quelque chose qui heurtait le bitume avec régularité et qui s'avançait dans leur direction.
L'Hérissé se retourna, puisqu'il semblait bien que cela s’apprêtait à surgir plutôt de ce coté la, et quelle ne fut pas sa surprise en repérant finalement un cheval qui fonçait dans leur direction.

Un... cheval.

Le garçon s'écarta, s'éloignant de Her alors que l'équidé passait entre eux, continuant sa route sans ralentir, disparaissant presque aussitôt derrière une barre d'immeuble à une bonne centaine de mètres de la.

"...ok..."

Alors ça... Ca c'était pas courant.
Il y eut un temps de rien, avant que de nouveau le cheval ne se fasse entendre.
Un hennissement, et le bruit de ses sabots qui revenait un peu vers eux. Le cheval réapparu une fois de plus ayant visiblement fait demi-tour pour continuer sa course à l'opposé, disparaissant de nouveau dans une autre rue.

Hrp:

Pas de raison de flipper. Apache, n'as-tu donc aucun sens de la survie ? Elle te jette un regard en coin, en se demandant si tu le penses ou pas. Va savoir. Ca pourrait, comme nom. Mais elle est bien placée pour savoir que t'as un côte très insousciant, quoi que tu en dises. A minimiser les risques, à juste dire que "mais oui ça ira !" et à faire le mec plus ultra avec ta crète de coq. Her, elle trouve que c'est justement trop silencieux. Ses sens sont en alerte. L'avantage du bitume et du silence, au moins, c'est qu'on entend le moindre truc qui arrive. Entendra. Entendrait. Her ne sait pas trop comment conjuguer ça.

Vous avancez un peu, et d'instinct Her essaye de faire le moins de bruits possible en marchant. Une part d'elle craint les dangers qui pourraient vous tomber sur le museau. Mais une autre, enfouie plus profondément encore.. Une autre les attend de pieds ferme. Pour pouvoir s'énerver. Extérioriser toute cette énergie négative cumulée. Même si ce serait con, parce qu'elle n'est pas prête. Pas encore. Il faut s'entrainer, s'endurcir davantage. Sa volonté ne flanchera pas à ce sujet, elle le sait désormais.

- Ca te rappelle quoi ? Tu crois que c'est parce que c'est une ville ?

Elle tend l'oreille et entend le bruit sans doute en même temps que toi, ou pas loin. Aux aguets, oui. Le bruit se rapproche, régulier, lent, et absurde. Et pour cause : qu'un cheval se balade tout seul, comme ça. C'est chelou. Et qui galope en prime ? Ooouh elle a un mauvais sentiment. Et s'il fuyait quelque chose ?

Her s'écarte, trouvant étonnant que le cheval n'essaie même pas de dévier sa route. Comme s'il ne pensait qu'a galoper, juste partir, juste ça. Est-ce que c'est elle qui est parano ? Elle observe l'animal vous dépasser et disparaître non loin, non sans pincer un peu des lèvres.

- J'ai un mauvais pressentiment, Apache.

Adieu, Pataclops. Bonjour, silence de plombs.

Tout est vraiment trop calme, bien trop calme. Comme le calme avant la tempête. Et elle ne peut pas s'empêcher de se demander ce qui s'est passé ici. Mais entre les journeaux et ça..

pataclop pataclop pataclop

Quoi, il revient ? Et oui : l'animal ressort de la ruelle tout aussi frénétiquement qu'il y est entré. Il revient donc et bifurque vers une autre rue, tout aussi précipitemment qu'il était venu.

- J'aime vraiment pas ça. Il n'a aucune raison de galoper comme ça, et encore moins de changer d'un coup sa route, si ce n'est pour fuir quelque chose. Je sais pas ce que c'est, et j'ai pas envie d'attendre ici que ça nous trouve.

Vous êtes bien trop à découvert, avec vos costumes tout colorés, plantés comme vous êtes au milieu de la rue. Tournant sur elle-même lentement, Her fait un cercle complet en observant les alentours. C'est autant pour mémoriser repérer d'éventuels danger que pour mémoriser les lieux. Si vous ne regardez que droit devant, il sera plus difficile de reconnaître le quartier lorsque vous serez sur le retour. Et un moment, elle se demande s'il ne serait pas mieux de rebrousser chemin, justement.

