Agenouillé dans le sable, au plus près de la mer, loin, une bande de tissu blanc enroulée sur sa tête ; quelque chose comme un turban, bien qu’un peu lâche, Malik s’affaire. À sa manière, il attend. Entre ses genoux est coincée une étroite pierre qu’il retient fermement et dans son poing luit sa nimcha sous le soleil du petit matin. D’une main il en tient le pommeau, de l’autre, paume à plat, il glisse la lame sur la pierre humide. Ses cheveux trempés lui collent à la peau et descendent jusqu’au haut de son dos mis à nu, tatouage au grand jour.
La sueur perle sur le visage et les épaules et les bras du Scorpion qui pourtant n’est pas de ceux que la chaleur atteint aisément. C’est qu’il y a longtemps qu’il s’affaire. Il y a plus d’une heure qu’il se lève, trempe la lame, mouille la pierre, s’agenouille, aiguise, se relève… Prisonnier de cet enchaînement rituel, mais plus que tout, trop absorbé pour songer à quoi que ce soit d’autre. Notamment à Christopher-Marie Redskin.

« Christo », soi-disant sauveteur de ces dames ; petite matakurka égarée, par exemple.
« Christo », soi-disant sauveteur de ces dames ; qui à son tour, puisque petite matakurka inquiète, doit apparemment être sauvé.
Et ce, aujourd’hui. Ce matin même, bientôt, très bientôt, trop.

Malik n’a pas oublié, seulement, ce n’est que maintenant que la nimcha tinte agréablement sous l’ongle de son pouce. Satisfait malgré lui, le pirate se relève donc, examine le tranchant de son arme avant de rengainer d’un geste fluide, puis de fixer la pierre à sa ceinture. Fin prêt, il prend tout de même le temps de se délester de son turban, de le tremper dans l’eau de mer et de s’éponger le haut du corps avec avant de l’enrouler autour de sa taille. C’est que le ciel ne dérougit pas. Et bien qu’il arrive à s’accommoder de la cuisante chaleur, Malik commence sérieusement à se demander si l’île ne finira pas en un seul et unique grand désert.
Du regard il cherche sa tunique et s’étonne de la voir si loin sur le rivage. Entreprenant de la retrouver, il va, ce faisant, au devant d’une silhouette.

Profondément, Malik inspire.
Dommage qu’ils n’aient pas oublié…
Lourdement, il expire, et se répète que c’est pour Laila. Qu’elle ait une chose de moins à s’inquiéter. Une chose de plus pour lui reconnaître quelque chose comme un cœur. Une raison de plus d’y croire, à ce cœur, qu’il y soit ou pas.
Sans compter que ça distraira Keith de sa peine, le temps de lui retrouver son Papoose. Mort ou vif. Mais autant que possible vif. Autrement, en plus du cadavre, il leur faudrait traîner une loque. Et Shifty a beau être forte, pour une fille, elle n’en est pas moins qu’une, de fille.

Malik se penche et attrape sa tunique au passage. Sans cesser son avancée sur la plage, il secoue son vêtement.  
La rencontre est imminente.
Il enfile le haut blanc et couvre ainsi le scorpion qui lui colle à la peau. Une main glissant dans ses soyeux cheveux, Malik, retrouvant l’autre, lâche avec désinvolture, tout en désignant les alentours d’un geste vague…

J’ai pensé qu’on pourrait passer par le canyon. Se raclant la gorge, il rectifie. Passons par le canyon. Tant qu’à s’aventurer en territoire Piccaninny, aussi bien en profiter pour voir du pays. Et risquer de se perdre, et de ne pas parvenir à destination et… On y trouvera peut-être de quoi manger en chemin. Sans compter la soi-disant source sacrée. S’il est mal traité, le Papoose aura sûrement faim. Plate justification. Malik évite le regard de son homologue. Ses yeux risqueraient de trahir son manque de sincérité.

Alors ça, c'était une sacrée drôle d'équipée. Hey !
Un pain-grillé, un baba-au-rhum, une moka-café et une meringue blanche comme un cul. Le tout sur une île flottante.

- Héhéhéhé....

Carne se fait rire tout seul.
Il fallait au moins ça pour garder le moral de la troupe dans la moyenne positive. Faut dire qu'au vu de leurs tronches constipées, il doit la porter à bout de bras, la moyenne. Le pas sur et tranquille, il se glisse entre Keith -le chevelu en pleine surdose de sobriété- et Shifty - la serveuse à mine de fouine bien loin de sa taverne. Il connait moins les deux réunis que son Scorpion d'ami.

