HRP:

Le Capitaine était à l'origine de tout, c'était ainsi que fonctionnait l'univers, mais cette fois-ci même un aveugle eut pu s'en rendre compte.

Tout commença par un hoquet. L'évènement, en soi, quoi que surprenant, n'avait rien de bien extraordinaire. Du moins, ce fut ce que Smee songea alors que les phrases du Capitaine se hachaient sous les effets d'incontrôlables sursauts. Certains matelots, s'en apercevant, trouvèrent même le phénomène plutôt cocasse ; le regard le plus noir de Smee suffit cependant à clôre leurs bouches sur les moqueries irrespectueuses que leurs yeux trahissaient.

Quelques heures plus tard, cela n'avait pas cessé. Un agacement notable embuait les gestes du Capitaine, mais l'aventure n'était encore qu'un interlude à l'humour douteux.

Puis la nuit vint. Loin d'offrir le réconfort du sommeil, l'oubli et le repos, la pénombre fit ressortir, plus net que jamais, le sérieux du problème. Le hoquet ne s'arrêtait pas. Le hoquet persistait, malgré les efforts de contrôle, malgré les recettes de grand-mère, malgré tout. Le hoquet persistait et devenait un handicap, car comment dormir lorsque son propre corps n'est que trahison, se rappelant au conscient par des spasmes réguliers ?

Le lendemain matin la patience du Capitaine était à bout, et les cernes sous ses yeux révélateurs. Il n'était plus question d'attendre que cela cesse par miracle. Il fallait s'armer dans cette lutte, au plus vite.

Hélas, le maître armurier s'appelait en l'occurrence Braumeister. Ce n'était pas de gaieté de cœur que Smee avait admis la compétence probable en la matière du distilleur, mais il fallait lui reconnaître un talent certain pour toutes sortes de potions. Notamment une certaine potion de Terreur Liquide qu'il avait mentionné en passant alors qu'il menait encore ses expériences dans un recoin de cale du Jolly Roger. Contre un hoquet aussi obstiné, quel autre remède ?

Ce fut donc avec résignation, ainsi qu'une circonspection née de maintes observations passées, que Smee pénétra dans la Taverne Rhumantique. Il se dirigea droit vers le comptoir, occultant les sons des conversations comme ceux des verres levés, vidés, reposés. Occultant aussi cette sensation pesante de regards plantés droits dans son dos –il était cela dit intéressant de constater qu'il y avait là plusieurs personnes suffisamment peu éméchées pour se demander ce qui pouvait amener ici le second.

La salle toute entière sentait l'alcool.

Smee s'accouda au comptoir, notant distraitement la qualité légèrement collante du bois, et se pencha vers le distilleur.

– Braumeister, mon cher… J'ai une requête à vous adresser.

Le ton pouvait paraître léger à qui ne connaissait pas Smee, mais l'intensité de son regard aurait suffit à assurer de son sérieux. Et Braumeister connaissait Smee, comme ce dernier le connaissait. En témoignait la Liste placardée en ces lieux.

La bière et le rhum coulaient à flots continus, et Braumeister avait beaucoup de mal à suivre toutes les commandes. Shifty avait… Disparu, avec certains de ses secrets de fabrication, et ça le gênait un peu. Pas tant que ça, puisqu'il lui manquerait le matériel, mais tout de même. Une aussi bonne apprentie ( dans tous les sens du terme, haha ) ne se trouvait pas à tous les coins de rue. Et puis, maintenant, il avait une serveuse importante de moins et devait pour le coup plus servir la plèbe ivrogne de mauvais payeurs. Patience, Braumeister, Lady Ruby paiera, et eux travailleront pour elle… Mais en attendant, il fallait servir.

Surtout quand un V.I.P fait son entrée, aussi strict et restreignant soit-il. Il faut savoir être aux petits soins, pour éviter que la liste ne s'allonge que de trop.

« Je n'irai pas jusqu'à dire que tout le plaisir est pour moi, monsieur Smee, mais un client reste un client. Que puis-je pour votre service ? »

La chaleur de la beuverie, des transformations spontanées et des rires gras ne cachèrent qu'à peine l'onde glaciale qui naissait entre les hommes. Braumeister ne souhaitait pas se laisser avoir par le second une… … Euh… fois de plus.