Un soupir, et Her te jette un regard. Déterminée, la Fille. On peut de plus en plus deviner en elle la volonté de fer qu'elle affichera plus tard.

- On fait quoi ? Rester ici en plein milieu, à découvert, c'est risqué. On peut rentrer, ce serait sans doute plus sûr. Ou alors, si tu veux essayer de te rappeler de ce truc dont tu parlais..

Un léger silence, la sentinelle regarde brièvement de chaque côté de la rue que l'équidé a fuit.

- Sinon, je vote pour prendre la dernière rue que le cheval à emprunté. S'il fuyait un truc aux autres, vaut peut-être mieux les éviter. Et il n'est pas revenu de la troisième rue, donc on peut supposer que c'est assez safe. Sinon, on l'aurait vu revenir, ou on l'aurait entendu hennir en cas de soucis.

Au dessus de vos têtes, un croâssement gras. Perché sur un lampadaire penché, un large corbeau vous observe d'un air inquisiteur. Puis, vivement, il s'envole. Comme mû par une injonction que lui seul aurait pu entendre.

- Faut qu'on bouge.

Quelle que soit la direction que vous empruntez. Sur votre gauche, là d'où le cheval avait fait demi tour, un bruit métallique. Comme uen poubelle qui tombe, ou une conserve dans laquelle on donne un coup de pied.

"Ca te rappelle quoi ? Tu crois que c'est parce que c'est une ville ?"
- Peut être... Je saurais pas trop dire. C'est comme... Il fit une moue, cherchant ses mots. ...Une impression de déjà vu.

Et puis le cheval avait tracé sa route devant les yeux éberlués des deux adolescents.
Allant puis venant. Her avait un mauvais pressentiment. Ca la rendait nerveuse.
Il y avait de quoi, il fallait bien le dire. Pourtant, le punk lui, restait relativement calme. Pas si inquiet que ça.

"J'aime vraiment pas ça. Il n'a aucune raison de galoper comme ça, et encore moins de changer d'un coup sa route, si ce n'est pour fuir quelque chose. Je sais pas ce que c'est, et j'ai pas envie d'attendre ici que ça nous trouve."
L'iroquois se contenta de la regarder, l'écoutant sans rien ajouter.
Son analyse était bonne selon lui. En effet il paraissait évident que l'animal avait fuit quelque chose, mais n'était-il pas justement sensé être dans un jeu ? Certes même les jeux pouvaient tourner au vinaigre et surtout au sang sur l'ile de Jamais, mais bon. Il n'y avait peut être pas tant de raison de flipper que ça.

"On fait quoi ? Rester ici en plein milieu, à découvert, c'est risqué. On peut rentrer, ce serait sans doute plus sûr. Ou alors, si tu veux essayer de te rappeler de ce truc dont tu parlais.. " Le garçon haussa les épaules. "On va pas se barrer alors qu'on vient juste d'arriver, ce serait dommage." C'était vrai non ? Puis ils avaient encore rien croisé du tout a part un cheval visiblement paumé. Il y avait plus effrayant quand même.
Définitivement sur les dents, la Fille.

" Sinon, je vote pour prendre la dernière rue que le cheval à emprunté. S'il fuyait un truc aux autres, vaut peut-être mieux les éviter. Et il n'est pas revenu de la troisième rue, donc on peut supposer que c'est assez safe. Sinon, on l'aurait vu revenir, ou on l'aurait entendu hennir en cas de soucis."

Le croassement d'un corbeau et le bruit de ses ailes qui tranchait l'air, alourdissant l'ambiance.

"Faut qu'on bouge."
- Attend !

Et au loin, de la rue d’où était reparti le cheval, le bruit de ferraille d'une poubelle qu'on renversait.

Le révolté retint son souffle, les yeux fixés vers le croisement, attendant que la chose daigne enfin montrer le bout de son nez.
Cela ne prit pas plus d'une minute, et déjà, enfin le coupable se dévoilait.

"Regarde, la bas !"

A première vu, il s'agissait d'une personne. Un homme à la démarche... Relativement désarticulée, trainant à moitié l'une de ses jambes, avançant péniblement dans leur direction tout en grognant, râlant et claquant des dents comme s'il mâchait d'avance la peaux des gamins qu'il fixait de ses yeux enfoncés.

Apache se mit à rire doucement, aux cotés de la sentinelle.

