« Je ne voulais pas te le cacher ! J'ai juste... je savais même pas où tu étais ! Enfin, probablement chez toi, mais... »

Elle le sait pertinemment, qu’il n’avait aucune intention de la blesser, qu’elle s’est isolée sans même prétendre qu’il importait. Pendant que Jack enchaîne, près à redresser un étendard invisible au nom de son côté chevaleresque, Rain se calme, ravalant sa colère teintée de rage, une seconde après l’autre.

« J'ai paniqué, évidemment que j'ai paniqué ! Et maintenant que j'arrive à me convaincre que la meilleure manière d'aider Zyrrha c'est d'arrêter de paniquer, je me rends compte que je ne sais pas où tu es, ni... ni personne, en fait. »

Qui tu es plutôt que où tu es, il aurait pu dire.

Est-ce qu’il lui en veut pour ça ? Ces changements incessants, cette incompréhension face à son propre corps, ça doit épuiser tout le monde. Traçant l’orbite d’un œil du bout des doigts, Rain sent le sang qui perle dans sa bouche. Se mordre la langue n’est pas son meilleur mécanisme.

« On... ne peut pas faire appel au Bayou. Pas comme ça en tout cas. Zyrrha... elle vient du Bayou, tu sais ? Et elle ne m'a pas tout raconté en détails, mais elle était obligée d'y retourner régulièrement mais elle haïssait ça. Et elle se cachait de tout le monde là-bas. Je refuse de l'offrir sur un plateau aux gens qu'elle a passé tout notre temps ensemble à éviter, surtout quand elle n'est pas en état de se défendre ! »

Oh. Première nouvelle ; Rain ne s’est jamais interrogée sur les origines de Zyrrha, ça n’avait pas d’importance, d’ailleurs, qu’est-ce ce qu’elle connaît de ses deux amis ? Outre les grandes lignes, une poignée d’aventures ratées ?

« Je sais, je ne suis pas venue te voir, ni toi ni Zyrrha ni personne. » Elle pourrait reporter la faute sur Kaze et ses cauchemars, ça serait bien laid, « ça ne se reproduira plus, j’espère. »

Ses mains abandonnent son visage, le laissant terriblement ouvert, regard orné d’une douleur profonde.

« Oublions le Bayou, » pour l’instant, jusqu’à ce qu’on ne puisse plus faire autrement, « j’ignorais qu’elle était née là-bas—est-ce qu’on se connaît, tu crois ? Piètre question, oublie ça. Je ne sais même pas qui je suis supposée être. » Sa voix s’est baignée d’amertume, d’un truc qui ne concerne ni Jack ni Zyrrha.

« Vous avez pris soin de moi et j’ignore si je pourrais un jour la remercier pour ça. »
Est-ce que ça en valait la peine ?

Jack enchaîne des phrases invraisemblables, animé par une excitation loin d’enthousiasmer la jeune femme. Au lieu d’abandonner sa boisson sur le comptoir après cette première gorgée trop brutale, elle se surprend à la reprendre en main, buvant aussi lentement que possible. Dès que Jack marque une pause, elle fait de même, tentant de retrouver le soupçon de logique égaré quelque part.

«– D'où conclusion : il s'agit d'une malédiction similaire à celle de la Belle au Bois Dormant, qui n'a pu être réveillée que par un baiser d'amour sincère. »

Elle songe, l’espace d’un instant, à lui verser le contenu de sa chope sur ses cheveux trop clairs—de quel droit les hommes font-ils toujours ça, à décider de qui peut aimer en leur nom ? D’où est-ce que Jack s’est persuadé qu’il pouvait tout résoudre sans songer au—c’est quoi le mot que Dive emploie, lorsque son regard se fait distant et qu’il refuse même de poser une main sur son épaule ? Ah oui, consentement.