Les bruits multiples de la taverne disparurent alors que toute l'attention de Smee s'écrasait sur Braumeister. L'Alchimiste avait plus d'une fois prouvé sa nature tout aussi volatile que ses alcools ; le surveiller de près n'était jamais une perte de temps.

– Vous avez mentionné par le passé une certaine potion de, je cite, "Terreur Liquide". Quels seraient exactement les effets d'une telle potion ?

Ce n'était pas parce que l'idée paraissait séduisante que rien de dangereux ne la teintait. Il s'agissait, après tout, de Braumeister. Avec lui, les effets secondaires pouvaient s'avérer plus nombreux que les poissons dans la mer –et dans cette mer de l'imaginaire, on ne plaisantait pas avec certains poissons.

«Terreur liquide... Jajaja... Cela fait longtemps que je n'ai pas entendu parler de ce breuvage, monsieur Smee. »

Le sourire de Braumeister s'élargit. Là dessus, le second ne pouvait rien contre lui : il n'en avait pas produit depuis au moins... PFIOUH ! Longtemps. Il était donc impensable que les maigres libertés qu'on lui accordait se resserrent plus encore.

« Un de mes produits favoris. Si surprenant et intéressant... »

Mais c'était plus fort que lui. Braumeister devait en faire la publicité. Il continuait de servir ses autres clients sans leur prêter trop attention, parfois glissant un ajout dans leur boisson, comme pour dire " Ici, Smee, c'est moi le chef. Je fais ce que je veux. " Il ne regardait même plus le second.

« Une seule gorgée, même diluée, vient chercher au fond de votre inconscient votre peur la plus oppressante, la plus intime. Effet garanti, Jajaja ! J'en ai vu souiller leur pantalon tellement c'était puissant ! Je ne parlerai pas du vieux Gil, il ne faudrait pas qu'on pense que cette potion puisse tuer des gens. Et puis personne ne l'aimait, ce grabataire. Au moins, ça a pu prouver qu'il avait un cœur, vu que c'est difficile de faire une crise cardiaque sans. »

Hem. Même un inconscient comme Braumeister comprenait qu'il en avait trop dit.

« Ahem. Cependant, aucune crainte à avoir, monsieur Smee. Je ne produis plus ce breuvage. »

Plus les ingrédients. Pas assez de demandes. Pas de volontaires. Mais ça, Smee n'était pas forcé d'être au courant, juste savoir qu'il n'en produisait plus devrait le calmer. Qui lui avait ressorti l'histoire du vieux grincheux, pour que ce casse-pieds de second revienne le voir ?

Les yeux de Smee suivirent quelques instants les gestes de Braumeister, avant de revenir résolument se fixer sur son visage. Le sort des clients assez inconscients pour payer pour se faire empoisonner par l'Alchimiste n'était pas de son ressort. Ceux-là étaient déjà irrécupérables, et Smee avait d'autres batailles à mener. Des combats bien plus décisifs.

– Cela est fort dommage, mon cher… Il se trouve que j'aurais usage d'une telle potion.

Le regard de Smee parvint à se faire encore plus pesant.

– De quels ingrédients avez-vous besoin ?

Inutile de demander s'il ferait la potion. La question n'était pas ouverte à négociation.

Toujours rester sobre en heure de service était un des rares devoirs que s'imposait l'Alchimiste. Ainsi que le savoir-vivre qui était de ne pas manger ses snacks vivants au vu et su de tout le monde. Aussi se servit-il un verre d'eau toute bête pour désaltérer son gosier trop sec de boniment. Verre d'eau qu'il cracha immédiatement lorsque Smee lui fit sa demande.

« V-Vous plaisantez, monsieur Smee ! »

Le regard froid et insistant du second lui confirma le contraire.

« Non, souffla le brasseur, vous ne plaisantez pas... »

Un sourire de satisfaction, accompagné d'une lueur de supériorité dans son regard, éclaircit son visage.