"C'est qu'un putain de zombi !" Et ca l'faisait rire, visiblement. Ces bestioles n'étaient pas connu pour être les plus dangereuse. Relativement lentes, pas des plus costaudes, elles ne pouvaient s'avérer réellement problématique qu'en grand nombre, si on faisait pas gaffe et qu'elles vous coinçaient dans un cul de sac. Et encore. Il y avait toujours moyen de s'en dépêtrer.
Et justement, à la suite du premier mort vivant, ce fut toute une horde qui se révéla ! Ils devaient être au moins une bonne centaine, se trainant comme le premier, se révélant alors que chacun tournait et s'avançait vers les deux enfants perdus.

Le sourire toujours en place, Apache attrapa la main de Her, l'entrainant vers l'entrée d'un des immeubles qui les entouraient.

"Viens on s'casse ! C'est l’apocalypse !" Ponctué d'un rire de gamin. La partie commençait, et le jeu se révélait plein de promesses !

Faut bouger. Elle le sent, faut bouger. Idéalement, Her voudrait rentrer Mais visiblement toi t'es pas chaud alors.. Bon, admettons. Vous étiez venus ici pour vous changer les idées, après tout. Quoi que, pour elle, c'est vite réglé : ses idées ont déjà changé pour passer de "pourquoi il est aussi relax après ce merdier" avec une touche de "ptn Pretty avait peut-être raison" à "SURVIVRE DANGER".

En même temps, sentinelle. C'est son boulot, de surveiller. De faire gaffe aux bruits, quand elle est de ronde la nuit. De veiller à ce que rien n'attaque le camp. De s'assurer que tout baigne. Et depuis le temps qu'elle fait ça, quand un truc est pesant dans l'air, la Fille a pris l'habitude d'y prêter attention. Du coup, puisque c'est décidé de bouger mais pas de rentrer -elle est vraiment trop gentille, c'est pas raisonnable !- Her s'apprête à se mettre en route quand tu l'arrêtes. Attendre ? Attendre quoi ?

Elle te jette un coup d'oeil surpris et curieux quand tu lui dis ça. Sauf que rien. Tu te tais. Attendre pour quoi, Apache ?

Le bruit de feraille lui fait braquer le regard dans la rue d'où il vient. Un moment de silence, encore, et finalement une silhouette. Une silhouette lente, maladroite. Une silhouette dont les râles se fotn entendre, et qui durcit davantage encore la résolution de Her a survivre.

Un zombie.

Toi aussi tu as compris ce que c'est et.. Et tu rigoles. Tu rigoles, quoi. Her te regarde avec un air un peu ahuri, et se demande si t'es vraiment sérieusement en train de te fendre la poire, là, maintenant, tout de suite, au lieu de bouger ton derch pour que vous alliez en sûreté. Espèce d'abruti inconscient. Elle te cognerait bien, tiens ! Ca te remettrait peut-être deux trois neurones en place, s'il t'en reste.

- Oh.. Y en a d'autres ?!

Ouaip. Plein d'autres. Et toi tu rigoles, tu fais une blague en parlant de l'apocalypse comme si c'était un jeu. Oh que c'est rigolo, si on manquait de se faire bouffer par des morts vivants ? Oh lala, mais qu'est-ce qu'on se marre ! Trololo, la Fille en a mal aux côtes tellement c'est comique !

Tu lui chopes la main et te mets à courir vers un des immeu.. Oh putain quoi ??

- Nan mais ça va pas, j'veux pas être coincée dans un immeuble moisi cerné par des zombies ! Là-bas on sait a priori que y a pas de zom..

Trop tard, tu l'as entrainée à ta suite et elle étouffe un juron rageur parce que vous n'avez plus le loisir de changer d'itinéraire. Apache, Apache, Apache. Elle a tellement envie de te défoncer. T'enchaine un peu tout, non ?

- Si on était pas restés planqués là comme des cons, on n'en serait pas là. Pourquoi on est venu ici, déjà ? Pour les super héros, non ?

Sur les nerfs, la Fille, ouais. Autant par la situation que par ta fuckin insousciance qui la fait hautement rager. Le moins que l'on puisse dire, c'est que vous ne voyez pas les choses de la même façon. Paaas duuu touuut !

Apache avait rigolé oui.
Il avait rigolé comme si c'était un jeu.
Comme si ?
Mais il s'agissait bien d'un jeu, non ?
Un jeu sans doute dangereux, ca, c'était certain, mais cela tombait bien c'était les préférés du punk.

