Ni route pavée, ni chemin de terre pour assurer leur progression.

En bordure de forêt, les arbres sont suffisamment espacés pour laisser passer le vieux chariot et la mule qui le tire péniblement. Assis à l’avant du vieux chariot, Jim a les mains crispées sur les rennes tandis qu’il encaisse sans broncher une série de secousses et de tangages. Jusqu’ici les rouent ont pu gravir le réseau de racines qui tapissent le sol mais c’est au prix de leur confort. Pour une fois, l’ancien mousse ne s’en plaint pas. Tout vaut mieux que de se retrouver à pousser le chariot s’ils se retrouvent bloqués. Même si leur chargement se résume pour l’instant à quelques caissons vides, ce serait bien galère.

Il n’a pas la carte sous les yeux mais il n’en a pas besoin : leur destination est une immense structure métallique qui dépasse des cimes. On ne peut pas la rater. Non le vrai défi, c’est de se frayer un chemin jusque-là.
Chargés de récupérer autant de ferraille que possible, Nur et Jim n’ont pas eu d’autre choix que de s’accommoder du chariot grinçant et du mulet qu’on a bien voulu leur prêter.

Pour la conduite, c’est qui Jim s’est porté volontaire. Il espérait qu’en se concentrant là-dessus, il n’aurait pas la place de gamberger ou de ressasser les vieux souvenirs. Ça n’a pas marché. Pendant tout le trajet, il n’a pas desserré la mâchoire, se contentant d’opiner ou de secouer la tête quand sa camarde lui posait une question.
C’est pas contre elle. Au contraire, Nur n’est pas désagréable, comme compagnie.

C’est la machine.
La foutue machine.

Droit devant.

« Je crois qu’il vaut mieux s’arrêter là. Si on continue plus loin, j’aurai plus la place de manœuvrer pour faire demi-tour. », il dit enfin, la bouche sèche.