| | Meteor
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 | | Sujet: cycle Dim 26 Juin 2022 - 17:29 | |
| Cette chaise. Cette foutu chaise. Ça doit faire trois heures (si tant est qu’on puisse parler d’heures ici) que Meteor s’échine à renforcer les pieds de cette chaise branlante, et moche, et chiante, et merde. Il ne comprend pas comment tant d’enfants ont pu se remettre au travail, aux missions et aux jeux si rapidement, oubliant avec autant de facilité que leur bien-aimé monarque, le Givre qui avait failli les engloutir, et tout le reste avec. Meteor, lui, n’arrivait pas à oublier. Et plus il se forçait, moins il y parvenait, et l’angoisse que cet insoutenable blocage le fasse grandir ne faisait que préciser et rabâcher ses souvenirs. L’île avait oublié, elle, alors pourquoi pas lui ? Pourquoi pas lui ? Parce que Meteor n’oubliait pas. Il n’avait pas oublié Greta. Il n’avait pas oublié son objectif. Il n’avait pas non plus oublié Virgule. Cyber lui avait dit qu’elle s’était battue jusqu’au bout. Le Givre n’avait fait qu’effleurer sa patte. Mais Meteor savait, et tout le monde savait, que c’était assez. Après cela, son comportement avait changé, sa santé avait déclinée. Cyber avait eu assez de délicatesse (et pourtant, c’était Cyber), pour ne pas infliger à son camarade trop de détails. Meteor avait été tiraillé entre l’envie de tout savoir, de connaitre chaque étape, et l’angoisse de réaliser quelle souffrance sa petite compagne avait traversée. Finalement, il avait remercié Cyber d’une voix éteinte mais reconnaissante, et Cyber lui avait tendu le petit corps congelé de Virgule, entouré d’une petite couverture. Il semblait en avoir pris soin, avant et après. Meteor avait gardé Virgule avec lui quelques temps. Sous son lit. Que faire d’elle ? Où la faire reposer ? Est-ce que l’île l’avalerait, ou la transformerait en quelque chose ? A quoi pouvait-on encore s’attendre ? Au final, un enfant de sa cabane s’était plaint à la Mère. Meteor n’avait plus le choix. Il ne pouvait pas la garder éternellement, pas vrai. Rien n’est éternel ici, en plus. A part l’enfance. Le Grand Arbre est de nouveau bondé de monde. Le cimetière aussi, mais de moins en moins d’enfants s’y rendent à mesure que l’Oubli fait son œuvre. Lui, il se souvient encore du minuscule groupe de « résistants » que les autres et lui avaient formé, tandis qu’ils contemplaient, le cœur serré, la foule de Perdus qui partaient vers le Canyon. Difficile après ça de fermer son âme aux doutes, aux regrets, à l’amertume, à la rancœur aussi, pour ne pas flancher. L’Arbre avait tellement pris cher. Meteor s’était habitué à le connaître vide et malade. Et voilà que par magie (par magie) l’Arbre revenait à la vie en résonance avec le reste de l’île, les feuilles improbables et vigoureuses avaient envahies les branches, et les enfants avaient envahis les lieux. Enfin. Presque tous les enfants. Depuis le retour des Perdus, Meteor n’avait pas encore croisé Moon. Et Moon, elle n’était pas comme Apache ou Max. Quand elle disparaissait, personne ne s’en rendait compte. Personne à part Meteor. En somme, ses maigres repères s’évanouissaient, emportés par le Givre et l’Oubli, et le semblant de normalité qui régissait la vie des Perdus, bien plus que de lui redonner un sentiment de stabilité, le perturbait plus que de raison. Meteor était paumé. Un perdu parmi les Perdus. Ses pas le mènent mécaniquement vers l’un des seuls pour lesquels il a gardé un certain attachement. Son dernier repère, peut-être. Le Chef des Livreurs est devant la Cabane Principale de son groupe, en pleine conversation avec deux enfants plus jeunes. Meteor ne les connait pas, ou ne se souvient pas d’eux. Stoïque, impassible, il attend que la conversation s’achève avant d’oser s’approcher du Lionceau. Meteor ne lui a pas adressé la parole depuis la fin du Givre. Il éprouve un malaise bizarre, comme s’il redoutait des changements inévitables chez son ami, puisque Virgule était morte, que Moon avait disparu, puisque le Freckles qu’il avait connu avait peut-être disparu aussi. Il avait l’impression de l’avoir quitté depuis un siècle. Et pourtant, il n’a pas changé. Ses cheveux sont toujours aussi flamboyants, son sourire toujours aussi franc, il dégage toujours cette énergie simple et entière qui apaise tant le Court-Circuit. Cela le réconforte un peu, et il s’approche finalement du Chef. ― Salut, Freck. Les yeux lumineux du Lionceau se posent sur lui, et c’est comme si une petite chaleur invisible faisait fondre quelque chose en lui.
