La neige est comme un rideau calme et ses pas Howl laissent des traces qui ne sont plus là s’il se retourne pour les voir, et même les arbres, même les feuilles, même les roches disparaissent sous le Blanc coton qui descend du ciel depuis ce matin là. On dit qu’elle fait moins mal et qu’elle n’écorche plus les peaux. Il sait que c’est vrai et les flocons qui caressent parfois ses joues un peu rouges sont légers et doux, ils ressemblent aux rêves qui font Chaud au fond du cœur. On dit que le gel a commencé à fondre, que les rivières se libèrent, et la glace qui emprisonne les eaux semble plus fragile en de nombreux endroits, mais peut-être que c’est juste son esprit qui invente après avoir entendu les rumeurs, peut-être que c’est juste parce qu’il y croit Howl. Il y croit, même s’il ne veut pas que la neige arrête de tomber parce qu’il est bien dans le froid. Il y croit parc qu’il y a des malades. Parce qu’il y a des Morts. Parce que l’Hiver doit s’arrêter pour que la terre produise de quoi manger.

Alors Howl y croit, oui. Comme tous les autres. Et il déambule sous la neige parce qu’elle est encore là, et il écoute le son de ses pas qui font crisser la poudreuse et ça lui rappelle l’Avant un peu souvent.

Howl sourit avec toutes ses dents.

Il pousse les fougères glacées et elles ont l’air de frémir sous ses doigts, et il s’arrête juste là avec son gant sur les feuilles tremblantes et l’air d’un gibier qu’on a capturé. Le Protecteur est loin du camp. Il est loin et c’est pire, devant lui il y a le banc d’un sable blanc et la lagune des sirènes qui s’étend. Au milieu de la mer plus loin il le sait. Hook, et on dit qu’il est malade mais Howl ça ne sait pas. Il ne sait pas non plus comment il est arrivé là.

Alors il recule d’un pas et ça fait craquer une branche. Howl sursaute, et il reste immobile tout un temps immense avec les battements de son cœur plus bruyants que tout le reste autour et puis il se retourne.

Il va partir. Mais peut-être qu’il n’en aura pas le temps.

Psst! Ici:

Howl entend la voix. Le chant mystérieux qui s’élève. Et il frissonne dans le vent d’hiver qui souffle et il se met en route, presque sans s’en rendre compte, un pas après l'autre vers la lagune sans parvenir à résister mais il n’essaye même pas. Il laisse tomber ses peurs sur le sable mou pour aller vers l’eau et elle a l'air calme, comme l’est toujours la montagne avant les tempêtes qui glacent les yaks et les os. Vide. Alors il se demande d’où a pu venir la voix qui s’est tue, il regarde autour de lui vers les rochers qui se cachent dans la neige et le vent mais il voit rien et il avance encore. Et l’eau est grise, comme la couleur du ciel, trouble du mouvement de la tempête et ses rafales jouent dans ses boucles brunes.

Howl frissonne, il ne sourit plus. Avec dans le fond des tripes une angoisse qui se loge, plus sourde qu'avant, plus violente aussi et il se recroqueville sous l'épaisseur de ses vêtements.

"Il y a quelqu'un ?"

Et son accent d'Ailleurs oublie de chanter, et les mots rapent comme une claque glacée. Il s'agite. Sans comprendre ce qu'il fait là, il n'y a plus de voix et pourtant il ne songe pas tout de suite à partir. Retenu encore un peu par quelque chose d'invisible à ses deux yeux noirs comme les Abysses de l'Océan.

"Je a entendu chanter."

Sa maladresse, qui l'agace, dans une tentative pour démêler l'improbable de la situation. Car Howl n'a jamais entendu parler de la lagune qui chante ses complaintes, vide de ses sirènes-filles. On ne lui a pas dit que l'eau pouvait chanter, et elle a l'air paisible à vrai dire entre deux bourrasques pour la secouer.

Psst! Ici: