Le feu au centre de la pièce s’est fait braise, le silence n’est troublé que par la Pluie iodée qui mitraille inlassablement le cuir du tipi et la respiration légèrement saccadée d’un jeune homme endormi. Bientôt il commence à bouger, à se retourner, froncer des sourcils. Un bras fin semble chercher un compagnon à étreindre mais ne trouve que le vide et finit par se replier vers son ventre.

Pourtant Ibis rêve peu. L’herbe dont il s’emplit les poumons et la tête à longueur de journée lui a volé ses nuits depuis longtemps.

Mais les cauchemars, eux seuls, parviennent à percer le voile épais de son sommeil de camé. Ils le poursuivent depuis son arrivée au camp, profitant de sa faiblesse quand il n’a personne pour se rassurer et pas assez soûl pour les oublier.

Le Hanté ne saurait les décrire précisément, il s’agit avant tout de sensations ; d’angoisse et de tristesse. Il s’y sent creux et abandonné, nu et dénué de chaleur. Des fois il marche dans les paysages sombres et plats qui l’entourent pour se réchauffer sans succès. Parfois l’image fugace de Sick vient le tenter, attise son manque avant de le laisser à nouveau dans la solitude. Et puis souvent il se retrouve face à un grand arbre mort, semblable à celui auquel il était resté piégé et qui aurait du être son cercueil. En s’approchant il remarque un tas d’ossements entre ses racines. Ce n’est pas toujours le même détail qui fait qu’il les reconnaît comme les siens mais immanquablement il sait qu’il s’agit de ses propres restes. Alors il doute d’être en vie et tout commence à s’effondrer. Il chute ; les fantômes le traversent et les goules rongent son squelette. Il hurle mais personne ne l’entend, il est mort depuis longtemps et tous l’ont oublié. Même elle.

Couché sur ses peaux le jeune homme gémit, les larmes s’échappent de ses paupières closes et la sueur perle sur son torse tatoué. Il se tord et ses doigts s’accrochent aux couvertures.

Soudain il lâche un cri et se redresse brusquement. Les yeux ouverts mais encore absents.

Petit à petit la réalité fait son chemin. Ibis passe les mains dans ses cheveux humides de stress et soupire, essaie d’ignorer les sentiments horribles qui s’accrochent. Il a un peu la nausée mais rien de trop terrible. D’autres fois ça lui arrive de gerber en se réveillant à cause de la terreur.

...Ibis ? Ca va ?

Le Hanté lève un regard encore un peu voilé vers la jeune fille. Il s’éclaircit la gorge en retenant le plus discrètement possible un haut-le-cœur.

Ouais, nickel…

Il a l’impression d’être au lendemain d’une énorme cuite, son corps fait mal de tension accumulée et une petit migraine pulse sur ses tempes. Quand il voit son hôte sortir il se dit que sa tête de déterré a du l’effrayer ; il comprend, ça lui aurait fait pareil de croiser un vieux gars comme lui, elle a du penser qu’il avait juste trop abusé la veille.

Pourtant, à sa surprise, Cygne revient un instant plus tard avec une coupelle d’eau qu’elle lui offre.

...Tiens. Ca va aider.  

Il boit en grosses goulées, l’eau lui apporte un peu de clarté d’esprit et apaise sa gorge assoiffée.

Merci, c’est gentil.

La fixant de ses yeux vert de jade, Ibis se demande enfin ce qu’elle peut bien faire là. Ils se connaissent un peu, sont tous les deux des adoptés des Delawere, mais ne sont pas particulièrement proches, pas assez du moins pour qu’elle décide de le visiter en pleine nuit.

Et puis il comprend ; épiphanie dans son cerveau lent.

Tu m’as entendu c’est ça ?

Le tatoueur veut se relever pour s’assoir sur l’un des coussins à l’avant du tipi plutôt que sa couche mais se rappelle qu’il vient de se réveiller et donc définitivement pas décent face à l’adolescente. D’ordinaire il se fout bien de la pudeur mais il fait tout de même un effort pour les plus jeunes.

Attend, faut juste que je me couvre.

Toujours à demi sous ses draps, le Hanté fouille rapidement dans une petite malle en cuir qui lui sert de table de nuit et en sort une robe de chambre.