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|  | | Freckles
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| | Sujet: Re: cycle Lun 27 Juin 2022 - 23:51 | |
|
Tout est comme avant.
Il s’est levé dans la Maison Souterraine, a grimpé jusqu’à la cabane des livreurs, et il a fait l’appel. Il a parlé avec Mirela pendant un moment, et puis a sonné le départ vers la rivière et ils sont partis. Le retour aussi s’est passé sans un accroc, une déférlante de bonne humeur sur le chemin. Les nouveaux ont rempli les trous formés par les disparus - comme Peppy, ou Pretty, ou Blue, ou tous les autres - ils ont pris leur place dans les rangs avec beaucoup de facilité. De retour à l’Arbre, Freckles se retrouve en grande conversation avec deux nouveaux livreurs qui s’appellent Frisky et Zipper. Ils prétendent ne pas être frères mais ils se ressemblent comme deux gouttes d’eau, avec leurs bouilles reveches et leurs bonnets à oreilles d’animaux. Ils sont arrivés dans la dernière vague de gamins et Freckles s’est dit qu’ils étaient absolument parfaits. Il n’a pas pensé ça comme un compliment, plutôt avec un genre de consternation, comme s’il pensait pas qu’on pouvait encore en trouver des comme ça. Qu’il existe une grande usine qui fabrique des petits garçons perdus à la chaine comme ça et que c’est de là qu’ils se sont échappés plutôt que de la fenêtre d’un foyer lambda du monde ordinaire.
Mais bon, il faut bien se rendre à l’évidence, ils existent et ils débattent longuement sur le chemin à emprunter pour leur prochaine mission, que Freckles vient de leur confier, lui promettent de lui faire honneur et tout ça. Freckles étant Freckles, ça le fait sourire.
Soulagé, quand même, quand ils déguerpissent.
Faudra qu’il travaille là dessus.
- Salut, Freck.
Il tourne la tête, croise le regard à demi bleu électrique de l’autre garçon, et instinctivement, lève la main pour un check, sourire aux lèvres.
- Oh hey Meteor.
Il n’a pas buté sur son nom, pourtant ça fait un bail qu’ils ne se sont pas vus. Meteor fait partie de ces perdus qui sont restés à l’Arbre pendant qu’il était touché par le Givre. La plupart du temps, Freckles trouvait ça complètement con et irresponsable. D’autres fois, il trouvait que c’était impardonnable de leur part de ne pas avoir fait la même chose. Il y pensait à chaque fois qu’il était seul trop longtemps avec ses propres pensées, ce qui évidement est quelque chose que Freckles déteste.
Meteor est un pote, en tout cas. Un pote avec qui il ne trainait pas si souvent que ça, mais avec qui il échangeait toujours des regards éloquents quand il le croisait, un peu hallucinés, comme pour se rassurer mutuellement que non, ils avaient rien inventé de ce jour là, au Hameau.
Est-ce que Meteor a changé ?
Freckles est incapable de le dire.
- Ça va ? il demande, machinalement, sans vraiment attendre de réponse. J’peux faire un truc pour toi ?