« Et vu qu'il est absolument hors de question que je laisse n'importe qui toucher Zyrrha, je vais trouver qui pourrait être son amoureux ! Ou son amoureuse. Je pense connaître assez bien Zyrrha pour déterminer si quelqu'un est susceptible d'être la bonne personne en discutant avec, et donc voici mon Plan : je vais parler avec tous les gens présents sur l'Île jusqu'à trouver la bonne personne ! »

Les larmes lui sont montées au yeux, et elle doit les cligner plusieurs fois pour les chasser. Il faut qu’elle soit dramatique, qu’elle n’attende pas la suite de l’explication pour émettre un jugement baignant de malveillance.

« Personne— » C’est horrible de le dire à voix-haute, elle n’est pas certaine d’en être capable, pourtant Rain persévère, « Personne ne devrait être touché d’une quelconque façon sans le vouloir. » Même quelqu’un d’aussi affreux qu’elle peut l’être. « Encore moins embrassé. Si tu laissais un.e inconnu.e infliger ça à Zyrrha en laissant ton espoir t’égarer, je te tuerais. »

Sa colère s’est presque apaisée—quoique pas forcément un bon signe si l’on connaît Rain—au calme de sa voix. Buvant un peu plus, elle marque une pause voulue avant de reprendre.

« Je te tuerais de la pire des façons, si Zyrrha est blessée par ta faute, par un homme égoïste obnubilé par ses désirs et non son affection. » C’est presque drôle, de clamer une telle chose, quand l’Impardonnable ne comprend pas la différence entre les deux.

(Elle n’a pas besoin de le faire, du moment qu’elle est au courant de l’immensité entre les concepts, elle peut se contenter de répéter des leçons qui peinent à trouver une place dans son crâne.)

« Ton cœur naïf risquerait de se tromper, de croire en un.e traître—l’amour est une abomination, un monstre gigantesque pire que n’importe quelle tempête, que le Givre et la Canicule et—Il est capable de tout engloutir, de ne laisser que l’esquisse d’une personne. »

Les contes originaux sont ainsi, non ? On les adoucit à chaque génération, on leur porte vocation à éduquer alors qu’à la base, leur but était d’avertir. Là encore, Rain n’est pas certaine de ce qui est dissemblable. Elle émet un ricanement sec, visage prisonnier d’un souvenir qui la force à fixer le liquide restant dans sa chope.

« Tu devras être sûr, au point de mettre ta vie entre les mains de cette personne, et même si tu en es capable—Jack, mon âme sœur, l’être pour qui je suis née, c’était un connard. Un monstre. Et tout indiquait que nous étions faits pour être éternels, même si ça allait être une bien courte éternité, et pourtant—il m’aimait vraiment, et c’est là la véritable tragédie, je crois.

S’il n’avait été qu’un garçon parmi une myriade de visages, un simple camarade de classe—je projette mon traumatisme, encore une fois, pardon.
Tch, je ferais mieux de boire. » Mieux que de penser à Lui.

Rain ne devrait même plus être surprise ; et elle ne l’est pas. Sa capacité extraordinaire à simplement faire merder chaque relation est sa propre malédiction. Quoique même le dire ainsi, c’est abject, ça pourrait insinuer que ça ne vient pas directement de son cerveau. Elle ne pensait pas en arriver à ce point avec Jack, mais dans le fond, c’est pareil avec tout le monde, il y a ce point de rupture qu’elle est incapable de voir et contre lequel elle pousse de toutes ses forces.

Une satisfaction malaisante à pousser les gens jusqu’à ce qu’ils la blessent en retour—une façon de se prouver qu’elle avait raison, et juste après, une douleur infinie.

Rain ne trésaille pas à la voix qui se hausse, il n’y a que sa mâchoire qui se crispe, la chope qui manque de partir contre un mur en un retournement de violence jusqu’à ce que Jack se la ferme. Elle se force à écouter, à ne pas l’imaginer abattant des mains qui lui paraissent bien trop larges d’un coup, et c’est presque pire.

Parfois, l’Impardonnable voudrait pouvoir se lever et interrompre les conversations à mi-chemin, les regarder mourir et abandonner la personne de la même manière ; au moins, ça serait de sa faute, un trait tiré, une ligne de plus quelque part au milieu de celles tracées par les flammes.