- On peut passer par l'Canyon, ué. Si les route on pas changées y'a un ruisseau qui doit être asséché, maintenant, un peu plus au nord, en descendant. On aura qu'à suivre son lit : il est à moitié sous gorge. Pour peu qu'on reste à couvert des ombres, on pourra éviter d'accrocher les rétines des sentinelles.

Comment le sait-il ?
Il le sait c'est tout.
Enfant il jouait à se faufiler hors du camp, remonter le cours d'eau le plus rapidement, en compagnie de Nunca et Nadie. Leurs rires se répercutaient sur les parois rougies des pierres alentour. L'ancien papoose s'y abreuve-t-il encore malgré la canicule ? Se souvient-il que sa soeur le laissait systématiquement gagner ?
Depuis la bataille du Jolly Roger, il sent les souvenirs de cette famille là s'effriter. Il peine à se rappeler du visage en colère de Hyène. Le timbre sifflant de Mamba n’est plus qu'une conviction auditive. Il craint de ne pas réussir à reconnaitre son Nunca noyé dans les traits d'adulte de celui qu'on nomme désormais Kokoï Avide. S'il suit ces trois là c'est moins pour le sauvetage du petit Christo que par devoir de pèlerinage.
Et puis on ne refuse pas l'appel d'un ami.

Si Malik a besoin, Carne suit.

Le Pécheur déplie ses longs bras tatoués et accroche les épaules à la fois de Keith et de Shifty. Tac! Tac!

- Et si z'avez la dalle, j'ai du poisson séché dans mon futal... faut juste pas avoir peur de Fiente , hey !

Il ricane de plus belle.
Au final de ces quatre là, c'est le plus joisse affichée.

Il y a quelque chose qui cloche avec Keith.
Trop occupé à s’improviser une vocation de Monsieur Loyal, Malik n’a pas noté, sur le coup, le décalage chez le pirate. Et la remarque de ce dernier ne manque pas de le faire rouler des yeux.
Pas envie de s’obstiner.
Il songe à proposer à Keith de partir chacun de leur côté, mais s’en garde en voyant que Shifty les rejoint. De la voir, Malik sourit et coule de biais un regard au pirate, animé d’une gaminerie peu discrète de jeune homme qui s’apprête à gagner.
Un peu trop confiant peut-être, mais Shifty ne le supporte pas moins.
Victoire.
Et aux yeux et sourire de Malik de s’affiner aux mots de la serveuse. Il épargne sa petite fierté mal placée à Keith et se contente d’acquiescer.

Ça le fera. renchérit-il à l’adresse de Shifty.

Mais la Sournoise n’en a que pour ses pieds, sur lesquels d’ailleurs Malik baisse les yeux à son tour.
Mais rien. Y’a rien, là.
Petit froncement de sourcils confus, le Scorpion s’en remet à Keith, puis à Shifty de nouveau.
Monsieur Loyal, n’est-ce pas?
C’est qu’il règne effectivement une bizarre ambiance. Constatée des estrades, la scène serait peut-être drôle, mais vu d’ici, les points d’interrogations sont comme de la mauvaise herbe.

Bref, ne manque plus que Carne.
Qui rit tout seul en s'amenant. Mais pas longtemps. De voir l’autre rire inspire le Scorpion qui en fait de même.
Content de voir que le Pécheur opte pour le canyon, et n’ayant pas plus songé au ruisseau qu’aux éventuelles sentinelles, Malik se contente d’acquiescer, un discret sourire toujours accroché au coin des lèvres.
C’est que, de son côté, l’humeur est à l’excursion scout davantage qu’au sauvetage.
En plus, Carne a même pensé au pique-nique.

Alors ça y est. Décollons, comme disait Shifty.