Il sait pas interpreter l’attitude de l’artisan. Il a jamais vraiment su faire ça.
|
| | | | Meteor
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| | Sujet: Re: cycle Mar 2 Aoû 2022 - 0:24 | |
| C’est dur. C’est trop dur. Les yeux de Freck sont si grands, lumineux, ils ont accueilli le Printemps avec tellement de facilité qu’on dirait que pour lui le Givre n’a jamais existé. Est-ce que c’est vrai ? Est-ce que c’est forcé ? Meteor se plonge dans son regard soleil mais c’est pas possible de dire. Alors Meteor se sent coupable, tout à coup, de venir voir son pote qu’il n’a pas côtoyé depuis le début du carnage, de le cueillir alors que même les fleurs ont pas fini d’éclore, pour lui parler de mort. Il voudrait faire demi-tour, maintenant, lui dire « rien, c’était juste pour voir si ça va », et vraiment il manque de le faire... Mais quelque chose en lui le rattrape, le retient. C’est pas vraiment un copain, s’il peut pas dire à Freckles que son petit chien est plus là. C’est pas vraiment vrai s’il lui sort que des banalités alors que tous les deux ils ont failli crever, pendant une aventure de dingue qui en fait les a liés. Il va pas dire tout ça, évidemment, mais ses yeux dispersés dans tous les sens montrent bien que ça galope sévère à l’intérieur. ― Je... Je sais pas comment te dire ça. Un enfant passe et salue Freckles, lui adressant au passage un regard poli bien que beaucoup plus réservé, et ça irrite Meteor de façon un peu excessive. ― Tu veux bien qu’on descende ? il ajoute, un peu brutalement. De l’Arbre, j’veux dire, de tout ça. Juste deux minutes. Il se sent bête, à être tellement énervé, tendu, perturbé par la vie revenue. C’est quand même bête non. Il essaye de dire « s’il te plait » avec ses yeux, parce que plus rien ne sort de sa bouche sèche. Il espère que Freck comprendra que c’est sérieux. Jusqu’ici, il a toujours compris.
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| | | | Freckles
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| | Sujet: Re: cycle Mer 3 Aoû 2022 - 22:11 | |
| - Je... Je sais pas comment te dire ça.
Il a sa réponse. Quelque chose ne va pas. Ça peut pas bien aller, quand on dit une phrase comme ça. Il reste un peu interdit, comme s’il avait oublié quel genre de potes ils sont, lui et Meteor, s’il est censé le réconforter, lui mettre une main sur l’épaule, quelque chose comme ça. Il se contente de le regarder lui et son regard fuyant, puis son mouvement soudain, cassant.
- Tu veux bien qu’on descende ? De l’Arbre, j’veux dire, de tout ça. Juste deux minutes.
- Euh ouais. Ouais bien sûr.
Il regarde derrière lui, fait un espèce de signe à deux autres gamins qui les regardent, comme pour leur dire que tout va bien, et de partir sans lui, et lui et Meteor, ils prennent le chemin inverse, descendant un des escaliers de bois et de cordages depuis la cabane des livreurs. Chez Freckles ça cogite sec. S’il avait de l’imagination, il s’inventerait les pires horreurs. Il essaie de se demander quelle mort horrible Meteor vient lui annoncer. Quel pote ils ont en commun qui mériterait qu’on vienne le voir lui en premier. Il sèche. Alors il se dit que l'artisan a fait une connerie, une connerie si grave qu’il aurait besoin de son aide, celle d’un chef, pour l’effacer.
- Meteor, c’est grave ?
Il a pas pu se retenir jusqu’à ce qu’ils arrivent tout à fait en bas pour demander. Et à la seconde où la question sort, il la regrette un peu.
Mais en même temps, il a déjà demandé s’il pouvait l’aider.
Que Meteor lui aie pas répondu tout de suite, ça l’inquiète.