Her pestait alors que le garçon l'avait entrainé jusqu'à l’intérieur d'un des grands bâtiments, poussant un genre de grande porte en vitre qui avait l'air carrément plus que solide.
Le genre double, triple, voir quadruple vitrées.
Le genre à tenir le coup même si on essayait de la briser.
A peine engouffré dans l'endroit, l'iroquois avait bien sur refermé la porte derrière lui, fouillant brièvement dans les quelques décombres qui trainaient dans un coin et calant une bonne barre de fer en travers des poignets afin de bloquer efficacement l'entrée.
Mission accomplie.
Une fois fait, le chasseur fit quelques pas en arrière sans pour autant lâcher les portes vitrées des yeux, car déjà, les morts-vivants s'y attroupaient, lentement mais surement, leurs mains décharnées se plaquant contre les vitres, les tachants parfois de vieux sang noircie, gémissant mais leurs voix d’outre tombe étouffées par l'obstacle qui les séparait des deux vivants.

"Ouais apparemment les supers héros ont pris un coup d'vieux !" Le révolté tourna la tête vers la Fille, un sourire en coin. "La date de péremption a du expirer, du coup on a droit qu'a de la viande avariée !" Mais alors que son regard croisait celui de sa camarade, son sourire s'évanouit, remarquant bien que la sentinelle, elle, elle n'avait pas tant l'air que ça de s'amuser.
Pire, elle avait l'air complètement stressé.
Encore...

"Hey !" Cette fois Apache avait pris un air concerné, la mine inquiète. "Qu'est ce qui va pas ?" Et il avait fait un pas vers Her, une moue interrogative inscrite sur le visage. "C'est qu'un jeu, non ?" Son attention fut un instant rappelé par les zombies qui frappaient toujours à la vitre, juste à quelques pas d'eux sans pour autant pouvoir les atteindre, mais ses yeux noirs revinrent presque automatiquement à sa camarade.
"C'est juste le thème qu'a changé mais..." Son sourire revint, même si plus doux, moins dans le jeu. "De toute façon nos costumes étaient pas non plus dans celui des super-héros pas vrai ?"
Le métisse cherchait visiblement à détendre sa camarade, son attitude se faisant plus calme, plus attentive aussi.
Plus chaleureuse.

"Mais si tu préfères rentrer ça me va aussi." Comme pour renforcer un peu plus ce qu'il venait de dire, il avait doucement hoché la tête à la positive, ne lâchant plus la sentinelle de ses yeux noirs. "Le but c'est de s'amuser, si ça te plait pas on rentre."

Chose qu'il aurait pu proposer bien avant, lorsque la Fille commençait a paniquer tout à l'heure par exemple, mais que voulez vous, on ne pouvait pas trop en demander à un adolescent.

Ta gueule, Apache. Ta gueule avec tes blagues, tes jeux de mots. Ta gueule, avec ton insousciance inconsciente. Dedans y a con, t'as remarqué ? Ta geule, avec cette décontraction que la Fille a juste envie de défoncer. Même elle, ça lui fait bizarre d'avoir autant envie de te cogner. Pourquoi ? Parce que tu ne réalises pas la merde dans laquelle vous êtes ? Parce que tu ne réfléchis pas que peut-être, s'enfermer c'est pas le mieux ? Ou bien c'est autre chose ?

Tu remarques enfin qu'un truc cloche, chez la Fille. Si c'est de la colère ou de la peur, ou de la colère à cause de la peur, elle ne sait pas trop. Elle sait juste qu'elle contient, et que ça va finir par péter. Un jeu. Ces zombies, là, dehors, ça te semble être un jeu ? Ca sidère la sentinelle, qui se demande depuis quand vos réalités sont devenues si étrangères. Ca lui fait mal, aussi, en un sens. Elle a l'impression d'avoir perdu quelque chose, mais quoi ? Et même si elle savait quoi.. Comment le retrouver ?

D'un coup, elle hésite entre hurler, cogner, ou pleurer. Et à trop hésiter.. Rien ne sort.

Rien.

Plus une émotion, plus rien. Juste une poker face, pendant un moment. Une coquille vide. Une poupée. Elle ne t'entend même plus vraiment, d'ailleurs. Avec un temps de retard, elle remarque que tu l'observes, et que tes lèvres bougent. Qu'il y a des sons qui reviennent un peu, pour combattre le tonnerre assourdissant de son coeur qui explose à chaque instant. Elle n'entend plus que ça, elle ne sent plus que ça. Et ça pulse, jusqu'à battre contre ses tempes, jusqu'à lui donne rl'impression que ça la secoue toute entière.