Et le Scorpion décolle sans plus attendre. Tout en songeant… Que Keith a une raison, lui, de vouloir sauver Christo. Et une bonne. D’eux tous, probablement la meilleure. Enfin, celle de Malik, bien que secrète, est, à son humble avis, on ne peut difficilement plus noble, mais son jugement est sans doute un peu biaisé.
Tout de même.
Keith y est pour Christo. Carne y est pour Malik (et peut-être un peu pour Christo…). Malik y est… peu importe. « Pour Christo », disons. Mais…

Shifty… Lâche-t-il soudain, tournant la tête vers la miss. Pourquoi vouloir sauver le Papoose? Si ce n’est que pour nos beaux yeux, tu sais, ce n’était pas nécessaire. Tu le connais bien?
Qui sait, peut-être Christopher compte-t-il plus d’un sauvetage à son palmarès?
Et au Scorpion de sourire, fin finaud, tandis qu’il ajoute aussitôt :
J’ignorais qu’il avait une mère adoptive, en plus d’un père.

-T'as la sobriété réjouissante, chevelu ! Hey !

Carne claque dans le dos de Keith comme un écho.

- Promis j'f'rais un festin ta carcasse en ta mémoire, faut bien un survivant pour raconter notre histoire !

Il a trop de choses à vivre, le Blafard,  et un palpitant en bourgeon.
Le Pécheur enrobe l'équipée d'un regard malin. Il se coule, il glisse presque sur la caillasse rougie. Il se met à portée d'oreille de la jeune Shifty. Silencieusement létale si il en est.
Malik, Malik,Malik... Vilain petit scorpion, c'est mon poto ça ! Y pique, y pique, y r'garde le venin se propager! Fiéfé salopard  de mon coeur !
Et le voilà qui ricane de plus belle et pose un petit :

- Oh ! Tu viens pour Keith, en fait...

Tout doux, tout mielleux, c'qu'il faut de doucereux à quelques centimètres des tympans de la donzelle fulminante. Ses doigts pâles triturent la tresse de l'indienne, comme un chat titille une pelote de laine dont le fil dépasse. Un chat albinos, dégingandé, tatoué et dont le sourire rappelle singulièrement celui d'un requin.
Ou d'un crétin.

Œillade complice avec Malik.

Ces deux là tournent comme une drôle de mayonnaise quand ils sont ensembles.

- Personne t'en voudrait, T'sais, d'avoir de la pâte à sucre dans la poitrine pour un gars qu'a moisi ton comptoir à force de chialer d'ssus.

Et soudain il bifurque brutalement sur un autre sujet.

- Et sinon c'quoi l'plan quand on arrivera en vue du camp ? Au gré d'l'humeur ? Tu t'sens diplomate, Malik, ou plutôt, boucher c'matin ?

HRP les canailloux:

De crever, de crever… Tous ensemble ou pas, peu importe au Malik confortablement installé sur son insouciance et qui du coup laisse couler comme de l’eau le pessimise du père endeuillé sur son dos.
C’est qu’il est triste, au fond, le gaillard.
…
Et un brin heurté par sa question pour Shifty.
Mais Malik peut comprendre. Malik est comme ça : brillant. Car oui, c’est vrai… Pauvre Christopher-Marie, peut-être mort à cette heure, il ne faudrait pas trop se moquer. Malik peut comprendre; ne lui manque que la volonté de le faire.

Il reste que c’est drôle, quand même, non? Christopher-Marie Redskin-Sournois-Jackson.
Si c’est drôle! Carne l’a compris, lui. Brave Carne. D’un regard, le Scorpion approuve le support du Pécheur.
Sans oublier Shifty.
Allons donc, il ne saurait l’oublier, petit cactus de bout de femme. Qu’il aime beaucoup, lui aussi, vrai. Il y a réciprocité dans cette histoire de teints de soleil, mais ce n’est pas tant au collectionneur d’histoires, qu’elle a affaire aujourd’hui, qu’à quelque chose comme le grand frère un peu chiant.
Quand même, Malik vient poser sa main sur l’épaule de la Sournoise, la serre un peu, deux petits coups, et lui fait un clin d’oeil.
T’inquiète Shifty, que ça dit, t’inquiète, je plaisante. Et puis tu m’aimes toujours.
Pas vrai?

Et ça rigole, bouche close, à petits rebondissements d’épaules et gloussements de fond de gorge, Scorpion à l’esprit surchauffé - voire fondu de trop de soleil - en se figurant L’Barré échoué au bar de la Taverne et Shifty, regards tranchants, qui serre les crocs.
C’est la faute aux mots de Carne. Il sait toujours bien les choisir.

Léger soupir de celui béni par le rire; Malik suit tout naturellement son complice de tricotage de niaiseries dans son abrupt changement de cap de conversation.
Hissant les bras vers le ciel, le Scorpion entrelace ses doigts derrière sa tête et contemple son pas d’idées sans cesser d’avancer.