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| | | | Meteor
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| | Sujet: Re: cycle Dim 28 Aoû 2022 - 16:16 | |
| ― Meteor, c’est grave ? Oui, un peu. Non, pas trop. Décide-toi, Meteor. Il leur reste quelques marches. Par un étrange hasard, il n’y a aucun enfant autour d'eux. Meteor laisse lentement sa vieille basket défoncée atteindre le sol. Il attend que vous soyez à la même hauteur. Freck n’a que deux centimètres de plus que lui. Il est comme une version sans couleur, sans chaleur de lui. Un soleil et une lune. ― Freck. Tu te souviens de Virgule. Meteor le laisse répondre, les mots sont au ralentis, les battements du cœur en accéléré. ― Elle est... Elle est morte. Ça y est, il a dit le mot. C’est la première fois. Alors d’un coup la réalité le frappe, le happe, s’étale dans toute sa violence dans son esprit embrumé. Virgule est morte. Morte pour de vrai, morte comme tous les Givrés. Elle était déjà vieille en vérité, et Meteor n’a jamais vraiment su si les animaux de compagnie continuaient de « grandir » une fois sur l’île. Il s’était fait son idée sur la question, à force des réflexion. Selon lui oui, les animaux vieillissaient. Parce que vieillir c’est juste la nature qui prend le temps de marquer ton âme et ton corps, que l’enfant sauvage qu’était Peter PAN, pourtant, défiait les lois de cette même nature, mais ne pouvait le faire qu’avec les enfants. Les animaux ne l’ont pas comme tyran. Les animaux se plient aux lois de la nature et du temps. ― Je. Cyber et Grumpy s’en sont très bien occupés. Ce n’est pas de leur faute. Elle est... Il n’arrivera pas à le dire une seconde fois. Elle est partie à l’arrivée du Printemps. Cyber m’a dit que ça s’était fait tout doucement... Tu vois, comme si elle s’était endormie... Quand elle a senti que le soleil et les fleurs revenaient... Elle s’est juste laissée- Sa gorge se contracte tout à coup, les mots se coincent à l’intérieur. Il essuie d’un revers de manche ― il porte un vieux sweat gris aux manches trop longues ― une larme revêche et détourne les yeux ; il craint d’avoir mis son ami mal à l’aise, il a pas envie. Il voudrait juste lui dire que sur ce coup il a besoin de lui. Pourquoi c'est si difficile de dire des trucs comme ça. ― Désolé. il ajoute sobrement. Je veux pas t’embêter tu sais, je... Juste, est-ce que tu accepterais... Il prend une respiration. De venir l’enterrer avec moi. Dans un bel endroit. Pas juste ici, avec tout le monde, tous les... Les morts qu’on a déjà oublié. Meteor le fixe maintenant, pour de bon, sans ciller. Avec son oeil chelou, mais le Lionceau a depuis longtemps cessé de s’en formaliser. ― J’ai pensé au Saule Millénaire. Chez les Hurons. Il parait que c'est un lieu doux et sacré. Peut-être qu’elle y sera... en paix. C’est vraiment pas facile, de parler de la mort, quand t’as quatorze ans.
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| | | | Freckles
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| | Sujet: Re: cycle Lun 29 Aoû 2022 - 23:45 | |
| « Freck. Tu te souviens de Virgule. »
Freckles hoche la tête sans prendre le temps d’être certain que c’est le cas. C’est seulement quand il voit l’expression égarée de Meteor qu’il se met à y réfléchir, qu’il plonge avec un genre de panique tranquille dans ses souvenirs à la recherche d’un visage qu’ils auraient connu tous les deux, Virgule, Virgule ...
« Elle est... Elle est morte. »
Il y a une petite pause, un moment de flottement, Freckles fixe Meteor, voit ses yeux s’embuer, comprend pas tout de suite.
« Oh », il souffle.
« Je. Cyber et Grumpy s’en sont très bien occupés. Ce n’est pas de leur faute. Elle est... Elle est partie à l’arrivée du Printemps. Cyber m’a dit que ça s’était fait tout doucement... Tu vois, comme si elle s’était endormie... Quand elle a senti que le soleil et les fleurs revenaient... Elle s’est juste laissée- »
Et c’est maintenant qu’il s’en souvient. Virgule est le chien de Meteor. Son petit chien tout blanc qui ressemblait à une serpillère. Freckles se sent soulagé, puis coupable immédiatement après. Il se concentre de toutes ses forces pour ne pas montrer sur son visage qu’il s’attendait à pire, parce qu’il ne faut pas être un grand observateur pour comprendre que Meteor est triste pour de vrai, profondément, pour ce chien qui est une victime parmi peut-être des centaines au Grand Arbre.