Il l’avait gagnée un jour aux cartes contre un fille du port. Le tissu est épais et vert sombre, brodé d’oiseaux et fleurs colorés un peu à la chinoise. Ibis l’aime bien, pendant longtemps le vêtement avait gardé un trace du parfum de son ancienne propriétaire.

Nouant le ceinturon, il se relève enfin. Le peignoir, sans doute prévu pour être très long, lui arrive juste au genou ce qui est déjà bien.

Tu veux un truc ? Une clope ? il se reprend Sans doute pas, hein. Euh…j’ai des biscuits si tu veux.

C’est des ibis ?

A la question le tatoueur baisse un instant les yeux sur le pan de tissu qui lui couvre la cuisse, trace le contour d’un oiseau du bout de l’index et répond avec un sourire en coin Ce serait marrant, non ? son regard se porte sur Cygne, il hausse les épaules Mais je crois que c’est plutôt des grues.

Si elle ne fumera pas, lui s’allume en revanche une cigarette, encore un peu fébrile de son réveil brutal. Il s’en tiendra à ça par respect pour la jeune fille et puis sa présence lui fait du bien ; l’aide à chasser les derniers relents de panique. Quelques bribes, images déroutantes s’accrochent encore à ses rétines mais il parvient assez bien à l’ignorer. Parler, même de banalités, est salvateur. C’est sans doute une amélioration bien que le Hanté n’ait plus guère d’espoir de rédemption pour sa psyché.

Des biscuits, c’est bien

La voix de la petite le tire de ses pensées, il joue la distraction en se frappant légèrement le front de la paume, un peu plus théâtralement que nécessaire. Sa capacité d’attention, dans l’après-coup de ses nuits d’horreur, est encore plus médiocre que d’ordinaire.

Bien sûr, les biscuits.

Son petit garde-manger est contenu dans une boîte métallique qui a bien vécu. Elle n’est pas très fourni car il cuisine peu et préfère s’inviter à la table des autres mais il veille à toujours avoir quelque nourriture à portée de main. De la boîte il en sort une autre, elle aussi en métal.

Comme une poupée russe, hein. commente-t-il, une brin malicieux, à l’attention de Cygne.

C’est un récipient qui vient du monde Ordinaire. Sans doute trouvé un jour sur la plage puis échoué chez lui il ne sait plus comment. Une de ces boîtes à biscuits kitsch plus souvent détournées en stockage à couture. Mais chez lui elle déborde de cookies au chocolat.

Armé des friandises, Ibis vient s’assied face à la jeune fille. Ainsi ils sont plus ou moins à hauteur égal, il préfère ça.

…Tu veux en parler ?

Ça le prend un peu de court, il la fixe quelques secondes sans répondre. La petite est directe, il aime bien ça. Son accent aussi, il apprécie tout ce qui est différent chez ceux qu’il croise.

Je sais pas s’il y a grand chose à dire il prend une taffe sur sa clope, tourne la tête pour expirer son petit nuage de fumée histoire de ne pas gêner Cygne et ajoute C’est quelqu’un qui me manque. Et la nuit c’est plus difficile quand on est seul avec ses propres pensées.

Ça l’a surpris, le Hanté, qu’elle s’étonne qu’il reconnaisse son accent pourtant bien discernable. En réponse il lui a juste dit que bien qu’il ne se souvienne plus des détails de sa propre vie il reste un enfant de la guerre froide et que même le pire des incultes de son genre savait à quoi ressemblait l’accent ruskov.

Mais la discussion a maintenant prise une tournure plus sérieuse, tout relent de vieille culture oublié. Bien que détaché Ibis est observateur et il remarque son geste à ses paroles qui semblent la faire tiquer. Il se demande ce qu’elle cache comme souvenir sous cette manche qu’elle agrippe de ses doigts minces. Mais il ne lui fera pas l’insulte de lui demander ; ils ont tous leurs vieux trophées tabous.

…je comprends.

Il la voit troublée mais lui laisse le temps de se reprendre. Si elle veut lui livrer quelque chose il l’écoutera, il lui doit bien ça à cette petite qui n’a pas hésité à venir le consoler de ses cauchemars. Et puis c’est ce qu’ils font dans cette tribu, ils se soucient les uns des autres.