Ça dépendra de l’accueil, je suppose.
Malik hausse les épaules, mais un sourire moqueur point au coin de sa bouche.
Qui sait, les Peaux-Rouges seront peut-être contents de nous voir débarquer.  coule-t-il en douce au Blafard.
Enfin! Enfin! Prenez-le! Et partez! Partez!
Christo la terreur.
Puis les bras de Malik retombent le long de son corps.
Mais… commence-t-il en jetant un oeil sur Keith. Est-ce que ce ne serait pas une possibilité, qu’il préfère demeurer là, avec eux?

Oui enfin… Si par hasard Malik tombait sur des nomades dans le désert, peut-être bien… Peut-être bien que quelque chose en lui tenderait la main, qu’il le veuille ou pas.
Peut-être.
Enfin, ils verront bien, de toute façon.

-Ça dépendra de l’accueil, je suppose. Qui sait, les Peaux-Rouges seront peut-être contents de nous voir débarquer.
- Ahahah ! On en peu plus d'c'te canaille, on vous l'remballe dans un beau paquet et maint'nant cassez-vous ! formule tout haut Carne, matérialisant la pensée de son comparse.
-Mais… Est-ce que ce ne serait pas une possibilité, qu’il préfère demeurer là, avec eux ?

Les deux affreux se tournent de concert vers la cible "innocente" de ce coup de poignard :

-Quand y m'verra y voudra forcément rentrer. J'lui manque autant qu'y m'manque c'est sûr !

Le Pécheur pense à sa propre famille d'adoption. Il est parti sans jamais se retourner - Salaud de fils ingrat - et pourtant, Grande Mère, il les aimait, comme un dingue. Mais le bagage était trop gros. Et il avait que ses deux bras pour le porter.

- Les fils ne reviennent pas toujours, murmure-t-il de manière presque inaudible et seulement à porté de voix de ceux qui sont tout près.

La petite serveuse café-salé, s'arrache à sa poigne. Sa tresse file au loin pour consoler le triste-sire.
Myope mais loin d'être aveugle, Carne remarque les variations d'expression de la jeune fille. C’est digne d'un sapin de Noël ou d'une explosion volcanique, ou peut-être d'un incendie de forêt. Frappant, donc. Et joli. Féminin, pour beaucoup.
Complétement fascinant, en somme.
Nouveau, pour lui.
Il pense à sa Rousse.
Il pense à sa Princesse des Lapins.
J'pense trop, putain !
Mentalement, le Pécheur se dit qu'il a trouvé un drôle d'interrupteur. Un ÉNORME bouton rouge. Il a envie d'appuyer à nouveau dessus pour voir ce que ça fait, malgré l'interdiction en lettres sanglantes. Juste pour voir comment ça marche ce truc là.

Ah les femelles, drôles de créatures !

Carne a bien à faire avec les siennes et c'est sans doute ce qui le rend si réceptif à Shifty-la-guirlande dont les émotions, pourtant si finement dissimulées d'habitude, sont offertes en pâture au regard. Incroyable ! Magique !
Même joueur joue encore !

-... Comme on sait pas bien ce qui va se passer, je me suis dit que je pouvais venir au cas ou ça tourne mal. Enfin, pour le moral, tout ça.

Carne penche la tête sur le coté, curieux.

- Tu vas nous l'r'monter comme un ressort ? Comment qu'tu vas nous faire ça ? Tourne-vis ? Tourne-Boyaux ? Tourne-Marteaux ?

Soyons honnête, tout cela lui parait bien incongru. Blague à part, comment elle pourrait remonter un truc dans la tête ? Avec une clé ? C't'une sorte de Machine à elle toute seule ?

- Enfin, j'ai pris le rhum des retrouvailles avec Christo, dès fois que t'aies eu envie de t'en jeter un direct après l'avoir revu. Maintenant que j'y pense, c'est con, parce que t'es sobre et tout. Mais, euh, je savais pas au moment de partir. Voila
- AHAHA ! Ué c'est con ! ponctue-t-il spontanément avec toute la tendresse - réelle- qu'il a dans le coeur pour cette fillette mordue, croquée, boulottée.

L'amour rend bête.
Ouep.

