Quelque chose glisse de la poche de sa robe, un éclat transparent avec une pointe de couleur qui roule entre les lames d’un plancher ravagé par le passage incessant d’une armée de petits pieds. Le dé termine sa course lorsqu’une chaussure l’arrête dans son élan, que son propriétaire se baisse pour refermer sa paume autour de ce petit trésor, jusqu’à graver un vingt contre sa chair.

« Le destin se joue de vos pauvres âmes, » qu’elle commente, cheveux séparés en deux tresses rousses qui glissent contre ses épaules, « un jet de ma part qui ne peut compter, est-ce un présage malheureux, ou bien une aubaine ? »

Dice terrorise moins qu’elle fascine à présent, lorsqu’elle lance le dé de la bonne manière, cachée derrière sa tour en carton qui abrite les statistiques des pourvoyeurs de lumière qu’elle s’empresse d’envoyer combattre ses braves héros.

« Pas de réussite critique, l’épée fend l’air sans parvenir à toucher la princesse, quant à son fidèle chevalier, toujours bloqué dans le piège du sorcier, il prend dix dégâts nécrotiques. »

La mort est proche—elle n’est qu’un passage, une étape. Tout comme la vie, le passé et tout ce qui se situe entre ces inévitables conclusions. Dice joue avec une ferveur qu’elle a déplacé, qui a abandonné la religion qui se mêlait à Peter Pan, pour s’enfouir dans des histoires où elle peut enfin maîtriser sa voie. Qu’importe que les dés décident en son nom, c’est sa pointe de foi, son culte envers elle-même, à défaut de trouver Dieu. Si Dice ne peut vénérer qu’une unique entité, ça sera elle-même. Son amour, sa passion pour sa propre existence, cette pointe de vanité qui est bien malvenue.

Non, elle dirait plutôt que c’est la réalisation qu’elle a toujours mérité mieux, et qu’elle s’accordera bien plus.

« Votre équipe n’est point décimée, elle chavire, au milieu de cette montagne baignée de fleurs, mais vous pouvez encore la sauver. Que va accomplir votre preux roublard, oublié dans son buisson depuis deux tours ? »

Dice n’a pas perdu son amour envers le Petit Roi, sans quoi elle se serait retiré son titre, l’aurait brûlé pour ne pas faire un faux-pas, et les avantages associés ; elle continue de louer les louanges de Peter Pan, d’entraîner les foules dans ses jeux sans fin à son sujet. C’est juste que Dice existe pour elle-même ; ses robes anciennes, grosses chaussettes avec leurs motifs, et fleurs dans sa chevelure, un soupçon de maquillage autour de ses yeux ou sur ses lèvres lorsqu’elle surprend des enfants qui jouent à s’admirer et qu’elle leur demande, hésitation marquée, de la faire participer. Ce n’est pas horrible, elle se répète jusqu’au malaise, de vivre pour soi-même. Dice sait son âme corrompue, culpabilité Catholique qui s’enlise. Malgré tout, elle se découvre, d’une danse entraînante sous une musique qui lui aurait été interdite, à une course sur un pont fait de cordes et de bois. Il n’y a personne pour l’empêcher de vivre, et elle s’en veut d’avoir mis une éternité à le comprendre.

Qui interdit à ses filles de s’élancer dans une course, de chanter ou de danser ? Qui écrit les règles en prétendant qu’elles viennent d’une autorité invisible ?