« Vous avez besoin de moi. Vous avez besoin du Braumeister... »

Un rire mauvais retentit dans la taverne.

« Mais pour faire cette potion, je vais avoir besoin d'ingrédients venus d'un endroit très particulier. Mais je ne peux pas y aller à cause de vos règles, Sir. »

Braumeister s'accouda au comptoir, très satisfait.

« Me ferez-vous l'honneur de m'accompagner au Domaine de la Peur, Monsieur Smee ? »

Plus l'Alchimiste se réjouissait, plus l'attitude de Smee se faisait rigide. Pourtant, ce fut d'un ton presque rêveur qu'il répondit.

– Je ne pense pas que vous devriez vivre cela comme un honneur, mon cher. S'il est évident que je vous accompagnerai, ce n'est que pour veiller à ce que vous remplissiez votre tâche. Je ne voudrais point que vous vous égariez, voyez-vous.

Un dernier regard glacial, puis Smee tourna la tête, paraissant surpris de découvrir la foule occupée à se noyer dans les alcools et autres préparations de Braumeister. La conscience du brouhaha ambiant lui revint comme une chape de plomb ; ses doigts se crispèrent sur le comptoir.

– Dites-moi, quand pourrions-nous partir ? Il me semble qu'il s'agit d'une urgence.

La clientèle la plus lucide avait déjà commencé à partir quand Braumeister s'était mis à rire, mais quand il entendit la réponse de Smee à sa question, son "YEEEEESSSS" tonitruant finit de faire fuir la clientèle, et Braumeister et Smee se retrouvèrent seuls, tête à tête.

Après un léger silence gênant, l'Alchimiste haussa les épaules.

« Je range deux-trois bricoles, je récupère mon matériel et nous partons ? »



Braumeister prit une forte inspiration. L'air vicié du domaine d'Halloween vint emplir ses poumons.

« Sentez-vous cette odeur d'aventure, monsieur Smee ? »

Il avait emporté avec lui son sac de récolte, une faucille, un marteau, plusieurs fioles vides et tout un tas de petits flacons en tout genre.

« Je n'aurais jamais cru revenir ici en une telle compagnie... Mon dernier gros voyage était sous l'océan, quand vous étiez partis avec Villy pour chas- »

Ah oui, il l'avait fait dans son dos. Quand la distillerie était encore dans le Jolly Roger. Wouah, ça remontait ! Braumeister se sentit un peu rajeunir à cette idée. Il était aussi excité qu'un gosse de cinq ans dans un parc d'attraction.

« Alors alors alors, par quoi va-t-on commencer... L'Untotefuss semble une excellente idée. »

Quoi qu'en dît Braumeister, cela ne sentait pas spécialement l'aventure. Cela sentait… le renfermé, curieusement.

Dans la pénombre et la brume, il était facile de se perdre, mais aussi de se sentir oppressé, isolé. Dans le cas présent, cela signifiait que l'impression d'être enfermé quelque part avec l'Alchimiste était renforcée. Et puisqu'on n'y voyait presque rien, l'attention visuelle de Smee ne pouvait s'égarer sur quoi que ce fût d'autre que son compagnon de quête.

Smee fronça légèrement les sourcils, mais ne releva pas l'interruption peu discrète de Braumeister. Il n'avait aucun souvenir d'une chasse avec Wilhelm ; il pouvait donc raisonnablement estimer que les conséquences de ce que l'Alchimiste souhaitait lui cacher avaient elles aussi disparu.

Derrière le babil de Braumeister, il n'y avait que peu de sons. Peut-être le brouillard étouffait-il tout. On percevait néanmoins des grincements inidentifiables. Malgré son expérience, Smee ne parvenait même pas à déterminer quel type de matériau pouvait créer pareil bruit.

– Qu'est-ce donc que votre… "Untotefuss" ? Et à quoi ressemble précisément ce que nous cherchons ?

C'était plus fort que lui. Braumeister poussa doucement les portes bien grinçantes du domaine de l'effroi. Une manière de faire savoir sa présence, et un instinct qu'il eut sur le moment. Peut-être une touche de sens du spectacle ? Il sourit, regardant le paysage embrumé, à la recherche de ce qui pourrait l'intéresser.