- Attends. Bouge pas.

Her s'entend dire ça d'une voix qu'elle ne reconnait pas, et se détourne de toi. Avec un temps de retard, la Fille réalise que ses poings sont fermés si forts que les ongles ont écorchés la paume de chaque main. Ses épaules sont si nouées qu'elle ne sait même plus comment les détendre.

La Sentinelle fait quelques pas de côté, observe l'immeuble d'un air absent. Autour, il y a quelques débris et gravats. Le Hall est grand, et un peu plus loin il y a une sorte d'accueil. Ca devait être un immeube de bureaux, à tous les coups. Her ne sait pas vraiment ce que c'est, alors elle se demande juste pourquoi y a une chaise un peu esquintée dans un vestibule d'entrée. En fait non, elle ne se demande pas. Elle la voit, et va juste la chercher. L'attrape.

- PUTAIN.

BAAM !

- DE.

CRRRRRR !

- MERDE !

CRAAACK !

Y a plus de chaise. Her vient de l'exploser contre un mur, à chaque exclamation et elle vient de voler en éclats au dernier impact. Y a plein de petits bouts de plastique un peu partout maintenant. Encore un peu essoufflée, la Fille reste immobile quelques instants à retrouver son souffle. Machinalement elle se passe une main pour remettre de l'ordre dans ses mèches devenues un peu désordonnées, alors que l'autre lâche le pied de chaise métallique qui tombe par terre avec un "clang !" outré. Rien à foutre, la chaise. Her n'en a rien à foutre.

Elle se retourne vers toi, maintenant. Calme. Ca lui a fait du bien de défoncer un truc, faut croire. Elle te sourit pas non plus, mais au moins l'envie d'exploser ta petite gueule de punk lui est passée. Même les zombies, pour le moment, c'ets un détail. Calme, la Fille, alors qu'elle te regarde d'un air distrait en reprenant son souffle.

- Pardon. Tu disais ?

Elle n'a vraiment rien entendu de ce que tu disais. Déconnectée complet, tout à l'heure.

Le punk ne s'était pas tout de suite rendu compte que la Fille ne l'écoutait pas vraiment. Ne l'entendait pas vraiment.
Il avait tenté de la rassurer sans réaliser que ses mots n'atteignaient en rien sa Camarade. Ce ne fut que sur la fin, quand il eut terminé et qu'un étrange silence seulement entrecoupé par les râles des morts vivants alentours s'installa que le jeune garçon réalisa le malaise.
Palpable.
Elle ne réagissait pas.
Elle restait la, silencieuse, comme absente.

"...Her ?" L'iroquois avait tenté, d'un seul coup très peu sur de lui. Un peu inquiet, il fallait bien l'avouer.
- Attends. Bouge pas. Et elle s'était éloigné sans rien ajouter de plus, sous les yeux étonnés du chasseur qui la suivait du regard, interloqué. Les quelques mots de la Fille auraient pu le rassurer d'une certaine manière, mais bizarrement ce ne fut pas le cas une seule seconde. Il ne savait pas trop pourquoi, il n'aurait pas su dire de quelle manière, mais la voix de Her sonnait... Différemment.
Elle n'alla pas bien loin, cependant, la sentinelle, s'emparant d'une chaise et...

- PUTAIN. BLAAAAAM !

Apache avait sursauté, serrant les dents si fort qu'elles en grincèrent alors que sa camarade venait de fracasser la chaise contre un mur.

- DE.CRRRRRR !

Il fit un pas en arrière, l'angoisse lui serrant la gorge.

- MERDE !CRAAACK !

Et la chaise avait rendu l’âme.
Le son du fer qui heurtait le sol alors qu'elle avait relâché ce qu'il en restait s'envola dans les airs, et doucement, elle se retourna vers le révolté.
Le visage de Her ne reflétait rien de particulier. Ni sourire, ni grimace de colère. Juste ce pokerFace étrange qu'elle était sans doute la seule au Grand Arbre à maitriser avec autant d'aisance.
Juste le souffle un peu court de l'effort qu'elle avait déployé soudainement à démolir du mobilier anonyme.