...Ca me fait la même chose. Quand j'ai pas la force de sortir la nuit ou que je dors trop longtemps. Des fois, je préfère ne pas dormir du tout. C'est plus facile la nuit d'après.

Il lui répond un peu taquin et un peu attendri mais sans un once de moquerie Oh. Non, il faut dormir Cygne, c’est important. Comment tu veux garder ton teint de porcelaine sinon ? il lui adresse un petit sourire du bout des dents Mais qui je suis pour te faire la leçon, hein ? On fait tous comme on peut, il faut bien survivre.

Elle le touche, cet oisillon. Sous son apparence éthérée se cache une guerrière, il le sent. Et ça se confirme en partie lorsqu’elle fixe ses yeux de glace dans les siens sans ciller. Il aime bien ça le Hanté, les gens qui savent regarder, qui n’ont pas peur d’observer directement au fond de l’âme de leur interlocuteur.

Toi aussi elle est au Grand Arbre, la personne qui te manque ?

Dans son corps quelque chose tressaillit, Ibis n’aime pas trop y penser si directement, moins encore alors qu’il émerge à peine d’une nuit douloureuse, beaucoup trop sobre pour ce genre de sujet. Mais il va essayer peut-être que ça lui fera du bien.

Ouais. Enfin je crois, ça fait longtemps. il se soupire, se passe la main sur le visage Elle ne veut plus me voir alors je ne sais pas.

Le Hanté aimerait bien la croire, qu’ils n’ont juste bêtement pas pensé à se chercher. Ce serait con, ça leur ressemblerait bien, mais il est passé au-delà de ce genre de justification depuis longtemps. Pour lui il n’y a que deux solutions. Elle ne veut plus de lui dans sa vie ou alors elle l’a juste oublié comme le reste et dans ce cas il préfère ne pas savoir. Ca le flinguerait qu’elle ne le reconnaisse pas.

À comment il sait qu’elle ne souhaite plus le voir, Ibis ne répond pas. Il pourra lui raconter plus tard, une fois, mais il n’a pas envie de charger la fille de cette histoire alors qu’elle est visiblement déjà troublée.

Mon frère est là-bas.

Son attention échappée revient sur Cygne face à lui. Il rallume sa clope abandonnée et en tire quelques tafs ; ça l’aide à rester paisible, en même temps que la fumée il expire un petit nuage de tension.

Il était déjà là-bas depuis longtemps, quand je suis arrivée.

Le tatoueur ne s’est jamais particulièrement intéressé aux raisons de la présence de la jeune russe dans le campement. Pour lui ils sont tous frères et sœurs, mais maintenant qu’il y pense c’est vrai qu’elle aurait plus sa place parmi les Perdus par son âge. Aussi il est surpris que Peter ait visité deux fois le même exact endroit. Prendre la sœur après le frère comme un putain de collectionneur et ne pas faire l’effort de les réunir. Quel bâtard.

Je ne sais pas s'il y est encore, s'il pense encore à moi ou s'il veut me voir... Mais je refuse de penser le contraire.

Écho à ses propres peurs, la phrase lui donne envie de la serrer contre lui et chasser ses angoisses. Il s’apprête à répondre mais elle le stoppe de son regard de glace, un peu fondu par le sourire qu’elle lui offre ensuite.

C'est pas facile, mais les souvenirs heureux, ça éloigne les cauchemars, souvent. Je trouve.

Ibis est touché, lui qui est d’ordinaire bien peu empathique bien que sympathique, ayant déjà de la peine à réellement ressentir ses propres sentiments. Il met ça un peu sur le compte de sa nuit qui l’a laissé à fleur de peau mais il y a aussi définitivement quelque chose qui attendri chez cette petite.

Se déplaçant pour s’assoir à côté de l’Entêtée, le jeune homme lui ébouriffe doucement les cheveux dans un geste amical qu’il veut réconfortant.

Qui pourrait oublier ta tête d’ange ? Il sait juste pas que t’es là. Mais tu vas le retrouver, si tu veux on demandera à Rossignol de faire une prière pour que la faveur des esprits.