« Un Untotefuss, Monsieur Smee, est un champignon qui ne pousse que sur les doigts des pieds des Zombies. Le cauchemar de Villy, si vous me permettez l'expression. Nous aurons besoin d'une dizaine de ces petites merveilles qui ressemblent à de petits crânes verts pour avoir ce qu'il nous faut. Éventuellement plus, je pourrais manquer le breuvage. Je vous ai dit que j'avais arrêté d'en faire depuis un moment ? »

Des grognements venus de la brume se firent entendre.

« Je crois que nos premiers clients sont arrivés, Monsieur Smee. »

Braumeister sortit sa faucille et son marteau, un sourire malsain se dessinant sur son visage...

Plus les pirates s'enfonçaient dans le Domaine d'Halloween, plus le sourire de l'Alchimiste semblait sinistrement large. Ses joues paraissaient plus creuses, ses pommettes plus saillantes, et ses lèvres s'étiraient selon un angle étrange. Il était possible que ce fût uniquement l'anatomie de Braumeister, tout comme la lumière peu enthousiaste de l'endroit pouvait être blâmée. Difficile à dire.

Smee ne releva pas le choix questionnable d'aller à la cueillette aux champignons avec un marteau. Pour ce qu'il en savait, leurs cibles formaient peut-être des coquilles rocheuses autour d'elles. Il fallait s'attendre à tout de la part de quelque chose qui servait d'ingrédient à Braumeister.

Puis de la brume émergèrent des silhouettes titubantes. Cela avait été des hommes. À présent leur chair était tout autant en lambeaux que leurs vêtements, et leur regard vide divaguait dans l'espace. C'était cependant avec une précision remarquable que les zombis se dirigeaient droit vers les intrus.

Cela leur éviterait d'avoir à leur courir après. Cette récolte macabre serait peut-être plus rapide que l'avait craint Smee.

– Après vous, mon cher, invita Smee.

Il dégaina Jean Tire-bouchon et balaya la zone du regard. Un, deux, trois, quatre… combien donc en avaient-ils attiré ?


[HJ : navré, je fais pas beaucoup avancer le truc, mais au moins ça débloque un peu le topic ? =')]

« Attention à ne pas vous faire mordre, Monsieur Smee. Ce serait dommage que le Roger perde son meilleur second. »

L'ironie était palpable. Même si ce n'était pas du tout le but de l'expédition, Braumeister n'était pas forcément contre se débarrasser de ce foutu second et de sa maudite liste. Mais la priorité numéro un restait de rentrer avec le plus d'ingrédients possibles, se servir de Smee pour se refaire un inventaire complet en second, et peut-être, peut-être, avec de la chance, se servir des Horreurs pour se débarrasser du Second. Mais pour le moment, celui-ci était son ticket d'aller-retour, alors... Autant être de son côté.

Les morts qui mâchent approchaient lentement, grognant et mordant la brume. En temps normal, les deux hommes auraient été une proie de choix. Mais là, c'était eux, la proie. Braumeister, dans un style qu'il avait expérimenté et aiguisé grâce aux évasions de sa goule, avançait, frappait, reculait. Dès qu'un mort tombait, il se dépêchait de le ramasser et de le tirer hors de portée avant de récolter les précieux champignons.

« Kein Problem, Monsieur Smee ? » cria-t-il au Second. « Essayez de tenir le temps que je les récolte !»

Smee n'aimait pas cela du tout, mais force était de reconnaître qu'il avait (une fois de plus) sous-estimé l'Alchimiste. D'ordinaire, lorsque cela arrivait, c'était ses capacités à créer le chaos qu'il devait revoir à la hausse. Cette fois-ci, c'était son aptitude au combat. Braumeister avait des gestes sûrs, maitrisés, et semblait même coutumier de ce type de rencontre.

(Quelque part au fond de son esprit, Smee étouffa dans l'œuf la question de ce que Braumeister faisait de ses journées à présent qu'il vivait à terre. Ce n'était plus directement son problème, et il avait bien d'autres choses plus capitales à penser.)