- Pardon. Tu disais ?

L'iroquois du macadam ravala sa salive avec un peu de mal, la mine déconfite, les yeux noirs braqués sur la Fille comme il les aurait braqué sur un quelqu'un qui s’apprêtait à lui fracasser la gueule et que visiblement il ne se sentait pas la force de contrer.
C'était un peu ça.
C'était complètement le cas.
Ce genre de déchainement de fureur, Apache avait l'impression de bien les connaitre.
On faisait souvent ça a défaut de le faire sur autre chose. Ou plutôt sur quelqu'un d'autre.
On cassait du mobilier pour éviter de casser des os, et présentement, il lui paraissait évident que ce n'était pas ceux des zombis que Her aurait voulu broyer à la place de cette chaise.

C'était les siens.

Le garçon se mordit la lèvre inférieure dans un reflex nerveux, comme si le moindre mots, le moindre souffle de sa part pouvait déclencher de nouveau la fureur de la sentinelle.
Elle lui avait pourtant posé une question.
Sans doute ne répondrait-il jamais.
Il se contentait de la fixer, mi choqué, mi effrayé, et rien ne semblait pouvoir décrocher son attention de cette jeune Fille qui lui faisait face, pas même les coups répétés des mains sur la vitre juste à coté de lui.

Avait-il réellement peur d'Elle ?
C'était ce qu'il semblait.
Mais peut être n'était ce pas ses coups qu'il redoutait.
Peut être que son jugement avait bien plus de valeur que sa visible envie de lui péter les dents.

Tu ne dis rien. Tu ne dis plus rien, toi qui est normalement si bavard. Pire : tu la fixes sans un mot avec un air.. Flippé ? Choqué ? Ca lui fait bizarre, à Her. Ca lui fait comme un coup. Un électrochoc. Peur d'elle ? Toi ? Mais elle est ton alliée, non ? Tu le sais, ça, non ? Tu as quand même bien fini par le putain de réaliser, non ? Ca la souffle un peu, sur le coup.

Et puis, comme tu ne bouges pas, qu'elle a repris son souffle, ses yeux s'égarent sur un bout de plastique qui est à mi-chemin entre vous deux. Un bout de plastique qui a volé depuis là où elle est. Un bout de la chaise. Violence. Sa violence à elle.

- Je fais peur ?

Sa voix reprend un peu de vie, en posant cette question. As-tu peur d'elle, Apache ? Ca fait mal, comme question. Et Her trouve ça injuste. Un fond de colère pulse encore un peu. Elle a putain de perdu un bout de main pour t'éviter une connerie, elle t'a écouté, et toi tu as peur d'elle ? C'est moche. C'est pas juste. C'est pas juste de la forcer à se réveiller et à ne plus être juste cette fille normale et sans histoires, si c'est pour ensuite faire cette tronche là quand elle laisse les trucs sortir. S'exprimer. Ca fait mal.

T'aimes pas ce que tu vois, Apache ? Pourtant, c'est là depuis que tu as débarqué. Her n'était pas si violente, avant. Aussi extrême. Aussi tourmentée. .. Aussi monstrueuse ?

Ca fait mal.

Her pince les lèvres et détourne la tête.

- Je voulais pas te faire peur. Et je pensais que tu le savais, depuis le temps, que je vais pas t'attaquer juste comme ça.

Mais en est-elle sûre ? Peut-être que pas, au fond. Peut-être que la vérité, c'est qu'elle est une foutue psychopathe en train de se réveiller. Est-ce une bonne idée de continuer sur cette voie ? D'abord des chaises, et ensuite quoi ?

- Te force pas à rester, si t'as pas envie. J'comprends. C'est normal, surtout après ça.

Une fois de plus, Her se fait peur.
Her la Terreur. Psycho, c'est peut-être comme ça qu'on devrait l'appeler.

Elle se détourne tout à fait et observe le vestibule où des vestiges d'ascenseurs trainent encore. Mais ce n'est pas tant pour explorer qu'elle regarde là-bas, tu sais. Plutôt pour se donner le temps, à elle. De se composer, de recomposer sa poker face. C'est peut-être mieux que de laisser passer ces trucs moches, finallement. Trop d'émotions, vaut mieux les garder sous scellé. On verrouille, on barricarde. C'est même plus pour elle ni pour être tranquille. C'est pour les autres, cette fois.

Pour leur épargner ça.

