La cohorte des chasseurs se mouvait comme une seule entité, tranquille et redoutable. C’était une masse grouillante, hérissée d’arcs et de lances dans laquelle une Souris préférait se laisser noyer. Certes, d’ici elle n’y voyait pas grand-chose mais se savoir invisible dans une bande aussi intimidante avait quelque chose de sécurisant.

Aussi, lorsqu’une paire de bras se referma sur elle et la tira de sa cachette, Alive eut un sursaut terrible. Avec ses yeux écarquillés et sa bouche ouverte mais muette, on aurait dit un poisson qu’on venait tout juste de pêcher. Alive tourna la tête pour distinguer le visage de son ravisseur et fut bien étonnée de tomber nez à nez avec une parfaite inconnue.

— Moi c’est Pretty. se présenta la jolie blonde. Enchanté. Ça te dit que je te coupe les cheveux ? Tu dois pas voir grand-chose quand tu chasses.

Alive en resta bouche-bée. Pour quelqu’un qui manquait autant d’assurance, cette proposition paraissait diablement audacieuse.  Tout ça allait beaucoup trop vite, elles ne se connaissaient même pas !

— En plus ça nous ferait une séance de papotage entre filles, ajouta Pretty.

Dans la tête d’Alive, il y avait tant de questions qui se bousculaient qu’elle ne savait pas par quoi commencer. A quelques mètres de là, les chasseurs poursuivaient leur route. Ils ne l’attendraient pas. Alive renonça à les rattraper pour se concentrer sur la situation actuelle.

— J-je m’appelle Alive, répondit finalement la Souris.

Elle semblait essayer de remettre de l’ordre dans cette conversation et de… ralentir le rythme.

— Tu… me connais ?

Alive resta perplexe, même lorsque Pretty opina à ce qu’elle venait de dire. Elle ne se rappelait pas avoir jamais conversé avec cette fille auparavant.

— Tu es repérable au milieu des Chasseurs.

Cette dernière remarque eut raison de ses derniers doutes : autant dire qu’elles ne se connaissaient pas. Mais n’empêche… elle ne manquait pas d’assurance pour oser aborder une parfaite inconnue, même s’il ne s’agissait que d’une fillette pas très intimidante. Alive aurait aimé être capable de faire quelque chose comme ça.

Boop. La Souris eut un mouvement de recul. Elle porta machinalement la main à son nez.

— Alors, partante pour une remise en beauté ? demanda Pretty.

Rosie d’embarras, Alive ne savait pas quoi répondre. On ne lui avait jamais proposé une activité de grande, auparavant. Elle ne savait pas si elle en avait réellement envie. Peut-être ?

— Mais… je ne suis pas jolie, moi, émit la chasseuse.

Pretty, si. Elle en avait de la chance, de porter un aussi joli nom. En plus, il lui allait comme un gant.

— Tu n'es pas joli, mais tu as le potentiel de l'être. Il faut juste...

La chasseuse détourna le regard, ne sachant comment prendre cet encouragement… Les doigts de Pretty se glissèrent dans ses cheveux, lui arrachant un sursaut.

—... Prendre soin de toi. Physiquement, tu vois ? poursuivait-elle. Une tresse t'irait très bien. Sur le côté. Et pourquoi pas une fleur, ou une barrette, pour embellir tout ça ?

Alive hocha la tête, son visage blême devenu cramoisi. Elle n’arrivait pas à suivre, tout ça allait beaucoup trop vite. On n’envisage pas de changer sur un coup de tête, elle avait besoin de beaucoup plus de temps pour s’y préparer, pour oser… Les autres pourraient se moquer d’elle, ou la trouver très imbue d’elle-même. Elle grimaça. Si elle commettait une erreur, qu’on la disputait alors qu’elle s’était faite jolie, elle aurait l’air encore plus stupide. Avait-elle seulement mérité de s’accorder ce genre d’attention ? Les filles jolies se font jolies, les filles laides peuvent les imiter quand elles sont irréprochables.
Alive n’était ni l’un ni l’autre.

— Je suis pas sûre…

La chasseuse glissa un regard vers le groupe des chasseurs qui ne l’avait pas attendu. Il n’y avait personne qu’elle connaissait réellement parmi eux, personne qui pourrait remarquer son absence. Alors, elle pris une profonde inspiration avant de glisser sa main dans celle de Pretty, tout en baissant soigneusement le regard. Pretty l’intimidait un peu mais elle ne semblait pas avoir de mauvaises intentions.
C’était peut-être l’occasion de se faire une nouvelle amie après tout…