(Parfois aussi, Rain voudrait mourir, plutôt que de dire quoi que ce soit.)

« Tu ne l’as pas dit—tu n’as pas dit que sur la main ça suffirait—» Elle échappe la chope, qui va se vider au sol entre eux—mieux que dans le visage de Jack. La colère ne remonte pas, elle reste ce calme insupportable qui pousse Rain à couvrir son visage de ses mains, yeux écarquillés en un sentiment qu’elle ne comprend pas.

« Je n’ai pas compris—» Ses doigts s’enfoncent contre son front, laissant une couronne de croissants de lune avec ses ongles, « Je n’ai pas voulu comprendre, peut-être, » peut-être que ça serait mieux que tu me tues, ça elle ne le dit pas, cette fois, « je—je ne veux pas qu’elle subisse le même sort ! Que ça arrive à quiconque. »

Jack n’a même pas sous-entendu une telle chose, c’est juste que—que quoi exactement, hein ?

Le sang qui perle contre son front ne la dérange pas, ce n’est qu’une victimisation de plus, une façon d’attirer l’attention, un truc dont elle ne peut pas s’empêcher, dans le fond.

« Tu sais ce que c’est, Jack, d’avoir peur de tous les hommes ? Même du meilleur ? Même de ton propre frère ? Juste parce qu’il t’a regardé trop longtemps, qu’il a bougé trop vite ? » Elle descend du tabouret, avançant, juste trop, jusqu’à se tenir trop proche de Jack, la tête relevée, un vide évident dans son regard, trop de vide, « tu sais ce que ça fait de passer ta vie à te dire que ça doit se reproduire, que n’importe quel homme finira par te faire ça ? Même le bon, même le plus doux. J’adore ta confiance, ta bonté—et pourtant ça ne fait pas taire la petite voix, celle qui me dit que ça va mal se finir.

Comment pourrait-il en être autrement, une fois que tu es détruite, qu’on t’a utilisé, c’est comme si tu t’étais gravé une cible en plein milieu du front, » Elle ne peut pas rire, ni même l’attaquer, il ne reste rien, rien d’autre qu’une relation détruite de plus, qu’un abîme qui s’est engouffré sous ses vêtements.

« Je sais que j’ai tort, que tu ne feras jamais ça, que mon frère ne fera jamais ça. Pourquoi je ne peux pas juste étouffer cette voix, hein ? C’est une punition méritée, tu crois ? Je suppose. Tu veux juste aider Zyrrha, et tu y arriveras, je suppose encore.

Fais attention—à elle, à toi. Je sais que tu es un homme—un homme bien.» Mais lui aussi, tu ne comprends pas, lui aussi était bien, et c’est moi qui a tout gâché, « je dis toujours de telles horreurs.»

Elle suppose que c’est une fin, qu’il ne lui reparlera plus, incapable de comprendre que les gens se fâchent pour des mots tout aussi graves mais qu’ils parviennent à se rattraper, avec assez d’effort et de patience. Rain n’envisage pas les relations ainsi, elle les voit comme tout ou rien. Et là, son cœur s’est vidé totalement.

« Tu as tort sur un point, tu ne me tueras pas, tu n'es pas un monstre» Elle tire sur le coin de ses lèvres, en un sourire forcé qui la rend malade—qui brise ce qui restait dans la frontière entre le passé et cet instant, « c’est mon rôle, de ruiner jusqu’à ce qu’on me haïsse.

Pourtant, mon sourire n’est pas si faux, je me suis entraînée pendant toutes ces années—j’ai fait tout ce qu’il voulait et—je crois que c’est impossible, de sourire sans vouloir mourir, parfois. » Ses petits doigts glissent dans sa bouche, étirant un peu plus une expression devenue morbide.

Exactement comme Dai le faisait.
Parfaitement.