Un silence, lourd, malaisant, à peine allégé par les râles et coups répétés sur les vitres.
Apache n'entendait plus les morts.
Il ne voyait plus les morts.
Tout ce qu'il voyait, tout ce qu'il regardait, tout ce qu'il entendait, c'était Her.
Le visage de Her, impassible, calme.
Le souffle de Her, un peu court.
Son regard qui s'égarait ailleurs, frôlant le sol.
Il n'aimait pas quand elle baissait la tête, comme ça.
Et puis enfin, sa voix qui brisa le silence que l'iroquois s'entêtait à garder entier.

- Je fais peur ?

Le garçon ravala sa salive, baissant les yeux à son tour, sourcils froncés, comme si la question le contrariait. Ce n'était pas loin d'être le cas, mais ça lui donnait avant tout à réfléchir. La mine préoccupée.
Il ouvrit la bouche, prenant une inspiration, comme pour répondre, mais rien ne vint vraiment. Il aurait voulu lui dire que non. Bien sur que non elle ne faisait pas peur. Pas a lui, en tout cas.
Mais était ce si vrai ?
Est ce que ça avait tant d'importance ?
Non, il n'avait pas peur d'elle.
Pas comme ça.
Pas pour ça.

"Je voulais pas te faire peur. Et je pensais que tu le savais, depuis le temps, que je vais pas t'attaquer juste comme ça."

Le chasseur avait relevé ses yeux noirs sur la sentinelle, la fixant alors que sa tête restait légèrement baissée.
Il y avait une certaine distance entre eux deux, distance qu'Apache lui même avait prise l'instant d'avant alors que la Fille s'acharnait sur la chaise.
Ca faisait bizarre qu'ils se parlent d'aussi loin... Était ce déjà vraiment arrivé ?

- Te force pas à rester, si t'as pas envie. J'comprends. C'est normal, surtout après ça.

Elle s'était complètement détournée de lui, regardant de l'autre coté, ailleurs, comme si l'endroit captait soudainement tout son intérêt. Mais L'Hérissé le devinait bien que l'exploration du lieu n'était pas ce qui l'avait poussé à lui tourner presque le dos.

"J'ai envie de rester..." Et ça lui avait fait très très bizarre de dire ça comme ça. Dans sa tête de punk, ça n'avait pas sonné si étrange pourtant. "... Avec toi." Il avait ajouté, un peu plus bas, un peu comme pour remettre cette réponse dans un contexte, la rendre moins bancale. Est ce que ca avait marché ? Rien n'était aussi peu sur.

"Tu m'as pas fait peur." Il continua, mais il n'y avait aucune provocation dans le ton employé, bien au contraire. Sa voix s'était faite douce, assez basse en fait. De ce fait, il avait fait un pas dans la direction de Her, peut être par peur de ne pas être entendu au milieu des grognements des zombis. Il s’empêcha cependant d'en faire un second , comme s'il redoutait que cela ne dérange sa Camarade s'il s'avançait de trop. "Enfin... Pas... Pas comme tu crois." Ce n'était pas ca qui lui avait fait peur, hein. Non. "Tu peux bien me casser la gueule comme t'as cassé la chaise, je t'en voudrais jamais pour ca." Et il avait même eut un sourire, le punk, pour accompagner son affirmation. C'était qu'il n'avait jamais été aussi sincère, et cela s'entendait. Il haussa les épaules. "Ca me dérange pas si tu me frappe, si ca peut t'aider à..." Il eut une hésitation, une moue de réflexion traversant son visage. "A t'exprimer !" Peut être que cela faisait bizarre à Her d'entendre un tel discours dit sur un ton aussi sérieux.
Pourtant les mots auraient tellement bien collé avec une bête bravade, une simple provocation.
Il n'en était rien.
"Mais je sais que tu m'aurais pas attaqué." Non. Pas juste comme ça, pas vrai ? Apache devait bien admettre cependant que ce n'était pas tout à fait l'impression qu'il avait eu sur le moment.
"Tu sais.. J'suis désolé j'avais pas réalisé que tu te sentais si mal. Que tout ça, ca t'angoissait autant et..." Il soupira, secouant doucement la tête à la négative. "J'ai été con, j'ai pas fais attention à toi." Il avait ignoré une Camarade, et pas n'importe laquelle, et ça... C'était pas le genre de chose qu'il avait l'habitude de faire. L'avis de ses Camarades lui importait grandement. "Pas assez fais attention à toi..." Un ton plus bas, presque soufflé plus pour lui même, comme un écho.