« Oh, une attaque furtive ! Quel choix malicieux. Il y a une pointe de terreur, sur le visage du soldat au casque fendu, alors qu’il réalise que la dague va frapper entre ses deux yeux. Une sorte de ‘non, pas moi’ et il est trop tard pour s’arrêter, pour empêcher ce combat de se finir—les corps se font poussières, du sorcier qui semble presque apaisé, à l’elfe dont l’arc se brise en touchant le sol. Le nécromancien n’est plus, et avec lui son histoire se termine, laissant uniquement des traces sombres sur vos vêtements. »

Dice n’a pas beaucoup lu, en grandissant. On ne lui a pas autorisé une telle opportunité, et ça ne lui importait guère, lorsque son regard dansait sur les pages, lettres formant un amas indigeste. Alors, son manuel de la cinquième édition de Donjons & Dragons, elle peine avec parfois. Elle doit s’y reprendre encore et encore, jusqu’à comprendre la scène que l’ouvrage tente de peindre. Son imagination se dénoue avec le temps, là où tout avait une forme biblique, une horreur familière, Dice se bat pour créer son propre univers. Arrogante au point de se croire divine—c’est le contrecoup, le retour de bâton d’avoir été traitée comme rien ni personne.

Son langage est orné de jolies tournures, d’imitations pour combler des lacunes, et parfois Dice utilise des termes sans vraiment les comprendre. Est-ce que ça se ressent ? Peut-être, sans non plus la stopper dans son élan.

L’Exaltée n’a pas de plan pour son avenir—uniquement des campagnes, des rêves et des désirs qui se mêlent à celles des autres enfants qu’elle recrute pour ses jeux. Avoir des plans pour le futur, c'est grandir, et elle n'en veut pas. Vivre, c’est gigantesque, comme concept. Et si elle voulait mettre un short, ou encore découvrir ses épaules ? S’il lui prenait l’envie de teindre ses cheveux ou de se faire tatouer, qui pourrait lui dire non ?

Dice a l’impression d’être trop vieille et si jeune à la fois, enfant qui a tant à rattraper. C’est triste, n’est-ce pas ? De ne découvrir son cœur qu’une fois que le reste du monde a déjà décoré le sien, qu’elle se retrouve à ramasser des patchs colorés dont personne ne voulait, pour les coudre maladroitement ici et là.

« La séance est terminée pour aujourd’hui, merci pour votre dévotion ! »

Elle presse ses lèvres contre son dé fétiche, celui avec des fleurs à l’intérieur, éternité gravée juste pour elle. Et Dice passera des heures qui n’en sont pas vraiment à imaginer la suite, à écrire des scénarios dans sa tête jusqu’à se trouver en apprenant des autres.

Dice croit ; en un je-ne-sais-quoi embrumé dont elle n’est plus certaine du départ et de la fin. Elle croit au Petit Roi, et que peut-être il y a plus, quelque part au-dessus des nuages.

Ce en quoi Dice croit le plus, c’est en elle-même.
Il faut bien que quelqu’un le fasse, non ?

   

Toute application pour rejoindre les Tréfonds doit passer par Dice ; savoir écrire n’est pas un pré-requis, par contre pouvoir lire est recommandé, elle se fera un plaisir de vous assister si besoin. Le contenu pouvant varier d’une campagne à une autre, certaines ne sont pas ouvertes aux trop jeunes participant.e.s, pour éviter de traumatiser qui que ce soit. Néanmoins, les thèmes abordés dans Les Tréfonds peuvent heurter la sensibilité du public—le but y reste le jeu tout de même, et de passer un bon moment. De part la temporalité absente de l’île, les séances peuvent être organisées de façon variable, sachez que si vous en manquez trop, Dice se chargera de déplacer votre personnage de la case vie à trépas, pour ne pas compromettre la campagne.

Techniquement, elle prévient en amont pour éviter un quelconque problème. Les dés sont fournis par Dice (saviez-vous que le singulier de Dice est Die?) avec le soutien des Artisans qui les façonnent selon les besoins. Les quelques membres des Tréfonds qui font preuve d’une présence exemplaire et qui se donnent à fond ont le droit à un set particulier inspiré par leur personnage. Pour l’instant, ce service se limite à Bambi, Death & Justice.

Les loyaux services de Death et Bambi pour prendre les notes et la création de personnages sont forts appréciés et Dice les remercie de leur amour partagé pour son art.

Les Tréfonds se développent et s’adaptent, n’hésitez pas à nous rejoindre aujourd'hui (une fois vos tâches obligatoires accomplies, bien sûr)