- On t'en veut pas, Hey ! Juré qu'on se réchauffera l'gosier  avec ta biture une fois l'aventure terminée ! Promesse, Jolie-Tresse !

Il étire sa grande carcasse tatouée qui parait épargnée par les coups de soleil.

- Soyons clairs, ça peut barder qu'il veuille rester ou pas. Pt'êt aussi - faut l'envisager- qu'il a canné de ses blessures. Aux dernières nouvelles c'était pas la fête du falzar. Hey, Shifty, tu saurais couvrir nos culs en t'postant à couvert et à distance ?  T'as un arc ou un crache-poudre ?

Prouve moi qu't'es pas juste un porte-bouteille !

HRP:

Entre sérieux et rire, Malik navigue avec la souplesse d’un ivrogne cependant sans perdre pied. Pas encore.
La faute à Carne, c’est dit, déjà. Carne le drôle. Hé hé. Et puis à Keith, pauvre Keith, qui à coups de blues renverse les sourires, réplique aux coups de poignard de Malik.
Il y a de ces coups de poignard qui veulent votre bien… Peut-être?
Le Scorpion hausse une épaule.
Qu’importe.
Mais le Pécheur a raison, il y a de ces fils qui ne reviennent pas, qu’ils le veulent ou non, mais le plus souvent qu’ils le veulent. Il y a de ces fils qui ne reviennent pas et qui ne s’en portent que mieux. Malik ne sait pas, pour Christo, et n’y pense pas, mais qui sait.
Le Scorpion hausse une épaule.
Ouais, qu’importe. En temps et lieux, ils verront bien.

Quand l’un - Carne - pense trop, sirènes, tresses noires et crinières rousses lui dansant dans l’idée, l’autre - Malik - se contente de penser peu. Ça rééquilibre.

Pour preuve, au contraire de Carne qui ne voit pas comment elle s’y prendra, Shifty, pour remonter le moral de la troupe, en cas de pépin ou, pire, de noyau, Malik se contente de l’affirmation pour acquiescer, souriant à Shifty, sans rien de plus. Juste : d’accord, c’est bien, bonne idée. Quelque chose dans le genre, en tous cas. Ou encore : mais si c’est cool. Regarde, c’est cool. Je suis cool. Nous sommes cool, etc.

Quant au rhum…
Là : au coin de sa bouche, la lèvre du haut se hausse dans une furtive grimace.
Dégoût? Ça reste à prouver.
Le Scorpion boit peu, dit-on.
Le Scorpion boit si peu qu’à dire vrai, on pourrait se demander s’il boit.
Trinquer à la santé du Papoose, donc, peu pour lui. Carne promet et Malik ne dit mot, fait mine de regarder ailleurs, d’observer un truc, là haut… Hmm… Mais qu’est-ce que c’est que ça?

Soyons clairs, ça peut barder qu'il veuille rester ou pas. Pt'êt aussi - faut l'envisager- qu'il a canné de ses blessures. Aux dernières nouvelles c'était pas la fête du falzar. Hey, Shifty, tu saurais couvrir nos culs en t'postant à couvert et à distance ?  T'as un arc ou un crache-poudre ?

Malik abandonne le truc - caillou déboulant le long d’un flanc du canyon - pour approuver les propos de Carne d’un hochement de tête. Si Shifty a ce qu’il faut, vrai que ce serait bien d’avoir quelqu’un pour les couvrir. Mourir d’avoir tenter de sauver le pirate Redskin, très peu pour Malik. Sans compter que Laila s’en voudrait.
Et combien ce serait lamentable… Christo garderait tout le glorieux de l’affaire, lui aurait effectivement sauvé la demoiselle en détresse au moins une fois.
Mais le Scorpion n’est pas celui qui pense, pour l’heure, aussi cesse-t-il de le faire.
En plus, le caillou casse-gueule a fait des petits. Voici que sur leur gauche, ça dégringole, d’abord petites roches, bientôt plus grosses.
Peut-être y aura-t-il anguille sous roche… Littéralement.
D’anticiper la chose, qu’importe laquelle, Malik cesse de marcher, tourne partiellement le dos au petit groupe, jette un oeil sur leurs arrières. Y’a bruit sourd dans l'horizon proche. Et bientôt, tremblement.
Vers géant?
Troupeau à sabots?
C'est que c'est presque excitant...
Malik porte sa main au pommeau de sa nimcha. Brilleras-tu brilleras-tu pas?