« Désolé. Je veux pas t’embêter tu sais, je... Juste, est-ce que tu accepterais… De venir l’enterrer avec moi. Dans un bel endroit. Pas juste ici, avec tout le monde, tous les... » L’artisan s’interrompt, se reprend. « J’ai pensé au Saule Millénaire. Chez les Hurons. Il parait que un lieu doux et sacré. Peut-être qu’elle y sera... en paix. »
Meteor le fixe intensément. Il ne pleure plus du tout, ce qui rassure un peu Freckles, qui n’a jamais été doué avec ces choses là. Il hoche la tête de nouveau : cette fois il pige pour de vrai.
« Tu m’embêtes pas. C’est moi, je suis désolé. Je savais pas. Bien sûr que je vais t’aider. »
Et puis il rajoute, plus doucement :
« C’est une bonne idée. »
Le Saule Millénaire. Il est pas souvent allé chez les Hurons, mais cet arbre, c’est impossible de le louper, c’est un truc magnifique. Les garçons perdus, ça revient toujours à la maison. C’est Peter qui les enterre, tout seul, et Freckles ne va jamais visiter le cimetière. Mais un petit chien, ça peut aller n’importe où.
« J’ai jamais vraiment fait ce genre de trucs », il avoue. « Il faudra me dire quoi faire. »
Et puis il pense enfin à chercher du regard le corps de Virgule. Meteor ne la tient pas dans ses bras. Il est un peu embarrassé mais demande quand même :
« Elle, euh … Elle est où ? »
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| | | | Meteor
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| | Sujet: Re: cycle Dim 8 Jan 2023 - 16:54 | |
| Meteor tente vraiment de maitriser son souffle pour ne pas paraitre excessif ou inquiétant, comme s’il ne se sentait pas en droit d’attenter à l’équilibre encore tout précaire qui vient de revenir au Grand Arbre. Il faut se montrer mesuré, lucide, simple. Simple. De toutes façons les émotions c’est pas son truc. A part Freckles et Moon, peu de Perdus ont déjà vu Meteor exprimer une autre expression faciale que celle d’un masque alerte et tendu. Malgré tout, le soulagement qu’il ressent après la réponse de son camarade est si profond qu’il ne peut s’empêcher de fermer les yeux quelques secondes en expirant longuement. — Merci, dit-il d’une voix légèrement étranglée. Elle est dans un endroit à part du Grand Arbre. Je voulais pas qu’on puisse la trouver et... je sais pas. Il sait que ce qu’il s’apprête à dire, à faire, marquera un point de non-retour. Il sait qu’il prend un risque, un gros risque, parce que même si Freckles est son ami, Freckles est avant tout un Chef investi et un Perdu convaincu. Qu’il ne saura pas comprendre pourquoi Meteor voudrait quitter l’île. Il ne saura comprendre l’existence de Stardust. Mais Virgule est là-bas, reposant encore dans son panier, emmitouflée dans une couverture faite à base d'un vieux pull de Met', comme lorsqu’elle dormait pendant que son humain trafiquait son engin sans relâche jusqu’à ce que tombe la nuit. Virgule est là-bas parce que c’est le seul endroit qui évoque un tant soit peu la sécurité aux yeux de Meteor. Une safe place, comme disent certain.e.s. Sa safe place. — On a pas de mission cette après-midi, Peter ne nous a rien donné. Un fait d’ailleurs assez intriguant pour que Meteor ait pu le remarquer : Peter ne leur demande plus ni mission ni jeu ni rien, depuis son Dégivre. Peut-être que c’est normal. Meteor ne peut pas comprendre un enfant comme Peter Pan, et il ne s’y essayera pas. — Alors si c'est possible... tu peux m’accompagner maintenant ? Ce n’est pas très loin, et si on marche vite, on aura le temps d’aller jusqu’au Saule et de revenir avant la nuit. Il faut juste... faire un petit détour. Il commence à se demander si c’est vraiment une bonne idée. Il commence à se dire, comme d’habitude, qu’il ferait mieux de se débrouiller tout seul. Pourtant son regard bleu et noir s’accroche toujours à celui, lumineux, du Lionceau.