Machinalement, sans y penser, il fait glisser sa main sur les épaules de Cygne ; massage léger pour rendre les émotions plus faciles à encaisser. Le Hanté a toujours trouvé le contact plus apaisant que les mots, parfois il s’imagine capable de propager son calme ou aspirer les mauvaises pensées du bout des doigts. Ce qu’il oublie c’est que tout le monde n’aime pas être touché mais elle le repoussera si elle le souhaite, il ne s'en offusquera pas.

C’est bien les souvenirs heureux. il essaie de se rappeler s’il en a avant son arrivée chez les Delawere mais se souvient surtout de la violence et du mal-être. C’est elle qui lui manque, leur lien et leur dépendance, pas leur quotidien. Tu veux m’en raconter un ?.

La fille accepte son contact et il semble même au Hanté qu’elle se détend brièvement sous ses doigts. Mais bien vite elle se referme et réagrippe son bras, c'est dommage. Il ne sait pas encore s’il s’agit d’un tic ou si elle cache sous cette manche quelque symbole qui la rassure. Peut-être un peu des deux. Au fond ça lui importe peu, chacun ses moyens de se réconforter.

Quand elle s’appuie finalement contre lui, il s'y attend pas et en ronronne presque. Sans doute qu’elle ne se rend pas compte de ce que lui apporte ce contact. Malgré leur différence d’âge et de taille, la chaleur très humaine qu’Ibis peut sentir émaner de la petite l’aide à s’ancrer dans le moment, à laisser de côté ses cauchemars.

J'ai beaucoup oublié. Mais je me rappelle qu'un jour, on était dehors tous les deux. On avait fait une grosse bataille de boules de neige avec les autres, puis eux étaient rentrés. On a récupéré toute la neige et on a fait d'énormes bonshommes en plein milieu de la rue... Je crois qu'on a bloqué le passage.

Ca le fait sourire, il trouve ça mignon. Chacun ses bêtises ; eux ils pétaient les vitrines et crevaient des pneus de camions.

J'avais une photo de nous dans ma chambre. J'aurais dû la prendre.

Le Hanté hausse des épaules, doucement pour ne pas la bousculer.

Les apparences ça change. C’est la personne qui est importante, qui elle est et ce qu’elle dégage.

Du coin de l’œil il la voit mettre son avant-bras à nu et lui dévoiler ce qui s’y cache. Une cicatrice s’étend à la surface de la peau diaphane ; un trait droit qui fait un coude à la fin. D’instinct le tatoueur lève une main pour la toucher mais se retient, reposant sagement sa paume sur son genou.

A la place, j'ai ça. Et une lettre. C'est bien aussi.

Ibis est d’accord, c’est même mieux. Les scarifications, les marques et les tatouages c’est l’histoire personnelle de chacun, celle que même l’Île ne peut leur enlever.

C’est cool, ça vaut toutes les photos. C’est lui que te l’a fait ?

Il pose la question avec curiosité, sans une once de jugement. Lui-même a des stigmates qui ne sont pas de son fait. Des souvenirs à l’encre ou au rasoir que d’autres lui ont laissés. Et le Hanté aime chacun d'eux, ça lui plaît ce qui est différent et démarque les individus.

Non ?!

Elle a tiqué à sa question, ça se sent dans sa voix. C’est vrai qu’Ibis l’a posée sans réfléchir, presque naïvement. Parce que pour lui ça ne choque pas, au contraire il trouve un aspect rituel et ancestral à la chose qui le fait vibrer. Offrir sa chair à l’autre pour qu’il y dépose un peu de lui-même à travers le fil du rasoir ou la pointe de l’aiguille.

C'est moi, qui l'ait faite. Quand je suis arrivée. Pour pas l'oublier.

Ca lui fait quelque chose quand même, cette petite fille si forte et si fidèle. Le Hanté est soulagé aussi qu’elle n’ait pas été entièrement rebutée par sa question maladroite, il n’a pas envie qu’elle s’en aille toute de suite. D’ailleurs elle vient même plus étroitement chercher son contact et il l’accueille volontiers contre son flanc, l’épaule soutenant sa tête aux reflets neigeux.

Ils se connaissent à peine, n’ont jamais réellement eu de contact avant ce jour pourtant Cygne en cet instant lui paraît presque familière comme si elle avait toujours été là. Ca arrive, Ibis croit au fait que les êtres sont des énergies qui s’attirent ou se repoussent et qui parfois vibrent d’une façon spéciale. Pourquoi sinon la petite se serait-elle arrêtée devant sa porte, aurait eu l’audace d’y entrer.