« Tu ne m’aimes plus, hein ? » Et elle n’est pas certaine de parler à Jack, à cet instant, ça se lit dans son regard embrumé, qui ne fixe rien du tout.

Je peux mieux faire, je peux me faire pardonner, je peux tout rattraper...
(Non, non, non.)

Un instant, l’espace d’une seconde qui ne cesse de s’étendre, elle pourrait presque se rappeler un visage, le tracer du bout des doigts—le garder là, quelque part entre le pouce et l’index, ne plus l’échapper. Et le temps continue de demeurer immobile tout en reculant, la Taverne devenue autre chose, un mélange de gris et de tâches colorées qui ne sont rien d’autre qu’une goutte de sang qui a glissé par-dessus un sourcil, terminant coincé contre les cils. Elle s’entend parler—et ce n’est pas sa voix, c’est celle d’un souvenir, les doigts à l’intérieur de sa bouche l’étouffant presque.

Il n’y a ni amitié perdue, ni ruines sur lesquelles se dresser avec une fierté mal-placée. Uniquement Rain-qui-n’est-pas-encore-Rain, et son corps qui menace de s’effondrer. Elle ignore ce qui se trouve sous ses pieds, sol ou néant, uniquement qu’elle se tient là encore et encore figée alors que le reste du monde avance inexorablement.

Oubliée—peut-être était-ce dans une gare, téléphone d’un vert pomme qui se moquait de sa présence, un rappel qu’importe le numéro, personne ne décrocherait.

« ...Je n'aurais pas dû te parler comme ça. »

Si tu ne me provoquais pas sans cesse, on ne tomberait pas dans des extrêmes. Tu te rends compte des efforts que je dois faire pour toi ? De mon sacrifice ? Tu crois que—

« Rain, tu es mon amie. »

C’est toi et moi contre le reste du monde—c’est le meilleur qu’on aura jamais, ensemble—si tu savais à quel point tu me fatigues à tout gâcher.

Un clignement d’yeux chasse la goutte carmin, qui continue sa course plus bas, inarrêtable.
Sol, mains, du jaune—des cheveux, une chemise, les doigts dans sa bouche qui sont en train de laisser des marques contre le coin de ses lèvres. Sol, chemise, la sienne, brûlure sur son bras, vernis à ongles.

Vernis, cicatrice—brûlure, appartement—le téléphone vert—un frère, pas le bon, qui est venu—les doigts qu’elle parvient à extraire de sa bouche, teintés de rouge, ses ongles ont déchiré l’intérieur—elle n’a pas mal, elle n’a pas mal du tout. Il n’y a rien, uniquement ce vide cinglant, cette absence de réponse.  

Peut-être qu’elle est ailleurs que là-bas, que la réponse lui échappe. Elle n’en sait rien—ce n’est pas normal, tu n’es pas normale—pourquoi tu tournes tout en drame ?

Elle aimerait trembler, se sentir en vie, juste un peu. Elle cligne ses yeux, encore, une fois, puis une autre. Une troisième. Ses mains hésitent, mélange de sang et de salive qui commence à coller.

Ne le touche pas, ne le touche pas.
Tu vas lui faire peur.

Elle se tourne, incapable de se souvenir de son nom ou du vernis, ou de la chemise ou de quoi que ce soit, attrapant la chope à deux mains, y refermant ses doigts sans violence. C’est un peu tiède, comme si quelqu’un d’autre avait été là, la tenant il y a peu.

Oh. Elle cligne des yeux. Une quatrième fois, une cinquième. Et, lentement, elle s’affaisse sur le sol, glissant sans se faire mal, chope oubliée. Elle presse son front contre le bois du comptoir, à genoux au sol.

L’envie de se donner un coup, de frapper jusqu’à s’ouvrir le crâne.

« C’est moi—qui suis désolée, » Rain—ah oui, c’est Rain à présent—parvient à articuler, fixant les doigts repliés contre sa jupe, les essuyant sans rien ajouter.