Il avait encore à dire, Apache, des choses sur le cœur, qui lui traversaient l'esprit, qui lui remontaient et restaient en travers de la gorge, mais il s’arrêta la pour l'instant. Il fallait laisser de la place à Her, à sa Camarade.
Lui laisser la place de s'exprimer.

Her ne sent pas grand chose, comparé à cette vague d'émotion qui l'avait submergée. Comme si elle avait été anesthésiée. Ses sens sont encore un peu abrutis par le choc, seul son cœur continue de faire mal. Mais ça fait longtemps, ça. Elle essaye de ne pas y faire attention. Sourcils froncés, dos tourné. Her, fermée. Son ventre lui fait mal, comme si tous ses tripes n'étaient plus qu'un nœud douloureux. La crise passée, elle se sent maintenant faible, presque vacillante. Sa flamme intérieure, celle qui avait failli briller, ne se résume désormais qu'à quelques braises. La sentinelle voudrait fuir, disparaître, mais quelque chose la retient. Toi. Tes mots.

Parce que tu as repris la parole, tu as tué dans l'œuf la possibilité de fuite. Alors elle se tait. Elle écoute.

Tu dis que tu veux rester, rester avec elle. Tu parles encore, fier punk mais pourtant sans ta bravade habituelle. Pas peur, ça sonne tellement toi. Pas peur comme ça. Alors peur de quoi ? Her déglutit, et sa main droite vient doucement se poser sur son ventre. La nausée monte, elle se demande si vraiment elle va devenir encore plus pathétique à vomir comme ça. Là. Ridicule. Des échos lointains lui hurlent que les faibles ne vont nul part, que le combat n'est jamais fini et qu'elle n'a pas le temps de s'apitoyer sur son pauvre sort. Debout, soldate ! Un faible reniflement, mais ses yeux restent secs. Au moins, elle ne tombe pas, ni ne cède face à la nausée.

Tes mots se veulent réconfortant, mais ils lui font mal aussi. C'est un peu des deux, une touche de baume par-ci, un coup violent par-là. Te frapper juste comme ça ? Non, elle ne veut pas. Et même si tu dis que tu sais qu'elle ne le fera pas, le simple fait que tu dise que ça ne te gênerait pas et que tu ne lui en voudrais pas.. Ça montre que tu y a pensé. Quand ? Juste là, y a quelques minutes. Possible. Sans doute. Tu en as bien fait mention.

Her se dégoûte. C'est à gerber.
Mais non, elle se retient.

Elle retient tout, de toute façon. Ses mots, ses larmes, ses émotions. Y a que la violence qui a réussi à s'enfuir. Peut-être qu'en fait, elle est comme Dusty et Peekaboo. Pas qu'elle les connaisse très bien, mais en tant que sentinelle elle a déjà eu à gérer quelques cas avec eux, quand même. Enfin, surtout Peekaboo.

- C'est pas ta faute.

Elle s'entend dire ça, et une part d'elle s'étonne que tes mots aient trouvé comment se frayer un chemin jusqu'à elle. Et que tu lui causes encore, aussi. Pourquoi t'es pas parti ?

- Y a juste beaucoup de trucs qui.. En même temps. C'est pas grave. C'est pas important. Ça finira par passer.

Vraiment ?

Un violent frisson la secoue, sans qu'elle ne sache pourquoi. Le froid, peut-être. Alors, lentement, la Fille retire la main crispée sur son ventre pour entreprendre de défaire le mécanisme de sa robe qui la fait tenir en globe. Ça sera moche, en pendant avec les quatre arc de cercles. Et ça fera sans doute un peu mal quand elle marchera. Mais tant pis. Une fois cela fait, elle reste immobile, toujours au même endroit. Un peu cassée, on dirait.

- Peur de quoi, alors ?

C'est peut-être bien ça, qui la rend rend malade. Parce que dès qu'elle demande, la nausée revient, plus forte que jamais. Elle se demande même si ça vaut la peine de continuer la conversation. Mais c'est plus fort qu'elle : mains crispées sur son ventre, concentrée sur son souffle pour résister à la vague de bile qui menace, Her est incapable de bouger. Elle a besoin de ta réponse, autant qu'elle la redoute.