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| | | | Freckles
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| | Sujet: Re: cycle Ven 17 Fév 2023 - 13:49 | |
| « Merci. Elle est dans un endroit à part du Grand Arbre. Je voulais pas qu’on puisse la trouver et... je sais pas. »
Freckles se frotte le poignet machinalement comme si une blessure le grattait. Il soutient le regard endeuillé de Meteor parce qu’il s’y sent un peu obligé, parce que même si la mort de Virgule ça lui fait ni chaud ni froid, voir l’artisan comme ça lui fait de la peine. Il suppose que c’est parce qu’ils ont amis. Parfois Freckles se rend compte avec une culpabilité sourde qu’il a du mal à se réadapter à ça : se rappeler des amis qu’il a pas vu depuis le début du Givre. Comme s’il avait décroché.
« On a pas de mission cette après-midi, Peter ne nous a rien donné. »
« Ouais », Freckles répond doucement, sans bien savoir où Meteor veut en venir.
Mais il s’est décidé maintenant, il va aider Meteor et ce sera bien. Et c’est vrai qu’ils sont libres cet après-midi. L’air aurait un goût de vacances de printemps si Freckles se rappelait ce que c’est.
« Alors si c'est possible... tu peux m’accompagner maintenant ? Ce n’est pas très loin, et si on marche vite, on aura le temps d’aller jusqu’au Saule et de revenir avant la nuit. Il faut juste... faire un petit détour. »
Freckles ne se formalise pas vraiment des hésitations de Meteor. Il trouve ça dur de lire ses sentiments à cause de l’oeil qui crépite.
« Euh ouais pas de soucis. Faudrait peut-être juste que je- »
Il ferme la bouche. Qu’il prévienne ? Qui ça, Peter ? Peter doit bien s’en foutre. Et puisque personne n’a de mission, aucun livreur n’a besoin d’être mis par paires et de vérifier son sac à dos. Tant qu’il rentre avant le soir, tout va bien. Il hausse les épaules et fait un geste de la main pour signifier à Meteor de laisser tomber. S’il croise un livreur sur le chemin du « détour » de l"artisan, il lui dira au passage que c’est pas la peine de le chercher.
« Vas-y, je te suis. » |
| | | | Meteor
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| | Sujet: Re: cycle Dim 19 Mar 2023 - 21:08 | |
| A chaque pas, l’anxiété de Meteor se fait plus aiguë, plus envahissante. Une douleur lancinante assaille son coeur par vague, comme une marée de piquants. Il ne sait pas si c’est l’angoisse ou sa maladie. Freckles sur ses talons, sans cesser de marcher, il fouille machinalement dans la poche de son jean et en sort sa petite boite métallique, où sont rangées ses médicaments. Ceux qui sont vitaux, et ceux qui servent juste à calmer. Il en prend un au hasard, sans savoir si c’est l’un ou l’autre, et l’avale sans eau. L’habitude. La marche n’est sûrement pas si longue, mais ça lui parait une éternité. Parfois, Meteor se dit que comme le temps est totalement dézingué ici, il dépend sûrement du ressenti de ceux qui le subissent. Ca fait assez longtemps qu’il est là pour avoir perdu la notion d’heures, de minutes. Ses seuls repères sont le jour et la nuit, la faim parfois, la fatigue souvent, et c’est sûrement la même chose pour Freckles. Ce que Freckles n’a pas, en revanche, c’est ce sentiment d’urgence de savoir que chaque jour qui s’éteint est un de plus où Meteor n’a pas retrouvé sa soeur. Greta. Kee Young. Souvent, Met se demandait si ses souvenirs étaient si nets parce qu’il se souvenait d’un de ses prénoms, et que Peter n’avait pas pu l’emporter. Un éclat rouge écaillé apparait devant lui, subrepticement, entre les arbres fournis qu’ils écartent pour passer. C’est un morceau de la peinture de