Vernis, chemise, un soupçon de bleu dans un recoin de ses yeux—ses cheveux, oui ils sont bleus aujourd’hui—Rain prend une inspiration. Où est-ce que son esprit a vrillé cette fois ? Elle décortique les phrases restantes, fantômes faits de lambeaux, jusqu’à recoudre le tout dans un ensemble approximatif.

Brûlure, le sol qui est mouillé, la voix de Jack—tch, elle s’est encore transformée en une tragédie devant lui. Pour le coup, elle n’a pas cherché à le tuer, toujours ça. Ils—ils sont quelque part, à mi-chemin entre sa respiration encore agitée et un bruit ambiant qu’elle peine à replacer.

Ses mains pressent contre le bois, redressant son corps pour qu’elle soit simplement assise plutôt qu’à genoux. « La taverne, » probablement. Où ailleurs seraient-ils, sinon dans un recoin de sa tête en morceaux ? Elle essuie son front, le sang qui perle encore, laissant une trace sombre au-dessus de ses sourcils. Pas que ça ne paraisse lui faire mal, et encore moins la déranger.

Se mutiler, c’est probablement ce qu’elle a fait de moins dramatique ce soir. « Je suis désolée—» Rain se raccroche à ces trois mots, à défaut d’avoir autre chose, « Le trauma—ce que j’ai vécu ne peut pas vraiment tenir lieu d’excuse—encore moins de justification. Je suppose que ça peut être une raison, à défaut de mieux. »

Si, juste une fois, elle parvenait à se couper dans son élan, à ne pas plonger dans une crise vouée à retomber tout aussi brutalement qu’elle a commencé. Son expression s’est durcie, pas contre Jack—il y a une lueur pleine de venin sur son visage. « Je n’ai pas à te juger, encore moins à te voler la moindre parole pour en faire une arme, ce n'est pas ta faute. »

Et elle ne comprendra jamais pourquoi Jack persiste à tout lui pardonner, comme si elle ne souhaitait pas le pire une fois sur deux. Peut-être que ça serait réconfortant, d’avoir raison, de se faire rejeter. Ou alors, tout serait encore pire. « Je suis désolée, » je suis malade, dans ma tête, y’a un truc irréparable, et je ne peux que m’excuser, maintenant que je sais le faire, parce que ça n’ira jamais bien, « je n’aime pas beaucoup les hommes. Pas contre toi, juste en général.

Est-ce que je t’ai fait peur ? »

Pour ce sourire, elle serait capable de tuer ; pas que ça soit une quelconque déclaration, uniquement un truc viscéral, un besoin de cesser de détruire Jack à chaque conversation. Ses sourires sont vraiment extraordinaires, capables de chasser n’importe quelle tempête. Elle a envie de lui tirer sur les joues, de se moquer. A cet instant, malheureusement, Rain n’a aucune confiance dans ses mains, encore moins dans les veines, tissus et organes qui pèsent si lourd à l’intérieur de son corps. Elle serait trop cruelle.

« C’était un souvenir—une hallucination sous une forme différente, » elle aurait préféré voir un fantôme se tenir un peu plus loin, juste parce que ça, au moins, elle en avait l’habitude. Il lui semble que ça fait un moment qu’elle ne croise plus le mauvais reflet dans les miroirs brisés de sa demeure. « Je me rappelle de trucs que je voudrais garder pour moi, plutôt que de superposer un visage par-dessus le tien sans raison. »

Peut-être que c’est sa manière de gérer—absolument horrible et que l’on peut questionner, mais probablement mieux que de rejeter sa mémoire. Le hic, c’est que ce n’est pas des émotions, ni des scènes, qui ont besoin d’un témoin et encore moins d’une audience. Tout en parlant d'une voix fatiguée, elle presse le bout de l’index puis celui du majeur contre son pouce, faisant le même geste avec ses deux mains. C’est un stim apaisant, mieux que de chercher à enfoncer ses ongles quelque part.

« Tu peux rester—ou plutôt, on pourrait aller ailleurs ? Je crois que j’ai eu ma dose d’humiliation publique pour la soirée. »