Tu crois qu'il pourra me reconnaître, même si j'ai changé ? un silence qu’il n’interrompt pas. ...J'ai grandi, depuis.

Ca fait un peu écho dans son crâne, des angoisses présentes ou passées qui ont pu le tarauder lors de ses nuits de cauchemars ou au détour d’une pensée intruse. Mais le Hanté est également révolté qu’elle puisse se biler de tels questionnements. Des doutes à la con et infondés.

Il se déplace légèrement pour pouvoir regarder la fillette en face. D’une main douce et en faisant attention à ne pas coincer les fins cheveux dans l’une de ses nombreuses bagues, le tatoueur écarte quelques mèches du visage lisse, dévoilant un peu plus la beauté de ses grands yeux de glace.

Pose-toi la question inverse. son ton n’est pas dur, ne l’est jamais, mais n’admet pas qu’elle le contredise Tu penses vraiment que tu pourrais le croiser sans le voir ? Les gens c’est plus que leur apparence ou leur âge.

Pour lui aussi il veut garder cette certitude. Parce qu’il ne peut pas imaginer la revoir un jour et qu’elle le traite en inconnu. Ca le crèverait. Pour adoucir l’ambiance, Ibis ajoute avec un sourire qui dévoile ses dents plus ou moins alignées et une pointe d’humour au fond des pupilles.

Tu me le présenteras ? Quand tu l’auras retrouvé ?

Les yeux de Cygne ressemblent à la surface d'un lac gelé. Parfois elle le regarde et il peut voir son attention et ses pensées miroiter juste sous la glace et l'instant d'après elle replonge au fond d'elle-même. C'est un joli spectacle, ça rajoute au mystère de la fillette. Les petits silences dans la conversation le gênent pas, il est pas le genre de gars attaché au protocole et ça laisse le temps de réfléchir ce qui pour une fois, dans son cas, n'est pas un luxe.

Malgré tout, Ibis est quand même content de la voir s'illuminer un peu à sa question. Le sourire lui va bien.

Bien sûr !

Le tatoueur ne s'attendait pas un si vif enthousiasme mais ça le réjouit. Du coup il se demande à quoi peut bien ressembler son frangin. Est-ce qu'il a lui aussi la même apparence polaire que sa soeur ? Dans tous les cas ça promet d'être intéressant de le rencontrer. Parce qu'il est sûr que s'il est bien sur l'Île elle le retrouvera un jour, le pays n'est pas si grand et elle a plus ou moins l'éternité pour y arriver.

...Je pense que vous pourriez bien vous entendre.

Ibis a bien vu son petit sourire. Amusé, il hausse un sourcil et répond avec un enthousiasme poussé.

Oh, vraiment ? il resserre les pans de son peignoir sur son torse, fait semblant d'ajuster le col Il faudra me prévenir avant alors. Je ferai un effort.

Pris un instant dans son jeu, il ne remarque pas le geste de Cygne.

Et...toi aussi, hein ?

Dans la surprise, pourtant il aurait pu s'y attendre, ça le calme d'un coup ; une douche froide le long des vertèbres. Le Hanté essaie quand même de pas trop montrer, de se détacher mais c'est moins facile quand il est pas défoncé. Comme souvent quand il est stressé et cherche ses mots, dans un espèce de tic, il joue avec le piercing qui lui traverse la langue, coince la bille de métal qui le ferme entre ses incisives.

Quand il estime avoir repris assez contenance il libère sa langue et dit Oui, si tu veux. il se marre un peu, sans joie Mais faut pas trop compter dessus, hein, c'est pas demain que ça va arriver...

Ibis soupire, c'est le matin et il a déjà envie de s'exploser la tête pour calmer ses nerfs. Souvent après les nuits vraiment difficiles il sort même pas de chez lui et passe la journée en tête à tête avec son calumet à s'oublier. Mais ce serait pas décent de faire ça devant la jeune adolescente, aujourd'hui elle lui sert de garde fou. Et elle le distrait, il est quand même dans un meilleur état que s'il avait été seul.

Voulant la garder encore un peu avec lui, il lui demande Tu danses depuis longtemps ? Je t'ai vu quelques fois, t'es douée.