Stardust. Meteor se demande une fraction de seconde s’il ne devrait pas se retourner d’un coup et s’expliquer avant que Freckles ne découvre tout. Mais ses pas le mènent malgré lui, tendus et réguliers, et sa mâchoire reste scellée. Repoussant les dernières broussailles, ils arrivent finalement à la hauteur du vaisseau. Celui-ci est en grande partie recouvert d’une vieille bâche abîmée, mais on distingue quelques morceaux. Un mélange de ferraille nue et de peinture érodée. Stardust a pris très cher pendant le Givre. Un temps de perdu supplémentaire. — C’est par là.Freckles n’a pas encore posé de question. Meteor contourne l’appareil, qui fait la taille d’une grosse voiture, et se dirige vers une des ouvertures, une sorte de grosse porte blindée. Il appuie sur un gros bouton sur la façade et la porte s’ouvre en remontant. Meteor s’accroupit. La couverture de fortune est là, on voit une petite patte dépasser. Meteor soupire. Ce n’est qu’alors qu’il se retourne vers son ami. Il ne pourra ignorer ses questions indéfiniment.
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| | | | Freckles
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| | Sujet: Re: cycle Mer 29 Mar 2023 - 22:15 | |
| Freckles suit Meteor de quelques pas en arrière, et il cherche vainement des sujets de conversation qui ne lui viennent pas ; à la fois parce qu’il n’a pas d’inspiration, et parce que Meteor ne semble pas vouloir parler du tout. Même en ne voyant que le dos de son crâne, il peut sentir la tension de l’artisan, ou peut-être que c’est encore de la tristesse, il en sait rien, mais dans tous les cas, c’est pas propice à la discussion.
Alors Freckles se tait, et il marche, et le chemin lui semble très long.
« C’est par là », lui dit Meteor.
Ils ont atteint une espèce de petite ouverture entre les arbres. Freckles fronce les sourcils en approchant, en essayant d’identifier le truc qui se dresse devant lui. C’est peint en rouge, et à moitié recouvert d’une grande bâche. Il estime que c’est fait en métal. Quand il arrive assez près, il s’arrête, laisse Meteor faire tout seul le tour de l’objet. Il y a des ouvertures, une étrange fenêtre ronde, et un genre de porte qui s’ouvre quand Meteor appuie sur un bouton.
On dirait une fusée, se dit finalement Freckles, ce qui ne le rend pas vraiment moins perplexe.
Meteor ne dit rien, il le regarde avec son air intense et ses yeux asymétriques. Assez longtemps pour rendre Freckles un peu nerveux. Alors il se décide enfin à s’approcher, contournant le vaisseau prudemment. Maintenant du même côté que l'artisan, il voit une couverture d'où dépasse une petite patte blanche. Il avait un peu peur de l’état de décomposition dans lequel ils trouveraient l’animal, et est un peu soulagé que ce soit pas si terrible que ça.
« T’as trouvé ça où ? » il demande prudemment en posant une main sur le métal rouillé.
Dans d’autres circonstances, il aurait pu croire que l’objet était réellement tombé du ciel, ou poussé là au milieu de la forêt comme un champignon. Ou bien encore construit par un gnome, ou quelque autre fantaisie du genre. Mais dans l’attitude de Meteor, il pige que ce truc a plus d’importance que ça. Que c’est à lui. C’est peut-être cette réserve qui met les sens de Freckles en alerte, en fait.
« C’est toi qui l’as fabriqué ? »
Il lui vient l’idée un peu bizarre que Meteor a fait exprès d’attendre que son chien soit mort pour lui montrer ce truc, pour l’empêcher de poser trop de questions. On pose pas de questions gênantes à quelqu’un qui est en deuil de son petit chien.
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