Ancienne Soigneuse du Grand Arbre du nom D'Amnésia, bannie au début de la Canicule.


Amnesia avait toujours été là. Bien avant lui, avant son arrivée. Quand l’Infirmerie n’était encore qu’anarchie et petits bricolages (selon Mary), elle avait fait partie des premières sur lequel il dut compter, lui qui était si peu habitué à côtoyer de jeunes occidentales, lui qui n’était pas encore certain de savoir comment manier une équipe, comment les aider, comment s’en sortir.
Lui qui était à peine plus âgé qu’elle, qui semblait aussi… un peu perdue, presqu’éthérée. Amnésia lui donnait l’impression parfois ; qu’elle disparaissait. Qu’elle se disparaissait.
Peut-être était-ce la guerre de son époque à la lisière de laquelle le soigneur était né. Peut-être qu’il s’agissait de quelque chose de bien plus profond de bien plus enfouis, à l’image de ses terribles cicatrices qui ne voulaient pas guérir.
Que Soul s’acharnait pourtant à désinfecter avec douceur, et à chercher les remèdes les plus apaisants, les plantes qui favoriserait enfin la régénération.
A l’époque l’Immuable n’avait pas encore réalisé combien ce qu’ici, la foi et la persuasion pouvait influencer. La psyché même de son auteur… Comme celle de Peter Pan, fasciné par les histoires d’horreurs qu’Amnésia lui contait de son livre préféré.

Mais ce n’était pas parce qu’il ne comprenait pas qu’il devait abandonner. Alors il continuait, par des gestes devenu routine. Elle faisait parti des siens, il était responsable d’elle. Plus que tout autres, il devait l’aider. Et réussir enfin à la soigner. Mais la raison chaotique d’Amnésia continuer de refuser, de se punir. De perdurer à souffrir. Comme pour laisser un souvenir sur l’histoire qu’elle avait oubliée.

Dans ses propos et obsessions, elle lui faisait penser à un tout autre personnage, au lapin d’Alice. Même pâleur et obsession du temps, même us à vénérer et craindre, un monstrueux tyran. Que ce soit une tête à couper ou à rendre folle.

Alors Soul continuait de s’inquièter, sans se rendre compte du rapprochement, de la confusion dans ces yeux d’enfants. De l’attention qu’elle absorbait voracement, des gestes qui la faisait souffrir et dont il n’avait jamais eu conscience ; ce n’était qu’une enfant. C’était une soigneuse, une de ses soigneuses, parmi les êtres les plus importants… Entre patient et infirmière, même avec ses bizarreries, Soul s’y était habitué, avait appris à l’aimer.


Et quand le bannissement tonna et l’ébranla, le Chef des Soigneurs crut à une farce, un tremblement de terre, ou bien un rêve. Oui, il devait s’être pour une fois endormi. Et ce n’était pas le Lapin Blanc ligotée au Poteau, ce n’était pas SA soigneuse.
Bow avait agi habilement, le prenant de court, ayant anticipé toutes les défenses qu’il aurait voulu appliquer… En lui envoyant le coup le plus cinglant ; une demi vérité.
Il était responsable de son grandissement. Dès lors, tout était perdu. Car même Soul savait dans l'inconscient qu'il taisait, que Peter Pan refuserait le moindre égarement, la moindre diversion trop forte qui ne fasse de l’ombre, qui le pousserait à s’éloigner, qui lui enlèverait son soigneur. Définitivement.

Soul savait. Soul souffrait. Soul grandissait pourtant aussi, avait été la cause d’une autre tourmente. Et ne pouvait lutter face à la possessivité de Peter… ni les machinations habilement orchestrées de Bow.

Encore une fois, le Chef des Soigneurs n’était pas parvenu à l’aider, ni à la sauver. Pire… Il l’avait entrainé. Martelant son cœur déjà morcelé par les éclats du Dragon, ses plaies encore béante, et le traumatisme de n’avoir pu protéger aucun des enfants lors du rapt pirate intenté contre lui. De ne pas avoir pu protéger ou réveiller Pan de sa langueur, de ne pas avoir pu l’empêcher d’achever les siens.
Le Bannissement d’Amnesia, c’était un coup de plus, un coup sournois, auquel Soul déjà trop fragilisé, n’aurait de toute manière ne pouvait résister.

Depuis, il prie. La nature, Bouddha, les Esprits. Tout ceux qui voudraient bien accueillir la soigneuse – Sa soigneuse -  et qui l’aiderait. A survivre ou à ne plus errer ? Que son âme enfin, soit apaisée... alors qu’il ne cesse de lui demander pardon, pour ne pas avoir été plus fort, pour ne pas s’être rendu compte, pour ne pas avoir fait, pour avoir trop fait…
Et ne cesser de se torturer dans cette culpabilité.

Souvent, Il se surprend à tendre l’oreille, à chercher ses chansons éraillées et chuchotements, ceux qu'il ne pourra plus jamais entendre que dans ses tourments.