Cela étant posé, les zombies n'étaient pas les ennemis les plus dangereux que Smee avait eu à affronter. S'ils étaient nombreux, et ne cessaient de sortir de la brume pour remplacer leurs camarades tombés, ils étaient maladroits et incapables de se coordonner. Ce qui était heureux pour les pirates, car il n'aurait pas été bien compliqué de profiter de la récolte champignonière de Braumeister pour s'en prendre à lui et isoler Smee.

En l'état, Smee n'avait eu à repousser d'un vif coup de pied dans le torse qu'un unique zombie s'intéressant de trop près à l'Alchimiste (mais il avait dû s'y reprendre à deux fois, car apparemment ce monstre-ci précisément s'était amouraché de Braumeister). Les autres, il taillait dans leur chair morte lorsqu'ils passaient à portée de Jean Tire-bouchon et se contentait principalement de les esquiver. Autrement dit, il servait de distraction.

– Vous qui êtes un fin connaisseur de ces créatures, lança Smee sans quitter ses ennemis du regard, sont-elles d'ordinaires si nombreuses dans un unique groupe ?

Vu son ton, il aurait pu demander des précisions sur l'importance de l'ensoleillement dans la culture du thé.

« Fin connaisseur, moi ? HA ! Je sais juste qu'elles ont ce que je cherche. D'ailleurs, il faudrait commencer à s'écarter j'ai ce qu'il faut. »

Et la horde commençait à dépasser les suppositions de l'Alchimiste. Cependant, loin de l'effrayer, cette nouvelle sembla plutôt le faire rire. Quelque part, au fond de lui, l'Alchimiste se rappelait de la Guerre contre la Peur. Et de la prochaine horreur à affronter. Attrapant le second par le bras pour l'emmener dans un autre coin du cimetière, Friedrich décida assez aléatoirement de la suite du parcours.

« Par là ! » dit-il d'un air sûr en étant certain de ne pas savoir où aller. « Il est probable qu'on les sème en allant par là ! »

Pari risqué, pari gagné. Les deux pirates purent souffler. La horde avait été semée. Le temps de reprendre son souffle, le Braumeister observa les environs. Un cimetière, vide en apparence. Juste les deux pirates. Et des tombes. A perte de vue. Le sinistre sourire du Braumeister s'élargit à nouveau.

« Eh là donc, Monsieur Smee. Connaissez-vous la différence entre un squelette normal d'humain et un des Squelettes d'Halloween ? »

Une main d'un blanc d'albâtre plus fine que celle d'un pianiste sortit de la terre devant une pierre sépulchrale.

« En tout cas lui n'a plus la peau sur les os... »

Smee se laissa entraîner par l'Alchimiste, se contentant de lever un sourcil devant la familiarité avec laquelle celui-ci se permettait de le toucher ainsi. Les pirates s'enfoncèrent donc dans le territoire sombre et brumeux d'Halloween.

Les zombies ne pouvaient rien pour suivre le rythme de course des deux hommes (Smee nota mentalement que la sédentarité n'avait en rien entamé le côté curieusement athlétique du tavernier ; d'un autre côté si le moindre de ses breuvages nécessitait de telles expéditions, cela n'avait rien de surprenant). Pendant quelques instants, ils purent croire être seuls.

Puis Braumeister sourit, et Smee contint un soupir.

Devant l'une des pierres tombales qui ponctuaient le paysage, la terre remua pour laisser s'échapper un bras où aucune chair morte ne subsistait. Un léger grondement sourd, à peine perceptible, souffla à Smee que ce n'était pas le seul endroit du cimetière où le sous-sol s'agitait.

– Laissez-moi deviner, répondit Smee d'un ton pince-sans-rire, les squelettes d'Halloween aimeraient faire de nous leurs camarades de jeu ?

Un regard panoramique lui apprit que plusieurs maccabées tentaient de prendre de vitesse leur camarade pour leur sortie de terre.

– A-t-on besoin de quoi que ce soit en rapport avec ces créatures, ou pouvons-nous quitter les lieux avant de devoir nous frayer un chemin de nouveau ?